Protestparade
14h Gare du nord — 1030 Bruxelles
Luttez pour une société basée sur la solidarité et une répartition équitable de la richesse. Participez et exprimez d’une manière créatrice votre mécontentement du démantèlement social. Apportez aussi votre instrument de musique.
Pour information et inspiration : ptb.be/protestparade
Le PTB lance sa campagne #assez et appelle à une nouvelle ProtestParade
Le gouvernement a profité des vacances d’été pour faire passer son tax shift (glissement fiscal) antisocial. A l’occasion de ManiFiesta, le PTB a lancé sa nouvelle campagne d’automne « Il y en a assez pour tout monde ». Une invitation à participer à la résistance et à proposer des alternatives. Dans cette interview à Solidaire, Peter Mertens, le président du PTB, revient sur ce faux tax shift et sur cette nouvelle campagne.
Cela fait maintenant un an que le gouvernement Michel-De Wever est en exercice. Comment évaluez-vous la politique de ce gouvernement ?
Peter Mertens. Ce gouvernement ne fait en fait rien d’autre que ce qui est fait dans le reste de l’Europe. Seulement, chez nous, c’est emballé dans un discours très à droite, et il est clair que le gouvernement n’en est encore qu’au début du démantèlement de la sécurité sociale. Lorsque les dirigeants du gouvernement affirment : « Ils sont des centaines de milliers derrière nous », il est clair qu’ils ne parlent pas des gens, mais bien des millions du lobby des banques, du lobby nucléaire et du lobby du diamant. C’est le vrai visage derrière le masque de ce gouvernement.
A la fin de l’an dernier, la force de la résistance sociale a un moment fait vaciller le gouvernement.
Peter Mertens. C’est exact, et la grande question pour cet automne sera : le mouvement populaire est-il en état de le faire vaciller une nouvelle fois ? Après la vague d’actions de l’an dernier, le gouvernement s’est effectivement retrouvé en difficulté. Le calme est ensuite revenu lorsque que le CD&V a promis d’instaurer un sérieux tax shift. Normalement, il s’agit d’un glissement de la pression fiscale sur les travailleurs vers les riches et les grosses fortunes. Mais tout le monde sait que ce n’est pas ce qui s’est passé.
De ces 3,7 milliards de tax shift, 54% sont directement portés par les augmentations de TVA et de taxes. Et à peine 8% par une taxe sur la spéculation. Il n’y a absolument aucun tax shift, la pression des impôts sur les travailleurs a tout simplement été augmentée.
Il n’y a absolument aucun tax shift, la pression des impôts sur les travailleurs a tout simplement été augmentée.
Comment ce mouvement de protestation a‑t-il pu mettre le gouvernement autant sous pression ?
Peter Mertens. Le mouvement de protestation a simplement disposé de plusieurs atouts forts. Le plus fort d’entre eux, c’était l’énorme unité : entre les deux grands syndicats, entre le Nord et le Sud du pays, entre les différents secteurs. Le mouvement était en outre également composé d’initiatives citoyennes comme Hart boven Hard, du mouvement pour le climat, du mouvement étudiant… Ils ont fortement élargi la base et ouvert le mouvement vers d’autres thèmes, comme l’enseignement, la diversité et le climat.
La résistance sociale a réussi à amener dans la rue des gens très divers, tant à la grande manifestation de 120 000 personnes, le 6 novembre, qu’à la Grande Parade, le 29 mars, alors même qu’il pleuvait à verse.
Tous ces points forts de la résistance sociale, on espère qu’ils seront à nouveau présents si une nouvelle vague de protestation s’organise contre les nouvelles mesures. Ce dont nous parlons, c’est de la mise sur pied d’un contre-pouvoir.
Même si c’est bien sûr difficile, car nous luttons contre un adversaire qui dispose de bien plus d’argent, de bien plus de groupes de médias et, au bout du compte, du pouvoir.
Et c’est un adversaire qui va dans le même sens que la vague qui déferle sur toute l’Europe.
