Master Class de Claude Bailblé : M le maudit de Fritz Lang

14.10 2017 /
14h au Pianofabriek. Rue du Fort 35, 1060 Bruxelles
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ZIN TV est heu­reux de vous annon­cer un cours de Claude Bail­blé le same­di 14 octobre 2017 de 14h à 18h.

au Pia­no­fa­briek

Rue du Fort 35

1060 Bruxelles

Les places étant limi­tées, nous vous recom­man­dons de vous ins­crire (Nom, pré­nom, mail et gsm) : workshop@zintv.org

Une par­ti­ci­pa­tion aux frais est deman­dée sous la forme d’une dona­tion libre à ZIN TV sur le compte (IBAN) BE67 9794 3467 4987 & Code BIC ARSPBE 22

Mer­ci pour votre ponctualité.

Claude Bail­blé s’appuiera en par­ti­cu­lier sur l’analyse du début de M le Mau­dit (Fritz Lang, 1931) séquence dans laquelle il pointe les méca­nismes pré­cons­cients sus­ci­tés chez le spec­ta­teur et sou­ligne l’importance de la co-construc­tion du film avec son public. 

Ain­si, par exemple, lorsque sonne la cloche de l’école, il met en évi­dence un syl­lo­gisme audi­tif : dans l’appartement où la mère attend sa fille, la cloche s’entend moins forte, ce qui indique que l’école n’est pas si loin, et donc… qu’Elsie sera vite reve­nue à la mai­son. De même, il montre com­ment le bal­lon, en s’immobilisant au même endroit de l’image que l’assiette vide d’Elsie, fait jouer un rac­cord de sub­sti­tu­tion qui indique avec force la mort de la fillette. Il pro­po­se­ra ensuite de voir le début de M, remake de M le Mau­dit réa­li­sé par Joseph Losey, afin de mettre en évi­dence la balance dif­fé­rente entre expli­ca­tions dia­lo­guées (voire sur­jouées) du remake et le carac­tère pré­cons­cient mais pour­tant très effi­cace de la pen­sée ima­geante dans la ver­sion d’origine.

Pour conclure, Claude Bail­blé sou­li­gne­ra cette dif­fi­cul­té inhé­rente à toute créa­tion, à savoir : poser consciem­ment des élé­ments de mise en scène dans le flux nar­ra­tif, élé­ments qui devront cepen­dant res­ter pré­cons­cients pour le spec­ta­teur, afin que celui-ci puisse inten­sé­ment s’impliquer et s’approprier le film, en com­plé­tant et ima­gi­nant bien au-delà de ce qu’il perçoit.

La séance sera éga­le­ment fil­mée dans le cadre de l’é­mis­sion d’u­ni­ver­si­té popu­laire “UZIN, la fabrique des idées”.

Afin de gagner du temps, il est recommandé de visionner le film en avance.

Aller plus loin :

M le Mau­dit : entre­tien avec Fritz Lang & Peter Lorre — 1932

Nou­vel entre­tien avec Fritz Lang (1964)


-1211.jpg Claude Bail­blé : « La Prag­ma­tique des images et des sons » 

L’intervenant, ex-Maître de Confé­rences à l’Université de Paris VIII, et ensei­gnant dans les écoles pro­fes­sion­nelles, est titu­laire d’un doc­to­rat en Sciences de l’Art [“La per­cep­tion et l’attention modi­fiées par le dis­po­si­tif ciné­ma »]. Il pré­pare une publi­ca­tion sur la pen­sée ima­geante appli­quée aux films et col­la­bore à la Revue Documentaires.
Il col­la­bore dès qu’il peut avec ZIN TV


La pen­sée ima­geante (visuelle et audi­tive) est autant à l’œuvre au tour­nage, au mon­tage qu’à la projection…

Claude Bail­blé explique qu’ayant ensei­gné le ciné­ma dans les écoles pro­fes­sion­nelles, il a du adap­ter sa péda­go­gie et sa recherche à la demande des élèves-pra­ti­ciens, très dési­reux de com­prendre les méca­nismes qui sous-tendent la mise en scène des films – méca­nismes sou­vent absents du dis­cours cri­tique comme des savoir-faire ins­tru­men­taux – afin de les appli­quer à leurs propres essais fil­miques. En s’inspirant de la prag­ma­tique du lan­gage – « ce qui est trans­mis va bien au-delà de ce qui est dit ! » – il tente de construire une prag­ma­tique des images – tant visuelles qu’auditives, soit in soit off – qui vien­drait com­plé­ter la par­tie dia­lo­guée des films. Il pro­pose ain­si de réflé­chir sur la pen­sée en images, celle-ci étant un outil fina­le­ment très uti­li­sé par les cinéastes dans (et hors) leurs films. 

