Nous, forces sociales de toutes les provinces de la République Démocratique du Congo, Syndicats et ONG, mouvements associatifs , Mutuelles de santé, intellectuels, artistes, paysannes et paysans, travailleuses et travailleurs, salariés, étudiants, congolais de la Diaspora, chômeuses et chômeurs, pauvres, réunies au 3e Forum Social Congolais, à Kinshasa, du 23 au 26 octobre 2011 au Carrefour des jeunes de Matonge, sommes déterminées à approfondir la lutte pour une société congolaise nouvelle qui valorise ses fils et ses filles et qui redistribue équitablement la justice et les richesses du pays.
Nous sommes révoltées contre la misère qui frappe la majorité de la population congolaise, dans un pays aux multiples richesses du sol et du sous-sol. Nous sommes indignées par l’attitude des politiciens qui ne prennent point en compte les aspirations de la population dans leurs attitudes et actions et ne recourent à elle que pendant la période électorale.
Nous sommes contre la corruption, l’impunité, le clientélisme, le tribalisme, le culte de la personnalité, le détournement des deniers publics, le favoritisme, les disparités sociales et les violations des droits et libertés individuelles.
Nous sommes contre l’hégémonie des institutions financières internationales, la destruction de nos valeurs et cultures, la dégradation de notre environnement, l’insalubrité nocive dans nos villes et villages, l’instrumentalisation des enfants par les politiques, l’intolérance de tous bords, les violences interminables contre les femmes, le meurtre des défenseurs des droits humains, les intimidations des syndicalistes, les tracasseries administratives et fiscales, l’insécurité dans les transports aériens, routiers, ferroviaires et maritimes .
Nous dénonçons les attitudes des sociétés multinationales qui ne garantissent pas un emploi productif et durable, bref le démantèlement de la législation du travail, entrainant ainsi le chômage aigu.
Nous dénonçons les manœuvres des politiques et plusieurs chefs d’entreprises qui encouragent la prolifération des syndicats de travailleurs dans le seul but de fragiliser l’action syndicale et accroitre la misère des travailleurs.
Nous dénonçons le transfert des capitaux par les Multinationales à l’extérieur du pays avec des facilités sous le concept caché de la promotion des investissements avec la complicité des décideurs congolais aux dépens de fisc congolais.
Nous dénonçons la privatisation des entreprises publiques sous la couverture d’une reforme dictée par les institutions financières internationales.
Nous dénonçons les conditions des travailleurs et travailleuses congolais dans les entreprises industrielles en général et minières, forestières et pétrolières en particulier ainsi que dans le commerce et la construction. Nous dénonçons également les conditions des travailleurs domestiques, travailleurs agricoles, exploitants miniers et forestiers artisanaux, foulant ainsi aux pieds les normes fondamentales de l’organisation Internationale du Travail (OIT).
Nous dénonçons la taxation, par la Banque centrale des transferts des fonds des migrants congolais vers leurs familles restés au pays.
Nous dénonçons le poids de l’impôt sur les travailleurs salariés qui diminue le pouvoir d’achat des populations
Nous dénonçons les politiques internationales en matière d’immigration et de la liberté de circulation des personnes, provoquant ainsi l’immigration clandestine et la mort de plusieurs personnes voulant traverser les frontières du Nord.
Nous dénonçons les politiques d’immigrations africaines qui ne permettent pas au congolais de circuler librement en Afrique.
Nous dénonçons les conditions difficiles d’acquisition des passeports ainsi que leur prix exorbitant.
Nous dénonçons le manque d’une politique nationale en faveur de la Jeunesse congolaise.
Nous déplorons la corruption qui caractérise le monde du Sport et qui est à la base de la violence pratiquée par les jeunes supporters allant même jusqu’à s’en prendre aux édifices publics.
Nous appelons à la promulgation immédiate de la Loi sur le Sport et l’adoption de mesures de son accompagnement.
Nous déplorons le non respect du principe de Laïcité tel que défini par la Constitution et qui se caractérise par l’intolérance d’opinions politiques, religieuses et philosophiques et même par l’abandon par l’état de ses charges en matières d’éducation, par exemple.
Nous voulons qu’une politique claire de justice sociale et économique soit mise en place par le Gouvernement afin de mettre fin à la corruption dans la fonction publique, les régies financières, les hôpitaux publics et dans tous les secteurs de la vie devenus plus commerciaux que sociaux.
Nous voulons mettre fin à des tracasseries dont sont victimes aux quotidiens les agriculteurs, les paysans, les locataires, les petits commerçants et les voyageurs.