Peter Mertens. Dans toute l’Europe, l’élite veut faire en sorte que les gens adhèrent à son idée – fausse – qu’il faut démanteler la protection sociale pour augmenter la compétitivité et relancer l’économie. Depuis la crise de Lehman Brothers en 2008, cela fait sept ans que l’on fait des économies de manière obsessionnelle, et l’économie ne redémarre absolument pas.
La seule chose qui se passe, c’est que l’austérité continue un transfert gigantesque des travailleurs vers le monde du capital, un transfert depuis les gens qui travaillent et transpirent pour vivre vers ceux qui vivent de leurs rentes. C’est ce qui se passe déjà depuis sept ans en Europe et aux Etats-Unis.
L’an dernier, le PTB a aussi vu ses premiers députés entrer dans les Parlements. Quel a été le rôle du parti dans cette résistance sociale ?
Peter Mertens. Le PTB a la construction d’un contre-pouvoir, une force d’opposition, dans son ADN. Je l’ai très fortement constaté durant les journées d’action de l’automne chaud de 2014. Beaucoup de gens du PTB sont actifs dans un syndicat, dans le mouvement citoyen. Les membres du PTB sont très conscients du fait que tous les droits sociaux dans notre pays – comme les congés payés, la journée de huit heures, le droit de vote, la sécurité sociale… – ont été arrachés par des actions de masse. Ils sont donc de toute façon prêts à construire une force d’opposition. Ils apportent de la soupe aux piquets, les médecins de Médecine pour le Peuple sont à l’écoute, les journalistes de Solidaire montrent l’autre côté de l’info… Notre parti est construit sur cela. Nous avons donc essayé de renforcer ce mouvement, et je pense que c’est apprécié.
Ce qui est bien sûr nouveau, c’est que nous sommes un mégaphone pour le mouvement au Parlement. Des personnes des syndicats et du mouvement citoyen s’adressent à nous pour intervenir au Parlement ou pour faire passer de l’information qui, autrement, resterait derrière des portes closes.
Le fait que Raoul Hedebouw et Marco Van Hees soient maintenant députés fédéraux PTB est important pour nous, en tant que parti, pour être plus visibles. Les grands médias ont pour règle que l’on n’existe en tant que parti que lorsque celui-ci est représenté au Parlement. Une règle très étrange, certainement lorsqu’elle vient s’ajouter au gigantesque seuil électoral qui n’existe pas dans la plupart des pays. Je veux une fois de plus rappeler qu’avec, par exemple, le système électoral néerlandais, nous aurions eu six à huit sièges au Parlement fédéral.
A ManiFiesta, le PTB lance sa campagne d’automne « Il y en a assez pour tout monde ». Pouvez-vous résumer de quoi il s’agit ?
Peter Mertens. L’an passé, nous avons lancé la campagne #larésistancesociale, avec le cactus symbolisant le « Pas touche à notre protection sociale ». Cela a été un automne de résistance pour repousser les attaques du gouvernement. Maintenant, nous devons aller une étape plus loin : non pas seulement contribuer à renforcer la résistance sociale, mais aussi proposer des solutions. A l’encontre du disque usé des dirigeants qui répètent que « tout le monde doit se restreindre », nous, nous disons très fermement : « Il y en a assez pour tout le monde ».
Dans quels domaines y en a‑t-il assez pour tout le monde ?
Peter Mertens. La première signification est bien sûr fiscale : il faut organiser la fiscalité d’une manière équitable. Non à cet actuel tax shift, vive la taxe des millionnaires. Cette revendication persiste plus que jamais, car il y a suffisamment de richesse dans notre pays pour donner une juste partie du gâteau à ceux qui produisent cette richesse – les travailleurs.
On peut alors faire en sorte que les gens aient une pension décente et qu’on ne les oblige pas à travailler encore plus longtemps. On peut alors aussi faire en sorte que la plus grande pauvreté disparaisse de ce pays. Qu’il n’y ait plus d’enfant qui doive aller à l’école avec une boîte à tartines vide. Et alors, on peut également investir dans un renouveau social et écologique. C’est pourquoi cette taxe des millionnaires est tellement nécessaire.