L’intervention porte donc sur les concepts prin­ci­paux de la pen­sée imageante :

• Le lieu (décors visuel et sonore), comme champ de pré­vi­sions, comme pré-réglage des pos­si­bi­li­tés et des expec­ta­tions… La mémoire du spec­ta­teur est déjà en acti­vi­té, dans l’attente de ce qui va suivre.

• Les affor­dances des objets –leurs pro­prié­tés pra­tiques– sont éga­le­ment ame­nées au bord de la conscience : assem­blés selon les normes ou bizar­re­ment, leurs regrou­pe­ments « parlent » silencieusement.

• La réso­nance motrice, sys­tème pré­cons­cient de com­pré­hen­sion du corps en mou­ve­ment (les neu­rones-miroirs, cinq vitesses de lec­ture). Le jeu d’acteur est ins­tan­ta­né­ment res­sai­si, en quelque sorte incor­po­ré par le spectateur.

• Les infé­rences de l’action (liées aux mou­ve­ments des corps et à la mise en jeu des objets) élar­gissent le pré­sent en l’insérant dans la chaîne plu­rielle des causes et des consé­quences, avec les inten­tions associées.

• Les états internes des per­son­nages (lisibles sur le visage et audibles dans la voix) appellent à la pro­jec­tion et à la par­ti­ci­pa­tion men­tale du spec­ta­teur, dans le dérou­lé des actions et des émotions.

• L’amorçage (le temps de com­prendre) et la réso­nance (le temps de s’émouvoir) : deux contraintes tem­po­relles en oppo­si­tion… L’amorçage (le choix d’un moment signi­fi­ca­tif) condui­ra au temps nar­ra­tif conden­sé, res­ser­ré, ellip­tique. La réso­nance mène­ra au temps pro­lon­gé et ajus­té des affects.

• La pen­sée ver­bale, avec tous les apports spé­ci­fiques (phrases, mots, répliques), reste cepen­dant « encap­su­lée » dans la pen­sée ima­geante : le dia­logue et ses sous-enten­dus, le texte facial des pro­ta­go­nistes, le contexte et la situa­tion de parole, et sur­tout le ton de la voix, le geste vocal (ce que par­ler veut dire !).

Et sur leur emploi cinématographique :

• Le mon­tage (mul­ti­plexage des amorces) : durée, gros­seur de plan, axe, mou­ve­ments de caméra…

• L’enchaînement des plans : flui­di­té for­melle des rac­cords, impli­ca­tions logiques, connec­teurs dis­cur­sifs au pas­sage des cuts, mais aus­si effa­ce­ment de la mise en scène. Le film semble diri­gé par la conduite des per­son­nages et non par la volon­té ou les inten­tions d’un met­teur en scène.

• L’horizon d’attente : le spec­ta­teur en sait [plus –autant– moins ?] que les per­son­nages : la ten­sion dra­ma­tique entre­tient l’intérêt, le désir de décou­vrir la suite. 

• La dra­ma­tur­gie : balance néces­saire entre pré­vi­sible et impré­vu. Conflits, cli­max et dénoue­ment. La stricte réa­li­sa­tion des infé­rences por­tées par les per­son­nages ins­tal­le­rait l’ennui ; à l’inverse, un dérou­le­ment impré­vi­sible et non orien­té ins­tal­le­rait la confu­sion et l’incompréhension du public.

• Pôles nar­ra­tifs : situa­tion, per­son­nage, sub­jec­tif (une autre inter­pré­ta­tion de l’effet Kou­le­chov). La mul­ti­pli­ca­tion des aspects aug­mente la lisi­bi­li­té de la scène, favo­rise l’identification et l’empathie, donne accès aux états internes des pro­ta­go­nistes (pôle intériorité).


Pour aller plus loin avec Claude Bailblé :

L’histoire du ciné­ma sonore est-elle seule­ment tech­nique ? Une confé­rence de Claude Bailblé

Entendre, écou­ter, agir… 

Sur le documentaire…

Inter­view, repor­tage et documentaire.

[L’imagerie audi­tive
->http://www.zintv.org/L‑imagerie-auditive]

Ciné­ma : figures de la pré­sence, figures de l’absence.

Biblio­gra­phie concer­nant le docu­men­taire, par Claude Bailblé