Nous appelons à la vulgarisation de la nomenclature des taxes et impôts à travers des campagnes de sensibilisations de la population ;
Nous appelons à la mise en place d’un guichet unique « Guichet d’entreprises » d’enregistrement des entreprises et de facilitation en rapport avec les différentes démarches administratives à effectuer ; Nous sommes indignées par la spoliation, par les Multinationales, les grands propriétaires terriens nationaux qui s’accaparent des terres destinées à l’Agriculture familiale en vue de la construction des nouvelles cités des riches, en vue de l’exploitation minière et forestière, en vue de la construction des nouvelles routes et en vue des activités privées.
Nous dénonçons les politiques qui favorisent les importations massives des produits agricoles au détriment de l’Agriculture familiale congolaise plongeant des millions des personnes dans la pauvreté
Nous sommes indignés par la non protection des consommateurs et des locataires laissés-pour-compte.
Nous dénonçons la suppression des bourses d’études dans l’enseignement supérieur et universitaire
Nous n’acceptons pas que les dirigeants élus par la population soient les premiers à les brimer et à les intimider. Nous sommes indignés par les cortèges officiels dont le comportement des policiers et des militaires qui ne respectent pas la dignité des paisibles citoyens.
Nous sommes indignés par le comportement extravagant des élus du peuple qui violent impunément la loi et qui s’enrichissent indument.
Nous dénonçons la non prise en compte des congolais de l’extérieur dans le processus électoral et souhaitons qu’ils participent aussi comme électeurs là où ils sont.
Nous en avons marre de la pénurie croissante d’eau courante et de l’électricité dans plusieurs foyers en milieu urbain et du manque pure et simple de ces énergies en milieu rural.
Nous dénonçons l’absence d’organisations étatiques et communautaires assurant l’accès des gagne-petit aux soins de santé
Nous en avons marre de l’insécurité continue dans les villes et villages.
Nous croyons fermement que des alternatives concrètes à la gouvernance actuelle et au système politique en cours sont possibles.
Nous réaffirmons la suprématie des droits de l’homme, des droits à un environnement sain et des droits sociaux sur les exigences du capital, des investisseurs et des Institutions financières internationales.
Nous voulons approfondir et accroitre la convergence entre l’ensemble des forces sociales afin de mieux résister aux politiques injustes tant au niveau national que global afin d’améliorer l’égalité, la justice sociale, la démocratie et la sécurité pour tous, sans aucune distinction. Nos méthodes et nos alternatives doivent contraster fortement avec les politiques destructrices du néolibéralisme traduites par les nombreux programmes gouvernementaux, bilatéraux et multilatéraux qui relèguent au second plan le social des populations.
La mondialisation actuelle, néolibérale, telle que vécue et encouragées par les Institutions financières internationales et le G8, renforce un système sexiste, patriarcal, qui favorise l’exclusion et la féminisation de la pauvreté. Il exacerbe toutes les formes de violence à l’encontre des femmes et des enfants. L’égalité homme-femme doit être une dimension centrale de notre combat. Sans elle, un autre Congo et un autre monde ne seront jamais possibles.
La mondialisation néolibérale favorise la destruction de l’environnement, en le rendant, par l’industrialisation sauvage, néfaste pour la santé et les conditions de vie du peuple. L’atmosphère, l’eau, la terre et les êtres humains également sont transformés en marchandises.
La Dette Extérieure de la RDC a été payée plusieurs fois. Injuste, illégitime et frauduleuse, elle fonctionne comme un instrument de domination, privant la population de ses droits fondamentaux.
Le mécanisme PPTE n’est qu’un leurre. Nous exigeons l’annulation totale de la dette sans conditions et la réparation des dettes historiques, sociales et écologiques, ceci constituant les premières mesures d’une solution définitive aux crises que la dette extérieure provoque.
Nous appelons nos élus à voter une Loi contre les Fonds Vautour et les dettes odieuses. Nous les appelons à mettre sur pied une Commission d’Audit de la Dette au niveau du parlement et du Gouvernement.
Nous appelons tous les mouvements sociaux, les mouvements des jeunes, les mouvements des femmes, les associations des quartiers, les Mutuelles de santé, les Syndicats et les ONG qui croient en notre combat , à se solidariser et à développer un comportement qui démontre une parfaite résistance aux systèmes et politiques qui oppriment le peuple et qui ne favorisent que les intérêts des Multinationales et des puissances étrangères ainsi que de quelques nationaux.
Nous appelons à la prise en compte de la dimension culturelle dans les projets de développement ainsi que la mise en pratique des engagements pris par l’Etat congolais notamment la convention pour la promotion et la protection de la diversité des expressions culturelles (UNESCO 2005).
Nous appelons à l’élaboration d’une politique culturelle cohérente avec la participation de la société civile culturelle de toutes les disciplines qui valorise la création avec sa liberté d’expression, définit le statut de l’artiste, soutient les industries créatives, la formation artistique et les infrastructures
culturelles.
