Le MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception) se crée en avril 1973. Même si en janvier 1975, la loi Veil légalise l’IVG, l’accès à l’avortement est toujours difficile. Le MLAC militait pour que les savoirs pratiques autour du corps des femmes, de leur santé et leur sexualité, soient pensés et maîtrisés par les femmes elles-mêmes. Les femmes apprennent donc à faire elles-mêmes. Le MLAC continuera les avortements et accouchements, même après la loi Veil.
Le film se déroule en deux temps. Un premier moment où l’on découvre les activités des femmes du MLAC autour des accouchements à domicile et des accompagnements à l’avortement.
L’association aidait aussi les femmes lors de permanences pour se rendre en Angleterre ou en Hollande pour avorter et organisait des départs collectifs. Les groupes militants du MLAC s’organisaient en réseaux locaux, plutôt autonomes dans leurs pratiques, dans le respect de la Charte du MLAC. Par exemple, les groupes de Rouen, Bagneux et Gennevilliers revendiquent la pratique d’avortements sans intervention médicale. L’implantation des comités MLAC se faisait surtout dans les villes moyennes et les grandes villes.
La caméra de Yann Le Masson s’attarde sur les visages des femmes qui prennent la parole, se livrent avec confiance autour de leurs histoires, dans la pure tradition du cinéma direct. L’expérience du MLAC ne se limite pas à la connaissance du corps et à ces pratiques d’auto-avortements et d’accouchements. C’est aussi une expérience de vie plus solidaire où les rapports à l’autre sont plus humains car chaque personne à l’écoute de ses désirs (avoir ou non un enfant, choisir son accouchement, décider de sa vie) est aussi capable d’entendre ceux des autres.
Dans un deuxième temps, le film revient sur le procès du 10 mars 1977. Accusées d’avoir pratiqué des avortements, les six femmes du MLAC choisissent la solidarité. Bras dessus bras dessous, elles font front et se défendent collectivement. De nombreuses personnes sont venues les soutenir, ce jour là. Beaucoup de chansons, de slogans « MLAC, MLAC, MLAC, solidarité ! » avant que les six ne s’engouffrent dans la salle d’audience. Cinq seront condamnées à 2 mois d’emprisonnement avec sursis, l’une a une peine d’1 mois avec sursis.
Après le procès, c’est l’heure des remises en question. Arrêter le MLAC ? Continuer ? L’une veut cesser ses activités pour passer plus de temps en famille, aussi sous la pression du mari. L’autre veut continuer. L’une raconte son avortement qui grâce à la présence des femmes du MLAC et leur pratique attentive et généreuse s’est bien passé. Une jeune fille dira avec enthousiasme « Avec mes copines, on va faire un petit MLAC ». Le groupe essaime, sans se poser en modèle, des pratiques militantes fortes, basées sur la solidarité, l’entraide et la bienveillance.
La dernière scène montre une des femmes du MLAC accouchant dans sa chambre, entourée par ses amis, sa famille, dans un climat de fête. A l’écoute les unes des autres, toujours. La femme, dans une grande maîtrise de son corps semble sereine. Elle guette les signes qui s’annoncent. Et de vérifier qu’elle est prête à accoucher, se met en position, pousse avec le mari d’un côté, les copines de l’autre, et même quelques enfants qui regardent bouche bée, comme au spectacle. Puis de tâter elle-même la tête qui sort et sa fille qui l’aide à tirer le bébé hors d’elle. Une naissance qui symboliserait aussi l’autonomie des femmes.
Ce qui frappe avec un décalage de 40 ans reste la solidité du groupe qui s’affranchit du pouvoir médical pour se prendre en main et aider d’autres femmes à le faire.
À l’heure où le droit à l’avortement est encore remis en cause en Espagne, par exemple, l’expérience du MLAC paraît non seulement juste mais très forte.