Dossier B
Un film de Wilbur Leguebe
Sur un scénario de François Schuiten et Benoît Peeters (1996 — 54′)
Une enquête filmée, à la fois journalistique, historique et policière, sur la “bruxellisation” ou l’autodestruction systématique du patrimoine architectural de Bruxelles. À l’origine, “Le Dossier B” est un livre paru en 1960 (aujourd’hui introuvable) qui raconte l’histoire d’une secte composée d’hommes politiques et d’architectes influents qui projettent de détruire Bruxelles pour édifier une ville utopique où le Palais de Justice démesuré cacherait un parcours initiatique… Conjuguant images d’archives et mises en scène, personnalités réelles et acteurs, photomontages et illustrations, ce film est un voyage entre documentaire et fiction, où l’imaginaire sert à révéler le réel.
12h30 Point Culture Bruxelles
145 Rue Royale
1000 Bruxelles
Tarif : 2€ / 5€ (sandwich & boisson inclus)
Grâce à François Schuiten, Benoît Peeters et Wilbur Leguebe, Le Dossier B, c’est aujourd’hui un film, une incroyable enquête à la fois journalistique, historique et policière. Un éclairage fascinant sur l’histoire de Bruxelles.
De Brüsel au Dossier B
« Tout a commencé voici quelques années. En compagne de la jeune journaliste Claire Devillers, j’avais proposé un portrait télévisuel de François Schuiten et Benoît Peeters. Ces deux auteurs de bandes dessinées venaient alors de publier un album intitulé Brüsel, évoquant librement les saccages urbanistiques infligés à Bruxelles. Peu enthousiastes à l’idée d’une émission-portrait, ils suggèrent plutôt de retourner notre caméra sur la ville, à la fois réelle et imaginaire, où ils vivent et qui les inspire. Bruxelles : un catalogue à peu près exhaustif de ce qu’il ne faut pas faire en matière d’urbanisme. Une encyclopédie, concentrée en une seule ville, de toutes les aberrations que l’on retrouve de manière éparse dans les grandes métropoles. Mais aussi Bruxelles que le chaos et l’enchevêtrement de styles plonge dans une atmosphère fantastique.
Nous avons eu accès à la documentation dont Benoît Peeters et François Schuiten s’étaient inspirés pour inventer leur « Brüsel » : livres historiques, photos, plans, gravures.
Avec leur complicité, nous avons exploré certaines hypothèses contenues dans ces documents. Très vite, de découverte en découverte, la frontière entre réalité et fiction s’est estompée.
Nous avons été confrontés à une hypothèse audacieuse qui expliquerait les événements survenus depuis plus d’un siècle, celle d’une cité parallèle, utopique, une ville-miroir qu’aurait ardemment recherché une secte composée de politiciens et des architectes les plus influents. Bruxelles, chantier perpétuel pour des promoteurs fous ? Bruxelles, chantier imaginaire pour des créateurs illuminés ? « Brüsel », une belle utopie collective qui aurait mal tourné ?
Nos repérages ont été ponctués de rencontres et d’événements troublants. Nous avons découvert des lieux insoupçonnés, fait la connaissance de personnalités qui, à chaque fois, nous menaient vers des pistes nouvelles. Un explorateur solitaire a mis au jour un réseau de quarante kilomètres souterrains dans le sous-sol bruxellois. Une historienne d’art étudie le Palais de Justice, un monument délirant construit au siècle dernier, dont les plans cacheraient un itinéraire initiatique. Un physicien raconte comment la science actuelle pourrait mener à des univers parallèles. Un cambriolage aux Archives d’Architecture, survenu pendant notre travail de prospection, reste aujourd’hui encore, inexpliqué. Bref, cette hypothèse de ville parallèle a trouvé un écho dans la réalité bruxelloise, elle porte un éclairage nouveau sur la ville, à la fois fonctionnelle et chaotique, raisonnable et folle, ouvrant à sa propre décomposition.
Réalité ou fantastique ? En fin de compte, quelle est la plus incroyable de ces deux visions, celle d’un univers fantasmagorique imaginé par une société secrète, ou l’histoire vraie d’une ville défigurée par un siècle de transformations anarchiques ?
Le Dossier B ne prétend pas asséner une vérité. Il présente une hypothèse pour le moins intrigante, à laquelle le spectateur est libre d’adhérer ou non. L’imaginaire sert de révélateur au réel. Le Dossier B, composé de fragments et de citations (photos, actualités télévisées, film de famille, vieux film expérimental.) trouble les pistes entre le documentaire et la fiction, explore les limites de la vraisemblance télévisuelle. La forme peut paraître ludique, les enjeux n’en sont pas moins réels : quelle sera l’image de la ville de demain ? »
Wilbur Leguebe