« Si je ne suis pas ici citoyen du monde, je ne le serais nulle part ailleurs ». JVK
Infos pratiques :
Festival Millenium : http://www.festivalmillenium.org/
De 10h à 18h. Attention ! Le Séminaire aura lieu dans deux endroits différents, le CIVA et le Vendôme.
CIVA — Centre International pour la Ville, l’Architecture et le Paysage : Rue de l’Ermitage, 55 à 1050 Bruxelles.
Cinéma Vendôme : 18 chaussée de Wavre à 1050 Bruxelles (Porte de Namur)
Le 6 juin au CIVA
Le 7 juin au Cinéma Vendôme (salle 5)
Le 8 juin au CIVA
Inscription pour les trois jours : 15€ (attention, les places sont limitées)
Versement à effectuer sur le compte de ZIN TV ASBL
à la Banque Argenta : BE67 9794 3467 4987
En communication “la pensée en images et en sons” + Prénom et Nom.
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Dans le cadre du Festival Millenium se tiendra un séminaire qui sera donné par Thierry Odeyn, cinéaste et professeur à l’INSAS. Celui-ci va parcourir durant trois jours, une partie de l’œuvre cinématographique de Johan van der Keuken (1938 — 2001). Les films de ce cinéaste et photographe néerlandais témoignent d’un désir de renouvellement des formes dans le langage documentaire. Cette démarche remet principalement en cause la représentation codée puisqu’il n’y a jamais eu de “réalité” sur l’écran : le film est le résultat d’un travail d’interprétation qui est donc par nature fictionnel. Le travail politique du cinéma ne consiste pas seulement en l’apport d’un contenu, mais est surtout un espace de fabrication de formes lié à ce contenu afin de redéfinir un rapport au spectateur. Johan Van Der Keuken disait : « Il y a le débat sur la pertinence à utiliser les moyens d’écriture du cinéma à des fins politiques. Certains cinéastes qui sont dans une position de lutte disent que ce n’est pas leurs soucis de définir les moyens du langage ; or moi je dis qu’il faut attaquer le langage lui-même en mettant justement ce langage prédéterminé hors d’état de fonctionner. »
C’est ainsi que Johan van der Keuken définissait sa démarche cinématographique, qu’il essayait d’amener toujours plus loin… Dans son film “Vers le Sud” il part physiquement ailleurs chercher son sujet et plus tard dans “Amsterdam Global Village”, c’est l’ailleurs qui est ici [sa ville] qu’il filmera. « Là-bas j’étais surtout le voyageur qui essaie honnêtement d’avoir présent à l’esprit ce qui unit les hommes au-delà de toutes leurs différences, alors qu’ici, en pénétrant dans un quartier moins connu peuplé de visages étrangers, j’ai brusquement été gagné par un sentiment de déracinement. Et j’ai su qu’il me fallait précisément filmer à Amsterdam, ce monde qui tourne en une ronde folle, pour essayer de transposer, ici précisément, l’inconnu dans le familier. En effet, si je ne suis pas ici un citoyen du monde, je ne le serai nulle part ailleurs. »
Thierry Odeyn – qui prolonge sa fonction pédagogique à l’INSAS et l’IHECS – a formé plusieurs générations de jeunes cinéastes auxquels – réalisateur de documentaires – il a inculqué le désir de témoigner du monde. Théoricien engagé du cinéma, il insiste dès lors sur l’exigence du regard et l’importance politique de l’acte de filmer. Dans un soucis de progression et de réflexion sur sa propre démarche et ses pratiques, Zin TV et le Festival Millenium proposent de donner à entendre l’analyse pertinente de Thierry Odeyn.
ZIN TV est un projet de pédagogie audiovisuelle au service des citoyens engagés dans le tissu associatif. Nos formations initient le participant au reportage social, au cinéma documentaire et à la fiction. Elles cherchent à libérer le langage audiovisuel des formatages télévisuels, institutionnels ou commerciaux. Les ateliers sont conçus comme un espace de libération des formes et du langage cinéma.
ZIN TV est aussi un média associatif regroupant des cinéastes, des professionnels de l’audiovisuel, des artistes engagés et des citoyens actifs dans la construction d’un projet commun : un modèle de communication de participation citoyenne.
Johan van der Keuken :
« En 1963 à l’IDHEC, une idée régnait alors, idée dont j’ai beaucoup souffert quand j’étais à l’école de cinéma, c’est la notion de grammaire normative. On ne pouvait concevoir de langage cinématographique en dehors d’un système organisé et rigide de règles précises qui nous dictaient ce qu’on devait faire et ce qu’on ne pouvait pas faire en cinéma. (…) C’est par exemple le fait que toute la grammaire du cinéma de fiction repose sur le champ/contrechamp, ou sur la confrontation par le montage parallèle de deux angles de prise de vue ou de deux regards qui constitue l’espace supposé de la fiction. Et tout le langage du cinéma de fiction est braqué sur la crédibilité de cet espace. (…) Mais je crois qu’une grande partie du cinéma documentaire, du cinéma expérimental et du cinéma révolutionnaire — Vertov par exemple – est déjà passé à côté de cette crédibilité pour essayer autre chose, pour découvrir des éléments d’autres “langages”.
Et de toute façon un autre lieu s’installe dès qu’on vise la crédibilité de l’image, c’est pour dépasser l’image et établir un dialogue avec la conscience du spectateur. (…) Je crois que cette idée – la recherche de la crédibilité – a été en grande mesure remplacée par la notion de confrontation avec le réel, avec n’importe quel réel, afin d’en extraire un moment qui serait senti comme réel. C’est, je crois, un processus propre à tout l’art moderne où on ne reproduit plus une chose existante, dans la tête ou sur un croquis, qu’on va ensuite mettre en peinture ou en musique, mais où existe l’échange avec le hasard, avec l’intuition et aussi “volonté” de la matière. Toutes ces forces vont imposer au départ du projet une direction, des sentiments. Et peut-être, à la fin du processus, produit-on quelque chose qui est réel, mais au premier abord, le réel n’est pas une chose inscrite, circonscrite, une chose dont on peut déjà dire des choses définitivement. (…) Ces choses ne se passent pas seulement sur un plan intellectuel, mais elles se situent au niveau même de la matière. On instaure un dialogue avec la matière qu’on a sous la main ».
Johan van der Keuken.
Extrait : page 10 et 11 de « Johan van der Keuken, cinéaste et photographe ». Ouvrage Collectif sous la direction de Serge Meurant, édité par le Ministère de la Communauté française, Service de l’audiovisuel, Réseau d’action culturelle-cinéma R.A.C.C. 1983