Une deuxième revendication importante est qu’il y ait aussi assez de travail pour donner à chacun un emploi stable. La deuxième révolution technologique, celle du numérique, que nous connaissons maintenant coûte en effet énormément d’emplois. Si nous n’organisons pas le travail de manière radicalement différente et que nous ne le redistribuons pas, nous chassons des masses de jeunes de la société. La solution à cela, c’est : redistribuer le travail existant. Il y a cent ans était instaurée la journée de travail de 8 heures. Nous voulons mettre le débat sur la semaine de 30 heures à l’agenda.
Troisièmement. Lorsque nous disons qu’ « il y en a assez pour tout le monde », nous parlons bien évidemment aussi de la planète. Nous sommes la dernière génération à pouvoir encore entreprendre quelque chose pour que la température moyenne mondiale n’augmente pas au-dessus des deux degrés Celsius. Ce dont nous avons besoin au sommet sur le climat à Paris, ce ne sont pas des engagements à faire des efforts, mais de vrais accords sur la réduction des émissions.
le 15 novembre, nous ferons, comme l’an dernier, une parade. Une parade « Il y en a assez pour tout le monde ».
Quels sont les prochains rendez-vous importants pour cette campagne d’automne ?
Peter Mertens. Le premier est le 28 septembre, date à laquelle Hart boven Hard présentera sa Déclaration de septembre alternative, un an après la création de cet impressionnant mouvement citoyen. Nous soutenons cette initiative.
Le deuxième est la grande manifestation syndicale, le 7 octobre. Nous soutenons la mobilisation des syndicats et de Hart boven Hard-Tout Autre Chose pour donner à nouveau un signal fort un an après la prestation de serment de ce gouvernement de droite et d’austérité.
Et, le 15 novembre, nous ferons, comme l’an dernier, une parade. Une parade « Il y en a assez pour tout le monde ».
En tant que parti politique, pourquoi descendre à nouveau dans la rue ?
Peter Mertens. Pour nous, c’est un signal pour souligner que le mouvement ne s’arrête pas après la manifestation du 7 octobre. L’an passé, avec notre Protestparade du 19 octobre, nous avons contribué à lancer la protestation contre le gouvernement. Aujourd’hui, nous voulons donner une perspective après la grande manifestation.
Le PTB lance immédiatement une deuxième campagne à ManiFiesta. Cette fois, elle concerne le climat, à la veille du sommet sur le climat qui se tiendra à Paris en décembre. La campagne est intitulée « Red is the new green », le rouge est le nouveau vert. N’est-ce pas quelque peu provocant ?
Peter Mertens. C’est un titre qui provoque le débat, ce qui est nécessaire. Aujourd’hui, personne ne peut plus nier la problématique du climat. Nous assistons déjà maintenant à des inondations et à des sécheresses sans précédent, à des tempêtes et ouragans bien plus terribles et à des hivers plus rigoureux. Si nous dépassons cette limite des deux degrés de température, ce sera encore bien plus grave. Cela mènera à des catastrophes et à des exodes massifs de nouveaux réfugiés qui fuiront ces inondations et ces sécheresses. Maintenant, nous pouvons encore y faire quelque chose.
Pour pouvoir donner un avenir à ce rouge-gorge, nous devons oser aborder la question d’un changement de système.
Aujourd’hui, il ne s’agit pas de jeter quelques gouttes d’eau pour éteindre un incendie, mais de changer la manière de produire pour qu’elle devienne propre et neutre en CO2. C’est un objectif ambitieux qui exige des interventions macro-économiques, comme la socialisation de la production de l’énergie et une manière plus rationnelle de gérer l’agriculture et la distribution alimentaire. C’est pourquoi nous disons : pour défendre un avenir vert, il faut aussi un autre système économique. C’est le message derrière « Red is the new green ». Nous avons couplé cela à un message positif : « Change the system to save the planet », changer le système pour sauver la planète.
Le symbole de la campagne est un rouge-gorge…
PeterMertens. Le rouge-gorge est un petit oiseau au plastron rouge : il a le cœur à la bonne place, avec la bonne couleur et il est très populaire. Pour pouvoir donner un avenir à ce rouge-gorge, nous devons oser aborder la question d’un changement de système. Et, par là, nous contribuons à notre manière à la discussion qui précède le sommet climatique de Paris.
