Projection — Débat / Ni dieu ni maître

21.10 2022 / 19h45 - 22h
Festival des libertés - Théâtre National, Boulevard Emile Jacquemin 111, Bruxelles 1000 Bruxelles -

Avant-pre­mière belge dans le cadre du Fes­ti­val des Liber­tés 2022, sui­vie d’une ren­contre avec Tan­crède Ramo­net, le réalisateur.

L’histoire de l’anarchisme est au cœur du déve­lop­pe­ment de nos socié­tés. Tan­crède Ramo­net nous invite à quatre épi­sodes pour en décou­vrir la pas­sion­nante aven­ture. Nous vous invi­tons à la pre­mière des épi­sodes 3 et 4, qui couvrent la période de 1945 à 2011 : Des Fleurs et des pavés (1945 – 1969) et Les Réseaux de la colère (1965 – 2011). Sor­tis en 2016, les deux épi­sodes pré­cé­dents — La Volup­té de la des­truc­tion (1840 – 1914) et La Mémoire des vain­cus (1911 – 1945) — sont dis­po­nibles gra­tui­te­ment en ligne

FRA • 2022 • 54’ & 54’ • VO/OV st Fr/En

  • Résu­mé de l’épisode 3, Des Fleurs et des pavés (1945 – 1969) :

Au sor­tir de la 2e Guerre Mon­diale, l’anarchisme connaît un gigan­tesque reflux. Quelques grandes per­son­na­li­tés comme Ber­trand Rus­sel ou Albert Camus n’en conti­nuent pas moins de défendre et pro­mou­voir son idéal.

Et petit à petit, dans le cœur de la Guerre Froide, ils sont rejoints par de nom­breux socia­listes ou com­mu­nistes dont les yeux se des­sillent sur la réa­li­té du socia­lisme sovié­tique à la suite du Prin­temps de Prague. A l’instar de Mur­ray Book­chin en effet, à la fin des années 50, de plus en plus de révo­lu­tion­naires se tournent vers l’anarchisme et contri­buent à lui don­ner un nou­vel écho.

Grâce à eux, des orga­ni­sa­tions for­melles ou infor­melles — comme les Dig­gers de San Fran­cis­co — voient le jour ; de nou­veaux sym­boles, à l’image du A cer­clé inven­té en 1964 par le groupe des Jeunes Liber­taires de Paris, sont créés ; de nou­veaux mou­ve­ments de masse se forment qui mettent en cause sta­li­nisme et capi­ta­lisme et essaient de chan­ger le monde.

Et c’est ain­si qu’à par­tir de l’année 1967 puis tout au long de 1968, l’anarchisme que l’on avait cru mori­bond, réoc­cupe le devant de la scène. Il ins­pire le Sum­mer of Love aux États-Unis d’Amérique, il se dif­fuse dans le mou­ve­ment Pro­vos à Amster­dam et il innerve, autour du joli mois de mai, toutes les grandes grèves étu­diantes et ouvrières en France, mais aus­si en Ita­lie, en Alle­magne et jusqu’au Mexique.

Comme un sym­bole de ce triomphe, les anar­chistes se ras­semblent et orga­nisent, pour la pre­mière fois depuis des décen­nies, à Car­rare, un nou­veau Congrès Inter­na­tio­nal. Ils espèrent pro­fi­ter de la situation.

Hélas, ce qui devait être un nou­veau temps fort de l’histoire de l’anarchisme et signer son retour sur le devant de la scène, n’est que le théâtre vaines polé­miques. Divi­sés, les anar­chistes sont donc condam­nés à devoir regar­der pas­ser, sans pou­voir le prendre, le train des ten­ta­tives révo­lu­tion­naires de la fin des années 60.

  • Résu­mé de l’épisode 4, Les Réseaux de la colère (1965 – 2011) :

Comme au temps de la pro­pa­gande par le fait, au début des années 70, l’anarchisme est repris par ses vieux démons. Ten­té, un temps, de retour­ner à la vio­lence armée, il s’inspire de la stra­té­gie mise en place par les Tupa­ma­ros en Uru­guay pour étendre à toutes les grandes métro­poles occi­den­tales une nou­velle forme de lutte armée : la gué­rilla urbaine.

Par­tout, des groupes se forment et passent à l’action : les Angry Bri­gades au Royaume Uni, le Mou­ve­ment du 2 juin en Alle­magne de l’ouest, Action Directe en France, le Wea­ther Under­ground aux États Unis d’Amérique, autant de nom qui font à nou­veau trem­bler le monde. Et avec eux, le nom de l’anarchisme rede­vient syno­nyme de désordre et de chaos.

Il effraie d’autant plus qu’au même moment, le mou­ve­ment punk conquiert la scène inter­na­tio­nale et mène, à sa manière, contre l’industrie musi­cale mais aus­si et plus lar­ge­ment contre l’ordre éta­bli, une véri­table gué­rilla cultu­relle. S’il contri­bue à popu­la­ri­ser auprès d’une nou­velle géné­ra­tion les slo­gans, les sym­boles et même les pra­tiques liber­taires, il subit aus­si de plein fouet la répres­sion géné­ra­li­sée qui s’abat par­tout, au tour­nant des années 80, sur le mou­ve­ment révolutionnaire.

Dès lors, avec la chute du Mur de Ber­lin et le triomphe du néo-libé­ra­lisme, les anar­chistes ne vont plus avoir d’autre choix, que de recou­rir à l’anonymat et avan­cer masqués.

Et c’est ain­si qu’avec l’EZLN et le sous-com­man­dant Mar­cos au Mexique, au cœur du Black bloc qui par­vient à mettre en échec le G7 de Seat­tle en 1999, ou au sein du mou­ve­ment des Indi­gnés qui s’étend de Madrid à New York et de Tel Aviv à Bue­nos Aires, l’anarchisme a ins­pi­ré autour de l’an 2000, sans que l’on ne le sache vrai­ment, toutes les nou­velles formes de résistance.

Mais c’est bien lui qui, des quar­tiers insur­gés d’Athènes au Roja­va et de la ZAD de Notre Dame des Landes au cœur des der­nières grandes mobi­li­sa­tions sociales, incarne aujourd’hui la cri­tique der­nière du capi­ta­lisme et donc, pour tous les pou­voirs, le véri­table ennemi.