Les policiers ne veulent plus être filmés
Agence Belga, le mardi 26 août 2014
Deux agents de la police brugeoise ont porté plainte car leur intervention lors d’une rixe en terrasse a été filmée et diffusée sur internet, rapportent Het Laatste Nieuws et Het Nieuwsblad mardi. Le chef de corps de Bruges soutient le duo. Même Catherine De Bolle, la patronne de la police fédérale, dit comprendre l’agacement de ses hommes. La plainte a été introduite après que des agents ont été filmés lors d’une banale intervention. La séquence a ensuite été diffusée sur internet. Selon une circulaire, les policiers peuvent être photographiés et filmés, notamment dans le cas d’une collecte de preuves. Toutefois, la commission sur la vie privée indique qu’il subsiste un problème lorsque ces images sont diffusées.
Le chef de corps brugeois a annoncé qu’il se portait partie civile. “Je pense que tout le monde se rend bien compte que cela ne va pas”, explique-t-il au Laatste Nieuws. Il dénonce le “deux poids, deux mesures” en vigueur. “Plusieurs zones ont essayé de filmer leurs interventions avec des bodycams, des petites caméras placées sur la poitrine du policier. La commission sur la vie privée s’y est opposé. Si les policiers ne peuvent pas filmer des citoyens, pourquoi l’inverse ne pose-t-il pas problème?”
Source de l’article : La Libre
Le smartphone, souvent bien utile contre une bavure
La nouvelle se retrouve sur tous les sites de presse : deux agents de police brugeois, soutenus par leur chef de corps, ont porté plainte car leur intervention s’est retrouvée sur internet. La séquence diffusée sur internet sert aujourd’hui de base aux policiers pour exiger une interdiction d’être filmés par des citoyens. Les images ne leur étaient pourtant pas spécialement défavorables. Elles illustraient surtout les insultes racistes proférées par un client d’un café et moins l’intervention policière.
Par Axel Bernard, Avocat & Conseiller communal à Schaerbeek (PTB)
Que ce serait-il passé si le coup de pied reçu par Niki n’avait pas été filmé par un smartphone ?
Le droit de filmer l’action policière doit être défendu. Que ce serait-il en effet passé si les coups, particulièrement choquants reçus par Niki, cette manifestante grecque arrêtée à Bruxelles en octobre 2011, n’avaient pas été filmés par un smartphone ? Celle qui s’est retrouvée menottée, immobilisée et qui a reçu un coup de pied en pleine figure (à revoir ici), puis des coups par un policier en civil (à revoir ici) n’aurait probablement jamais pu faire valoir ses droits. Jamais il n’y aurait eu de déclarations du porte-parole de la zone de police de Bruxelles-Nord, Roland Thiébault, considérant les faits comme « inadmissibles » et des « choses pas tolérables pour la zone de police ». Jamais il n’y aurait eu d’enquête judiciaire ni poursuites judicaires. Comme le dit Niki dans une interview à RTL (à revoir ici), grâce aux images vidéos, « tout le monde a pu être au courant des faits. Mais je sais qu’il y a beaucoup d’autres cas de personnes ici en Belgique qui sont frappés par la police et on n’en parle pas. »
Un nombre très important de plaintes contre les services de police est classé sans suites. Et une des principales causes réside dans la difficulté pour la victime de prouver les faits. Ce sera souvent sa parole contre celle d’un policier, qui bénéficiera de la solidarité « de corps » et des témoignages de ses collègues ainsi que d’une particulière clémence des juges (en raison du simple fait qu’un juge a besoin du policier et que sans l’enquête policière, il n’est rien).
Le Smartphone, la vidéo « citoyenne »
En pratique, la vidéo « citoyenne », le smartphone, le gsm pouvant être activé par n’importe quel passant, par n’importe quel « témoin », permet de rétablir un certain équilibre dans l’égalité des armes entre la victime citoyenne et son agresseur policier. C’est grâce à la caméra d’un voisin que les brutalités commises en août 2012 par des policiers bruxellois ont pu être rendues publiques (à revoir ici). C’est une nouvelle fois un smartphone d’un passant qui a permis de prouver les violences d’un policier bruxellois sur deux jeunes (à revoir ici). Suite à cette dernière affaire et en raison de ses antécédents, le policier délinquant a été suspendu de ses fonctions et ferait l’objet d’une enquête disciplinaire et de poursuites pénales. Plus loin de nous, c’est encore grâce au smartphone que la vérité peut être établie sur le meurtre de l’afro-américain Kajieme Powell, vingt-cinq ans, tué de douze balles dans le corps par la police de Saint-Louis (à revoir ici).
Pouvoir filmer une intervention policière, c’est un droit. Plus encore quand celle-ci se déroule dans l’espace public. La protection de la vie privée peut empêcher l’éventuelle diffusion des images mais jamais le fait de prendre les images. « Il est légitime que des citoyens et des journalistes filment ou photographient des interventions policières, que ce soit pour informer ou récolter des preuves du déroulement des événements », note Mathieu Beys, juriste et auteur de l’ouvrage Quels droits face à la police ? (Ed. Couleur Livres). Il y va du « droit de contrôle démocratique » valable pour les journalistes comme pour toute personne remplissant un tel rôle. Filmer une intervention policière, c’est non seulement un droit mais c’est devenu aussi la seule manière de lutter contre les bavures. Cela vaut donc vraiment la peine de défendre nos smartphones.
