En 1987, Jean Daive avait rencontré James Baldwin pour une série de cinq entretiens, enregistrés pour “Les chemins de la connaissance” sous le titre “Je m’appelle James Baldwin”.
En 1987, Jean Daive avait rencontré James Baldwin pour une série de cinq entretiens, enregistrés pour “Les chemins de la connaissance” sous le titre “Je m’appelle James Baldwin”. Diffusion du premier volet dans lequel il évoquait son recueil de nouvelles “Face à l’homme blanc”.
L’écrivain et figure de la gauche radicale américaine, dont l’émancipation des noirs traverse l’œuvre entière, relate dans cet entretien son itinéraire, de la prime enfance à ses derniers combats, en passant par ses questions relatives à l’identité.
“Dans la nécessité où je me trouvais de découvrir dans quelle condition mon expérience pourrait se rattacher à celle des autres, noirs ou blancs, écrivains ou non, je m’aperçus à mon grand étonnement que j’étais aussi américain que n’importe quel GI du Texas et je me rendis compte que ce sentiment était partagé par tous les écrivains américains que je connaissais à Paris. Comme moi, ils s’étaient coupés de leurs origines, que l’origine des blancs américains fut européenne et la mienne africaine, cela se révéla d’une importance bien médiocre. En Europe, ils étaient aussi déracinés que moi. J’étais fils d’esclaves, ils étaient fils d’hommes libres. Mais à partir du moment où nous nous retrouvions sur le sol de l’Europe, cela importait moins que le fait que nous cherchions eux comme moi notre identité particulière. Quand nous l’avions trouvé tout se passait comme si nous nous disions qu’il ne fallait plus nous accrocher à la honte et à la rancœur qui nous avait divisés si longtemps”.
Personne ne sait mon nom – James Baldwin, 1961
Au mois de mars 1987, pour “Les chemins de la connaissance”, Jean Daive rencontrait James Baldwin pour une série de cinq entretiens. L’écrivain américain s’était exilé en France une première fois en 48.
“À Paris, j’ai réussi à me débarrasser de tous les stéréotypes dont m’avaient infligé mes concitoyens. Et, une fois que vous vous en êtes débarrassé, c’est irréversible ! À Paris on me laissait tranquille — tranquille de devenir ce que je voulais devenir. Je pouvais écrire, penser, ressentir, marcher, manger, respirer librement. Aucune sanction ne venait frapper ces simples faits humains. Même lorsque je mourais de faim, c’était différent des États-Unis. Ici, c’était moi, Jimmy, qui mourait de faim et non l’homme noir que j’étais.”
Rentré aux États-Unis en 57, James Baldwin s’impliqua alors totalement dans le mouvement des droits civiques. Mais profondément marqué par les assassinats des leaders noirs, celui de Martin Luther King en particulier, James Baldwin passa par la suite l’essentiel de son temps en Europe et, à partir de 1970, à Saint-Paul de Vence où il vécut et travailla jusqu’à sa mort, quelques mois après cette rencontre avec Jean Daive.
Je m’appelle James Baldwin, premier temps d’une série de cinq entretiens avec l’écrivain américain pour “Les chemins de la connaissance”, proposé par Jean Daive en 1987.
James Baldwin évoquait les difficultés d’un Noir à vivre dans l’Amérique des années 20, mais aussi des années 50 et 60 : Je suis né dans les années 20, c’était la grande dépression, la grande crise, et la pauvreté bien sûr était exagérée dans le cas d’une famille Noire. Quand les choses vont mal dans mon pays, cela va encore plus mal pour les Noirs. C’est pire pour eux. C’est toujours vrai d’ailleurs.