En attendant l’avenir

Ce film a été réalisé au centre Fedasil de Sugny. Il est le fruit d’un atelier vidéo de 5 jours réunissant des jeunes de la MJ de Libramont et des jeunes mineurs non accompagnés qui vivent dans le centre: ensemble, ils vont pouvoir mettre en image la réalité de ces résidents littéralement mis en attente.

Ce film a été réa­li­sé au centre Feda­sil de Sugny. Il est le fruit d’un ate­lier vidéo de 5 jours réunis­sant des jeunes de la MJ de Libra­mont et des jeunes mineurs non accom­pa­gnés qui vivent dans le centre : ensemble, ils vont pou­voir mettre en image la réa­li­té de ces rési­dents lit­té­ra­le­ment mis en attente.

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Le centre est situé au milieu de la forêt, dans un envi­ron­ne­ment très iso­lé sur une route au milieu de nulle part entre deux vil­lages près de la fron­tière fran­çaise. En février, ils étaient dépas­sés par les arri­vées et ont éga­le­ment ins­tal­lé des tentes militaires.

Tous les rési­dents (enfants, familles, per­sonnes iso­lées) doivent pas­ser par l’Of­fice des étran­gers à Bruxelles. Ils sont là en atten­dant ce que l’a­ve­nir leur réserve. Ils dépendent de la déci­sion qui sera prise de leur don­ner ou pas les papiers pour pou­voir res­ter en Belgique.

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Les dif­fi­cul­tés sont nom­breuses pour enta­mer l’a­te­lier : cer­tains ne com­prennent pas le fran­çais ou l’an­glais, d’autres parlent uni­que­ment pash­tou. Ils viennent de Gui­née, d’Af­gha­nis­tan, d’Al­ba­nie avec des par­cours de vie déjà bien denses…Certains sont très en retrait, par timi­di­té ou manque de confiance. Mais au final, la dyna­mique du groupe per­met de dépas­ser ces obs­tacles et la vidéo devient un lan­gage com­mun qui brise la glace. Cha­cun s’ex­pé­ri­mente à tous les rôles (prises de vues, son, inter­views…). Tous les par­ti­ci­pants s’im­plique plei­ne­ment dans la réa­li­sa­tion du film avec beau­coup d’en­thou­siasme. Notre pré­sence au sein du centre est remar­quée et pro­voque de belles ren­contres et des échanges très intenses.

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Le pre­mier jour, après la ren­contre du groupe et la décou­verte des lieux, on fait connais­sance direc­te­ment par la camé­ra. Cha­cun filme une séquence de 30 secondes, sans enre­gis­trer le son, pour racon­ter ce qu’il veut. Ensuite on visionne les rushs pour des retours col­lec­tifs. Une fois de plus, cette méthode s’a­vère très effi­cace car elle per­met à cha­cun de décou­vrir les autres à tra­vers le regard qu’ils révèlent dans leurs images. Une bonne façon aus­si d’in­tro­duire par la pra­tique, la prise de vue, le cadre et sa com­po­si­tion comme élé­ment de base du lan­gage audio­vi­suel et l’im­por­tance aus­si de la posi­tion de la camé­ra qui exprime un point de vue et une prise de res­pon­sa­bi­li­té quand on choi­sit de fil­mer l’autre… En fin de journée,on ini­tie les jeunes au maté­riel de prise de son et aux tech­niques d’interview.

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A par­tir du deuxième jour, on se plonge direc­te­ment dans le bain et on attaque les tour­nages du film col­lec­tif. Chaque jour, une séance de cui­sine est pla­ni­fiée. Elles sont sys­té­ma­ti­que­ment fil­mées. La jour­née du mar­di est extrê­me­ment dense. Le matin, c’est pré­pa­ra­tion de crêpes et de sablés. Pour l’a­près-midi, les ani­ma­teurs de la MJ de Libra­mont ont ame­né une sono et de quoi se maquiller. Sur place, ils dis­posent aus­si de dégui­se­ments et une fête s’im­pro­vise pour le mar­di gras. Suc­cès total aus­si bien auprès des enfants, des familles que des adultes qui dansent toute l’a­près-midi. Mani­fes­te­ment, cette fête est un évé­ne­ment en tant que tel car c’est très rare d’a­voir une telle ambiance au centre. Ce moment per­met de se faire connaître de tous les rési­dents qui s’ap­pro­prient immé­dia­te­ment la pré­sence des camé­ras. Le soir, j’en­chaine avec un mon­tage de la jour­née sur base des 5h de rushs tour­nées le jour même.

