Ou comment se débarrasser « en douceur » d’un président progressiste (trop ou pas assez selon les points de vue mais vu de droite c’est du pareil au même). Le chaos qui nous attend dans ce virage à droite.
Le scénario était bien ficelé et ce n’est pas la présence de TOUS les ministres des affaires étrangères des pays de l’UNASUR ni la menace proférée par plusieurs de ne pas reconnaître d’autre président voire même de fermer les frontières qui a fait reculer ces doux putschistes qui se débarrassent tranquillement et en direct sur la TV du Sur… d’un président qui leur donnait des démangeaisons à défaut de vraiment leur faire mal au portefeuille. C’est toujours une pièce en moins pour les « rouges » sur l’échiquier sud-américain.
Lugo est tombé dans un piège aussi inique que bien préparé. Des forces de répression de l’état vont rétablir l’ordre et déloger les paysans occupant une ferme de la région de Curugaty. 19 morts dans les affrontements et c’est le président qui est accusé et en quelques heures destitué par l’un des sénats les plus corrompus du monde ! Il fallait voir en direct la touche de ces caricatures de puissants, mieux qu’à Hollywood, « voter » un par un la destitution de Lugo et se congratuler ensuite les uns les autres dans une danse macabre bien déplacée.
L’ancien vice-président, tout acquis à la droite dure, est investi dans la foulée. Et, la répression commence à se déchaîner sur les partisans de Lugo venus le soutenir et qui sont dispersés par les charges de cavalerie, les canons à eau, les lacrymogènes et les matraques. Ce n’est qu’un début…
Le Honduras en mieux quoi.
Une technique rodée qui fonctionne bien : on crée des incidents bien meurtriers. On accuse qui on veut et on envoie l’artillerie lourde, les avions et leurs bombes pour « éviter les bains de sang » et rétablir la démocratie pour que les affaires reprennent vraiment.
L’Unasur plombé par le consensus impossible (Chili, Colombie qui rient sous cape, Pérou déjà neutralisé) se contentera comme pour le Honduras de belles déclarations, l’Alba impuissant, l’OEA convoqué d’urgence à Washington veut reprendre du poil de la bête. Elle est belle la défaite de l’impérialisme à Carthagène.
Atilio Boron nous avait mis en garde il y a quelques jours http://www.kaosenlared.net/america-latina/item/19840-video-argentina-atilio-bor%C3%B3n-el-imperialismo-despliega-una-contraofensiva-en-la-regi%C3%B3n.html
Sa réaction à chaud traduite ici par nos soins :
Pourquoi ont-ils fait tomber Lugo ?
Par Atilio Boron
La farce est jouée : le président du Paraguay Fernando Lugo vient d’être destitué de sa charge après un jugement sommaire du Sénat le plus corrompu des Amériques ‑ce n’est pas peu dire – qui l’a déclaré coupable de « mauvaise gestion » suite aux morts survenues au cours des évènements de la ferme de Curugaty.
Il est difficile de prévoir la suite. Une chose est sure : le massacre de Curugaty fut un piège monté par une droite qui depuis l’entrée en fonction du président progressiste, attendait le moment propice pour en finir avec un régime qui bien que n’ayant en rien affecté ses intérêts, ouvrait un espace aux revendications sociales et à l’organisation populaire toutes choses incompatibles avec sa domination de classe.
Malgré les suggestions multiples de ses amis et alliés, tant au Paraguay qu’en Amérique Latine, Lugo ne s’est jamais attelé à la tâche de consolider de la force social aussi nombreuse qu’hétérogène l’ayant porté à la présidence avec beaucoup d’enthousiasme en aout 2008.
Son poids réel au Congrès du pays était vraiment minime (un ou deux sénateurs maximum) et seule une capacité de mobilisation populaire dans la rue pouvait conférer un peu de gouvernabilité à son action.
Il ne l’a pas entendu ainsi et tout au long de son mandat, ce furent une succession de concessions à la droite, et celle-ci bien que toujours plus favorisée n’allait jamais accepter sa légitimité. Chaque concession à la droite n’a fait qu’enhardir celle-ci et non l’apaiser. En dépit de toutes ses concessions, Lugo fut toujours considéré comme un intrus dérangeant, faible au point de faire adopter par ce même congrès corrompu les lois « antiterroristes » à la demande de l’ambassade US au lieu de les rejeter.
La droite qui bien sur n’a bougé toujours que main dans la main avec Washington pour emêcher par exemple l’entrée du Vénézuela dans le Mercosur. C’est trop tard que Lugo a ouvert les yeux sur la prétendue démocratie paraguayenne institution de fait de l’état capitaliste qui le destitue aujourd’hui dans un simulacre tragi-comique de procès politique qui viole toute les normes d’un état de droit.
Une leçon pour le peuple paraguayen et pour tous les peuples d’Amérique Latine et des Caraïbes : seules la MOBILISATION et l’ORGANISATION POPULAIRES permet des gouvernements qui veulent impulser un projet de transformation sociale même les plus modeste comme ce fut le cas de Lugo. L’oligarcbie et l’impérialisme ne cessent de conspirer et d’AGIR. Et s’ils jouent les résignés, ce n’est qu’une apparence trompeuse comme nous venons de le voir à Asuncion.
Source : http://www.legrandsoir.info/coup-d-etat-malin-au-paraguay.html
et http://www.atilioboron.com.ar/2012/06/por-que-derrocaron-lugo.html repris par Telesur et Prensa Latina.