À Bruxelles, le Cinéma Nova propose à partir du 20 novembre une programmation inédite autour des archives audiovisuelles palestiniennes, depuis la lutte pour leur sauvegarde jusqu’à leur réappropriation par des cinéastes palestiniens contemporains…
Palestinian Archives – Fragments d’une mémoire volée est le titre d’une programmation qui va se déployer sur un mois, traversant plusieurs décennies d’histoire, tout en mettant l’accent sur la préservation des images d’archives face aux politiques coloniales confisquant l’histoire pour mieux effacer la présence du peuple palestinien sur ses terres.
Au cœur de ce projet : les films produits par la Palestine Film Unit, créée en 1968 au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), et qui ont brisé l’image donnée jusqu’alors aux Palestiniens par le cinéma colonial – celle de silhouettes anecdotiques, petits paysans arabes, relégués à l’arrière-plan de paysages grandioses.
Longtemps portés disparus, après avoir été saisis par Israël lors du siège de Beyrouth en 1982, les films de la Palestine Film Unit finiront par resurgir au fil du temps dans différents pays, au gré des liens révolutionnaires tissés à travers le monde. La Cinémathèque de Toulouse conserve actuellement une partie de cette collection. Elle a permis au Nova de sélectionner quelques films, qui seront projetés lors d’un week-end spécial les 12, 13 et 14 décembre, en présence notamment de l’historienne du monde arabe Jihane Sfeir (Université libre de Bruxelles) et de l’historienne et politiste Stéphanie Latte Abdallah (CNRS).
En parallèle, la salle indépendante bruxelloise s’intéressera aux solidarités internationales qui ont valu à la lutte palestinienne d’être épaulée par des cinéastes du monde entier — à l’image du Libanais Jean Chamoun, de l’Allemande Monica Maureur ou du Suédois Per-Åke Holmquist, dont des films sont annoncés. Mohanad Yaqubi, cinéaste et producteur originaire de Ramallah, présentera deux documentaires : R21 aka Restoring Solidarity, qui chemine à travers une collection de films sur la Palestine retrouvée à Tokyo, et Off Frame aka Revolution Until Victory, qui exhume une partie de la production prolifique de la Palestine Film Unit. La réalisatrice Reem Shilleh accompagnera Perpetual Recurrences (An Exercise in Film Programming), dans lequel elle tisse entre eux une vingtaine de films évoquant la Palestine et tournés sur quatre décennies par des réalisateurs allemands, italiens, français ou japonais. Le Nova projettera Israel Palestine on Swedish TV 1958 – 1989, le long et passionnant documentaire de Göran Hugo Olsson, qui retrace 30 ans d’histoire de la région à travers le regard de la télévision suédoise. François Dubuisson, spécialiste en droit international, complètera ce panorama avec une conférence sur la manière dont le conflit israélo-palestinien est représenté à l’écran.
Michel Khleifi, figure centrale du cinéma palestinien de l’après-1982, participera à plusieurs soirées au Nova. Il accompagnera son film Ma’loul fête sa destruction, en compagnie de l’historien israélien Ilan Pappé. Et il introduira L’Olivier : qui sont les Palestiniens ?, l’un des premiers films francophones à avoir donné corps à l’existence du peuple palestinien et à son combat. Serge Le Péron, un des co-réalisateurs du film, rejoindra Michel Khleifi pour en débattre.
Tout au long de ces quatre semaines, un focus sera également consacré au cinéaste Kamal Aljafari, dont les films (A Fidai Film, Port of Memory, Recollection…) explorent les manières de reconstruire la mémoire palestinienne.
Palestinian Archives – Fragments d’une mémoire volée sera aussi l’occasion de découvrir les courts métrages de Mahmoud Al-Haj, qui mêlent archives personnelles, images satellites et captations militaires ; le travail de réappropriation d’archives coloniales mené par le cinéaste libano-greco-palestinien Theo Panagopoulos ; ou encore l’exposition I’m Still Alive de Maisara Baroud, dessinateur originaire de Gaza et désormais réfugié à Marseille.
En marge de ce foisonnant programme d’archéologie visuelle, le Nova consacre également une soirée, le 5 décembre, aux résistances en Israël. Frédérique Devillez y présentera des extraits du film Yerida Should I Stay or Should I Go ? qu’elle est en train de réaliser, Eitan Bronstein y brossera un portrait des groupes qui luttent en Israël contre l’apartheid ou le colonialisme, et le duo Elik Harpaz & Ayah interprétera ses chansons, dont la mémorable Genocide Song.
Palestinian Archives – Fragments d’une mémoire volée : du 20 novembre au 19 décembre 2025 au Cinéma Nova, 3 rue d’Arenberg, 1000 Bruxelles.
Programme complet : www.nova-cinema.org