Les chiffres clés des bavures et de la « tolérance à l’égard des moutons noirs »
En 2002, déjà, le ministre de l’Intérieur de l’époque Antoine Duquesne (MR) l’avouait : « Il n’est en effet que trop fréquent que des comportements inadmissibles et des manquements élémentaires (…) soient constatés. » Mais obtenir des chiffres précis sur ces abus est difficile car de nombreux comportements policiers inacceptables ne sont jamais répertoriés, faute de plaintes. Néanmoins, on sait que le nombre de plaintes récoltées par le Comité P, l’un des organes chargés du contrôle des services de police, augmente d’année en année : 2 219 plaintes en 2007, 2 339 en 2008, 2 401 en 2009, 2 459 en 2010, 2 688 en 2011. On sait aussi que l’inspection générale de la police recensait 373 incidents en 2010 concernant l’usage de la force, soit plus d’un par jour.
Les autorités se défendent, arguant que le Comité P juge 80 % des plaintes non fondées. Mais, pour le Comité des droits de l’Homme de l’ONU, « des doutes subsistent sur l’indépendance et l’objectivité du Comité P et sur la capacité de ce dernier à traiter dans la transparence les plaintes portées à l’encontre des fonctionnaires de police ». En langage clair, cela signifie que l’ONU ne fait pas vraiment confiance au Comité P pour contrôler la police. Et pour cause, son service « enquête » est composé en grande partie de policiers temporairement détachés de leur service. On ne trouve au Comité P aucun représentant de la société civile (avocat, ONG, citoyens…).
Enfin, l’immense majorité des plaintes sont classées sans suite et lorsque, par miracle, un dossier aboutit devant un tribunal, les policiers bénéficient d’une impunité de fait. Le rapport 2006 du Comité P note en effet : « On remarquera le nombre élevé difficilement explicable de suspensions du prononcé des condamnations dont les fonctionnaires de police peuvent manifestement bénéficier : 30 suspensions sur 95 décisions de justice (sans comptabiliser les acquittements). Ce pourcentage de 31,5 % est considérable. En fait, près d’un fonctionnaire de police criminel sur trois obtient une suspension et conserve un casier judiciaire vierge. Si nous comparons ce résultat au pourcentage normal de suspensions du prononcé dont peut bénéficier le citoyen ordinaire (4,72 %), nous sommes contraints de constater que les fonctionnaires de police semblent bel et bien bénéficier d’un régime pénal extrêmement favorable. » Pour l’organe de contrôle, « on peut certainement parler d’une politique de tolérance au niveau pénal à l’égard des moutons noirs de la police ».
Source de l’article : solidaire=38906&cHash=53a214e83e546141756afd408fa5e6ba]
Témoignage : Axel Farkas, candidat LCR sur la liste PTB-GO ! en Brabant wallon, arrêté pour vouloir témoigner d’une rafle à la Stib
Mercredi, Axel Farkas, candidat LCR, 3e effectif sur la liste régional PTB-GO ! en Brabant wallon, assiste à une nouvelle rafle à la Stib. En prenant des photos pour témoigner de la collaboration des agents de la Stib et de la police, il est arrêté pour « trouble à l’ordre public ». Voici son témoignage. Stop à la criminalisation des usagers ! Stop aux rafles de sans-papiers ! Stop aux abus de pouvoir ! Gratuité des transports en commun ! Régularisation de tous les sans-papiers ! (JAC et LCR)
Ce mercredi 2 avril nous étions plusieurs JAC à manifester pour un refinancement de l’enseignement. La manif se terminant à Flagey nous y sommes restés quelques heures pour profiter du soleil et discuter. Vers 17h30, un camarade m’appelle pour me prévenir qu’il y a des contrôleurs de la STIB accompagnés de la police à Flagey.
Etant sur place je m’éloigne du groupe avec lequel j’étais et je me rapproche des arrêts STIB. Une fois sur place, j’aperçois, des contrôleurs de la STIB, la police, des agents de la paix et une femme arrêtée.
Je décide de prendre une photo. Après l’avoir prise un policier me demande : « Vous avez pris une photo ? », je lui réponds que oui. Il ne dit rien et continue ce qu’il était en train de faire. Je décide de prendre une 2e photo et je m’en vais.
Lorsque je rejoignais le groupe avec lequel j’étais, une dame m’arrête en chemin et me demande si j’ai pris des photos, je lui réponds que oui. Elle me demande « Est-ce que je peux les voir ? », je refuse. C’est après mon refus qu’elle sort une carte de sa poche et me la montre. Le temps de pouvoir y lire « Police », elle m’annonce : « Je vous arrête ! »
Devant cette injustice je crie pour prévenir mes camarades plus loin que je suis en train de me faire arrêter et pour qu’ils/elles gardent mon sac avec toutes mes affaires dedans. On m’a menotté comme si j’avais commis un crime et mis dans la voiture de police. C’est dans la voiture que j’apprends que je suis arrêté pour « trouble de l’ordre public ». Quand je leur demande plus de précisions ils m’annoncent que c’est pour avoir crié sur la place. Je leur ai rappelé que j’ai crié après l’annonce de mon arrestation mais c’était comme si je parlais dans le vide.
Pendant tout le chemin et même a l’intérieur du commissariat, les policiers m’ont répété que je n’avais pas le droit de les prendre en photo. Je leur répondais sans cesse que je connaissais mes droits, qu’ils étaient sur un lieu public et que ma seule obligation était de flouter leurs visages. Ils m’ont menacé plusieurs fois de supprimer mes photos.
Après plusieurs longues minutes d’attente au commissariat, le commissaire est venu et a confirmé mes dires. J’ai pu garder mes photos et j’ai été libéré.Vous pouvez voir les photos dans cet article qui démontrent bien la collaboration entre la STIB et la police !
Source de l’article : LCR-LaGauche