Discussion : À bas la sécurité, vive l’aventure

30.11 2017 /
19h30 Bibliothèque Acrata. Rue de la Grande Ile 32, 1000 Bruxelles

Discussion : À bas la sécurité, vive l’aventure

jeu­di 30 novembre 2017 19:30

Biblio­thèque Acrata

Rue de la Grande Ile 32, 1000 Bruxelles

L’invocation à la sécu­ri­té est par­tout. Elle est ce grand chan­tage de l’État pour nous rendre pas­sifs et obéis­sants. Et pour rendre chaque jour tolé­rable ce monde de contrôle et de sur­veillance, il doit nous rap­pe­ler constam­ment à notre insé­cu­ri­té. Mais le nœud de l’histoire est que État crée lui-même la condi­tion d’insécurité sociale qui donne lieue à cette quête impos­sible de sécu­ri­té, dans laquelle il nous entraîne toutes et tous. Dans une socié­té qui se base fon­da­men­ta­le­ment sur une sépa­ra­tion entre pos­sé­dants et exploi­tés, pri­vi­lé­giés et exclus, la sécu­ri­té est invo­qué pour empê­cher un conflit ouvert dans lequel les uns reprennent ce qui leur est arra­ché ou nié par les autres. Qui plus est, la sécu­ri­té pro­tège seule­ment l’ordre et les pri­vi­lèges de ceux d’en haut, quant ceux d’en bas ne font que la subir à leur dépens.

Chaque semaine, quelqu’un se fait explo­ser au milieu d’une foule pour répandre la ter­reur au nom de dieu sait quoi… Qui serait assez fou pour mettre en ques­tion une valeur aus­si uni­ver­selle que la sécu­ri­té et vou­loir décor­ti­quer le rôle qu’elle joue dans la fabri­ca­tion de l’ordre social ?

Cette dis­cus­sion se veut une ten­ta­tive pour ques­tion­ner ensemble le concept de sécu­ri­té, dont les acteurs, dis­po­si­tifs et dis­cours idéo­lo­giques doivent subir notre cri­tique sans attendre.

Contre le pro­jet du pou­voir de sécu­ri­ser jusqu’aux aspects les plus infimes de la vie sociale, nous vou­lons détruire la pri­son sociale jusqu’au der­nier frag­ment et nous aven­tu­rer sur le che­min de la liberté.

Pro­po­si­tion d’un court texte à lire avant la discussion :

Nous vou­lons l’aventure, pas la sécurité !

L’aventure est une expé­rience excep­tion­nelle, une entre­prise dan­ge­reuse qui attire par le charme du risque qu’elle com­porte : se perdre dans des lieux loin­tains et incon­nus, réa­li­ser une action non recom­man­dée et impré­vue, vivre des ren­contres poi­gnantes. La struc­ture « exis­ten­tielle » de l’expérience humaine com­porte en soi cette dimen­sion de l’aventure. En regar­dant l’histoire de l’évolution de l’être humain, il est facile de com­prendre com­ment cela n’a été pos­sible que grâce à la capa­ci­té de l’individu d’aller tou­jours au-delà du déjà don­né et du déjà connu ; dans une ouver­ture per­ma­nente vers l’autre, vers ce-qui‑n’est-pas-encore-connu et ce-que-on‑n’a‑pas-encore-vécu. Cela a tou­jours été une condi­tion néces­saire, car l’histoire n’est pas la répé­ti­tion ennuyeuse et infi­nie de la même chose.

La sécu­ri­té, à l’inverse, est mar­quée par cette absence de risque. Sécu­ri­té, sans sou­cis et sans préoccupations.

L’augmentation du nombre de flics et de sys­tèmes de sécu­ri­té ne pour­suit ain­si qu’un but : faire en sorte que jamais rien ne se passe, te réduire à un pré­sent infi­ni de tra­vail, de mar­chan­dise et d’obéissance. Chaque appel à la sécu­ri­té est une condam­na­tion à mort de l’aventure, et par consé­quent, du deve­nir. L’apologie de l’existant est non seule­ment abjecte de par sa salo­pe­rie, mais c’est aus­si de la pure imbé­ci­li­té de par son inuti­li­té : la guerre entre pauvres conti­nue­ra à exi­ger son lot de vic­times, y com­pris sous l’œil des camé­ras de sur­veillance, tan­dis que les riches et les puis­sants cloî­trés dans leurs vil­las seront les seuls à jouir d’une pro­tec­tion omniprésente.

L’être humain est le seul ani­mal assez idiot pour pré­fé­rer la sécu­ri­té et la quié­tude d’un zoo au risque et à la liber­té de la jungle. Ensuite, une fois enfer­mé der­rière les bar­reaux, il conti­nue­ra tout au long de sa vie à rêver d’évasion et à cher­cher l’aventure dans une myriade de suc­cé­da­nés. Le voi­là alors qui chante en chœur qu’il sou­haite une vie témé­raire, le voi­là qui s’attroupe dans un ciné­ma qui pro­jette en grande lar­geur la rébel­lion contre un monde réduit à une matrice, et contre une vie sous contrôle, le voi­là qui s’imagine être le pro­ta­go­niste dans la fic­tion de jeux vidéo tou­jours plus étranges et invrai­sem­blables. Quelle hypocrisie !

Nous ne vou­lons pas la sécu­ri­té. Nous pré­fé­rons cou­rir le risque d’être détrous­sés par un voleur plu­tôt que d’avoir la cer­ti­tude de cre­ver d’ennui sous l’œil vigi­lant de la police, ou voir jour après jour com­ment notre inti­mi­té est déro­bée. Nous vou­lons l’aventure, et nous la vou­lons tout de suite. L’aventure, ce ne sont pas des vacances exo­tiques à pré­voir, mais tout un monde à bouleverser.

Parce que nous avons marre de la nor­ma­li­té impo­sée. Marre du camp de concen­tra­tion de la sécu­ri­té. Marre de cette merde de la sur­vie qu’on nous vend comme de la vie. Parce que nous vou­lons que l’inconnu fasse enfin irrup­tion dans la réa­li­té, cet incon­nu de la sub­ver­sion de l’existant.