Le projet ? Un film, une caméra, un micro… des liens invisibles de cette forte amitié dont l’objectif est de faire surgir les mots et la pensée d’Aurélien. Comment se voit-il ? Se pense-t-il ? Se vit- il ?
Dans la campagne au milieu du spectacle répétitif des éoliennes ou au milieu de la foule compacte des ruelles de la ville de Pampelune, dans une ambiance sonore assourdissante, Aurélien est toujours seul face à sa souffrance, face à sa difficulté à transmettre sa pensée. Dans un état de tension palpable et de ressassement permanent, la caméra de son ami saisit les mots, les bribes de pensée qui surgissent çà et là. « Il est la bouche et moi l’oreille » dit le réalisateur. Un bel équilibre dans ce déséquilibre permanent.
En proie à cette grande instabilité dans sa tête, Aurélien fait littéralement corps avec son environnement. Une main contre un arbre, en appui contre un mur, un banc… sont autant de points d’appui pour se recentrer, se restabiliser, loin du rugissement des tambours et des taureaux excités par une foule en délire.
Mais alors, comment trouver les moyens de transmettre, dans ce bouillonnement intérieur difficilement contrôlable, aux gens qu’il nomme « structurés » qu’une simple douleur au pied devient, pour un autiste, une douleur intense qui est susceptible de l’anéantir intégralement ? Qu’un doigt tendu vers le ciel désigne autre chose qu’une main montrée, qu’il y a lien symbolique ? Qu’un excès de détails dans sa communication risque à tout moment de l’exclure du groupe ? Et de citer un exemple : « Vous êtes à Paris depuis dix ans ? Non depuis neuf ans et onze mois ». Un autiste ne supporte pas les approximations car la stabilité du monde est en question pour lui. Le « dire mieux » prime sur « le dire avec ». D’où une répétition du même schéma de ratage dans les relations avec les autres, stupéfaits devant cette exigence de précisions. Pour Aurélien, les névrosés meurent du non-dit, les autistes du trop dit. D’où cette tension permanente à essayer de rejoindre « l’autre rive », celle des « structurés » ayant intégré de façon implicite les codes sociaux.
Sa douleur, cette incapacité à faire surgir la parole au moment voulu et dans un langage compréhensible, cette difficulté à saisir les codes implicites et symboliques du corps social sont les motifs de colère d’Aurélien. Mais sa colère est autant orientée sur lui-même que sur la société qui lui impose des carcans. « L’autisme n’est pas une pathologie, mais un type de fonctionnement différent ». « Ca frotte, ça ripe de partout mais il faut composer avec » assène-t-il.
Le projet ? Un film, une caméra, un micro… des liens invisibles de cette forte amitié dont l’objectif est de faire surgir les mots et la pensée d’Aurélien. Comment se voit-il ? Se pense-t-il ? Se vit- il ?
Dans la campagne au milieu du spectacle répétitif des éoliennes ou au milieu de la foule compacte des ruelles de la ville de Pampelune, dans une ambiance sonore assourdissante, Aurélien est toujours seul face à sa souffrance, face à sa difficulté à transmettre sa pensée. Dans un état de tension palpable et de ressassement permanent, la caméra de son ami saisit les mots, les bribes de pensée qui surgissent çà et là. « Il est la bouche et moi l’oreille » dit le réalisateur. Un bel équilibre dans ce déséquilibre permanent.
En proie à cette grande instabilité dans sa tête, Aurélien fait littéralement corps avec son environnement. Une main contre un arbre, en appui contre un mur, un banc… sont autant de points d’appui pour se recentrer, se restabiliser, loin du rugissement des tambours et des taureaux excités par une foule en délire.
Sa douleur, cette incapacité à faire surgir la parole au moment voulu et dans un langage compréhensible, cette difficulté à saisir les codes implicites et symboliques du corps social sont les motifs de colère d’Aurélien. Mais sa colère est autant orientée sur lui-même que sur la société qui lui impose des carcans. « L’autisme n’est pas une pathologie, mais un type de fonctionnement différent ». « Ca frotte, ça ripe de partout mais il faut composer avec » assène-t-il.
Personnage au regard malicieux et attachant, mais aussi très volubile et tourmenté. Il nous laisse, à la fin du film, légèrement vampirisé tant sa présence crève l’écran et que les cheminements de sa pensée sont escarpés. Loin de tout cinéma institutionnel, « Quelle folie » n’est pas un film didactique ou institutionnel sur l’autisme. C’est le témoignage d’Aurélien, homme coupé de ses semblables, atteint d’autisme, mais qui est partie prenante du film et participe pleinement à son élaboration. Et le spectateur, à l’instar d’Aurélien, n’est pas passif, emporté qu’il est dans un tangage émotionnel par moment épuisant mais tellement riche.
En partageant cette introspection si lucide, Aurélien nous offre un cadeau inestimable, une expérience saisissante, celle d’autres rapports au monde et à soi. Cette profonde altérité qui nous pousse à interroger notre prétendue normalité, sur un type de fonctionnement différent.
« Quelle folie », telle est l’expression qui scande son discours et qui nous collera à la peau pour longtemps.
Manu Bollen
Quelle folie (Diego Governatori)
Projection le Jeudi 13 février 2020 à 20h
dans le cadre des 12e Rencontres Images Mentales (du 6 au 14 février.2020).
La Vénerie — Espace Delvaux
3 rue Gratès
1170 Bruxelles (Watermael-Boitsfort)