A propos de réfugiés : à en croire des politiciens comme la présidente de l’Open Vld Gwendolyn Rutten, la ministre N‑VA Liesbeth Homans et le président de la N‑VA Bart De Wever, ceux-ci constitueraient une menace pour la sécurité sociale.
Peter Mertens. (Agacé) Le gouvernement le dit lui-même : si nous accordons le revenu d’intégration aux réfugiés qui rentrent dans les critères de ce statut, cela va coûter 120 millions d’euros. Cela, c’est sur un budget total de la sécurité sociale de 80 milliards. Or il faut savoir que le gouvernement a lui-même déjà enlevé, rien que cet été, deux milliards d’euros de la caisse de la sécurité sociale en réduisant les charges patronales. Cela me dérange terriblement que ce gouvernement, qui est en train de saper et évider la sécurité sociale, prétende que des gens qui fuient la guerre et la misère constituent la plus grande menace pour la sécurité sociale. C’est rejeter la responsabilité sur les gens qui sont les plus vulnérables.
La sécurité sociale n’est pas pillée par les réfugiés, mais par ce gouvernement, il faut que ce soit très clair.
La sécurité sociale n’est pas pillée par les réfugiés, mais par ce gouvernement, il faut que ce soit très clair. Je comprends la peur des gens qui ont déjà des difficultés dans notre société et sont sur une liste d’attente pour un logement social. Actuellement à Anvers, déjà un enfant sur quatre grandit dans la pauvreté. Mais nous devons pouvoir offrir un avenir en éliminant la pauvreté de notre pays – cela coûte 1,5 milliard, ce qui est tout à fait faisable – et, en même temps, endosser notre devoir envers les réfugiés dans le cadre de la Convention de Genève. Nous devons absolument combiner les deux.
Et ne vous y trompez pas : ceux qui aujourd’hui clament haut et fort que c’est l’un OU l’autre, ne veulent en fait NI l’un NI l’autre. Il est totalement faux de croire qu’ils refusent d’octroyer leurs droits aux réfugiés pour ensuite résoudre le problème des logements sociaux.
Quand on commence à déshumaniser l’autre, on crée une société à deux vitesses. Et, ce qui aujourd’hui peut être appliqué aux réfugiés, comme des statuts spéciaux, sera dans cinq ans utilisé contre les gens qui d’une manière ou d’une autre se retrouvent exclus du système dans notre pays. Et ça, vous pouvez être absolument certain de ce que je dis, haut et fort, aujourd’hui, le 8 septembre 2015.
On ne peut évidemment pas considérer le problème des réfugiés indépendamment de la question de la guerre.
Peter Mertens. En 2011, le PTB était le seul parti qui était contre l’intervention en Libye. J’avais alors écrit une carte blanche dans De Standaard où j’expliquais que l’intervention mènerait à la déstabilisation de la région, et à l’essor de tous les djihadistes-salafistes. Jamais nulle part, une intervention militaire de l’Otan n’a encore amélioré la situation. Au bout du compte, notre position s’est avérée juste : cette intervention a contribué à déstabiliser toute une région.
Si on fait le bilan de toutes ces guerres d’intervention en Afghanistan, en Irak, en Libye, et qu’on pose la question : avons-nous stabilisé ou déstabilisé la situation ? La réponse est claire comme de l’eau de source : déstabilisé. Et cela a causé des afflux massifs de réfugiés.
Nous voulons évidemment un accueil humain pour les réfugiés, mais il faut aussi une fin à la politique de guerre interventionniste qui ne fait que grossir la vague des gens qui fuient.
L’Otan vient mettre le feu, et ensuite les détenteurs du pouvoir utilisent la crise des réfugiés pour s’attaquer aux acquis sociaux de toute la classe des travailleurs. Et ils utilisent les réfugiés pour rejeter sur eux la responsabilité de la casse sociale. Tous les jours, les journaux ne parlent que des réfugiés, afin que tout le monde prenne peur et que personne ne pense encore aux mesures d’austérité et à l’augmentation du prix de l’électricité. Nous ne devons pas subir cette volonté des plus puissants de manière résignée. Nous ne devons pas les laisser nous monter les uns contre les autres. Ensemble, nous pouvons agir et apporter du changement.