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On peut donc com­men­cer la jour­née du mer­cre­di par une vision de ce petit film inter­mé­diaire avec des retours sur les images, les dia­logues. Ce matin-là, TV Lux, contac­tée par la MJ de Libra­mont vient réa­li­ser un repor­tage sur l’a­te­lier. Voi­là le lien pour le vision­ner : http://www.tvlux.be/video/info/societe/un-stage-video-avec-des-candidats-refugies_20910.html

Les jeunes par­ti­ci­pants conti­nuent les tour­nages, aus­si bien dans la cui­sine que dans les lieux de vie du centre. Alice, Mus­ta­fa et Samiul­lah vont à la ren­contre de deux hommes ira­kiens qui vivent dans une des tentes. Aupa­ra­vant c’é­tait des poli­ciers. Aujourd’­hui ils sont mena­cés et craignent un retour au pays. L’un deux est deve­nu le coif­feur du centre. Il opère dans les couloirs.

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Le soir, je confie une des camé­ras et la perche aux par­ti­ci­pants du centre qui en pro­fitent pour fil­mer dans la rési­dence. L’ex­pé­rience est très concluante. Ils filment ce que per­sonne d’autre qu’eux ne pour­raient fil­mer, dans l’in­ti­mi­té des chambres par exemple, des témoi­gnages des jeunes afghans qui expliquent com­ment ils sont arri­vés jusque là… Et les images sont révé­la­trices de la légi­ti­mi­té qu’ils ont d’être là avec la caméra.Les échanges sont forts et on sent qu’ils se sont véri­ta­ble­ment appro­prié le pro­jet pour dire et mon­trer ce qui les touchent.

Le jeu­di matin, je donne des retours sur les images fil­mées le soir pen­dant que les autres jeunes conti­nuent les tour­nages. Par­mi les moments forts de la jour­née, Tarek, un des jeunes afghans du groupe nous a fait décou­vrir ses talents de chan­teur. Au départ, il ne vou­lait pas être fil­mé quand il chante mais la confiance gran­dis­sant, on a pu enre­gis­trer une chan­son indienne qu’il a vou­lu chan­ter pour nous et autant dire que ça donne des frissons.

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Le ven­dre­di, Bathi, Sam­ba et Mama­dou, les jeunes gui­néens de notre groupe, nous ont cui­si­né un plat de chez eux. L’ac­ti­vi­té s’est impro­vi­sée la veille, ils avaient très envie de nous faire décou­vrir leur cui­sine et puis, dans le centre ils n’ont pas vrai­ment l’oc­ca­sion de retrou­ver les mêmes saveurs. On a fini l’a­te­lier en beau­té avec des ins­tru­ments de musique (Djem­bé et gui­tares). Les moments forts ont été nom­breux et on a sen­ti la frus­tra­tion de la fin alors que le groupe com­men­çait à se connaître mieux.

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En fin de jour­née, on fait un tour de table avec les jeunes pour une éva­lua­tion com­mune. Ils étaient tous très enthou­siastes sur la semaine et sur l’a­te­lier. Ils ont sen­ti une marche de pro­gres­sion dans la mani­pu­la­tion du maté­riel, dans la façon de fil­mer, de mener les inter­views… Ce qui res­sor­tait aus­si c’est qu’ils auraient vou­lu plus de temps pour l’a­te­lier. Les jeunes de Libra­mont ont clai­re­ment expri­mé que leur regard avait chan­gé sur la réa­li­té du centre au fur et à mesure de la semaine et des ren­contres avec les résidents.

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