Nous appelons les élus du peuple à élaborer et adopter une Loi de protection des activistes des Droits de l’homme.
Nous appelons tous les Mouvements et les organismes du Monde engagés socialement, à l’instar de : Diakonia, CNCD/11.11.11, Solidarité Socialiste, Christian Aid, Social Watch, Reality of Aid, CCFD, Dynamo International, CAL, CADTM, CSI/ITUC, CSC, FGTB, ENDA, OXFAM, VIA CAMPESINA, COSATU, CIVICUS, CETRI, etc. à soutenir le processus du Forum Social Congolais, afin d’aider les congolais et congolaises à sortir du carcan de la peur, du paternalisme, des stéréotypes et des clichés positivistes du néolibéralisme et de ses corollaires comme la privatisation des services sociaux de base.
Nous appelons les Mouvements et les organismes du Monde engagés socialement à soutenir les mouvements sociaux congolais à lutter contre la dette odieuse et toute forme d’oppression, contre les diktats du FMI et de la Banque Mondiale, les directives de l’OMC et contre les accords de coopération mal négociés.
Nous les appelons à accompagner les congolaises et congolais à reconstruire la paix, la solidarité, la tolérance, le respect de la dignité humaine, l’égalité homme-femme, le respect et la promotion de la personne avec handicap, la protection des enfants et des vulnérables.
Nous appelons les décideurs nationaux à mutualiser les efforts afin d’obtenir que chaque citoyen ait accès aux soins de santé.
Nous appelons les hommes politiques de la RDC à marcher selon les attentes de la population et à privilégier la Vie et les droits sociaux des populations dans la conception des politiques de développement et dans la négociation de tous les accords de coopération
Nous appelons les candidats aux élections présidentielles et législatives à présenter et à défendre leurs programmes sociaux. Et nous appelons l’ensemble des populations à voter ses dirigeants sur base des programmes ambitieux et réalistes et sur base de la crédibilité des candidats liés à leur passé dans la gestion de la sphère publique et privée.
Nous appelons les candidats aux élections présidentielles et législatives à signe une sorte de contrat social avec la Population les engageant à rendre régulièrement compte à la population qui leur donnera mandat.
Nous en appelons à des élections apaisées, transparentes et démocratiques. Les élections locales demeurent notre préoccupation et exigeons des garanties claires pour leur organisation.
Nous en appelons au strict respect de l’Article 1 de la Constitution de la République Démocratique du Congo qui consacre le caractère Laïc de l’Etat Congolais.
Nous nous engageons à soutenir le processus du Forum Social Congolais et à approfondir la réflexion dans nos organisations et nos milieux naturels de vie en vue de contribuer efficacement à l’émergence d’une couche sociale congolaise prête à barrer la route au néolibéralisme et à ses corolaires que sont la privatisation des services sociaux, l’intolérance, la recherche du lucre, les violations des libertés et droits de la personne, la dette odieuse, le marchandage de tous les secteurs de la vie, etc.
Nous saluons la présence parmi nous, à ce 3e Forum Social Congolais, des camarades venus du Congo-Brazzaville, témoignant ainsi la fraternité et l’amitié qui nous unissent et qui devraient toujours nous
unir.
Nous en appelons à la réalisation d’un Forum social des deux rives, d’un Forum Social des Grands Lacs.
Nous souhaitons que la RDC abrite le Forum Social Africain et organise à l’occasion du sommet de la francophonie, un Forum Social de la Francophonie.
Nous soutenons toutes les luttes sociales en RDC, en Afrique et dans le monde contre la misère et les diktats des finances internationales.
Nous soutenons les déclarations de la Société Civile au 4e Sommet des Nations Unies sur les Pays Moins Avancés à Istanbul. Nous soutenons la participation de la société civile au Forum de Haut Niveau sur l’efficacité de l’Aide qui se tiendra à Busan, en Corée, en Novembre 2011.
Notre participation au 3e Forum Social Congolais a enrichi, au regard de l’autopsie que nous avions faite du Cinquantenaire de l’indépendance de la RDC, notre compréhension de la lutte globale et locale contre le néolibéralisme et la misère, et nous en sommes sortis plus forts.
Nous en appelons à tout le peuple congolais de nous rejoindre dans notre lutte sociale pour la construction d’un futur meilleur. Un Congo de justice et de dignité humaine est possible !
Le Forum social Congolais, parti intégrante du Forum Social Mondial et du Forum Social Africain, est un pas vers la souveraineté nationale et vers une République Démocratique du Congo plus juste et plus égalitaire !
3e Forum Social Congolais