Le Pérou en fin d’année, entre la refondation et la poubelle.
Par Lucía Mariana Alvites Sosa (Sociologue péruvien, diplômé de l’UNMSM, Master en genre et études culturelles à l’Université du Chili. Membre de diverses organisations et mouvements sociaux au Pérou et en Amérique latine.)
Traduit par ZIN TV
“Pitié, pitié pour la rivière, le pont et l’avenue!”
Raúl Porras Barrenechea
C’est comme si l’enfer existait réellement et que le Noël n’était jamais venu, les résidents du quartier historique du Rimac à Lima sont condamnés à vivre littéralement sur les ordures en cette fin d’année. Et c’est que, le maire Victor Leyton ayant appris qu’il ne serait pas réélu il abandonna le district en paralysant le service de collecte des ordures. Tel une punition au choix démocratique de ne pas le réélire, condamnant les habitants du Rimac aux mauvaises odeurs, à la combustion massive de déchets et aux nombreuses maladies causés par la décomposition de tonnes de déchets entassés dans les coins.
Le manque de respect et du mépris exacerbé envers la citoyenneté qui s’exprime dans cette situation, l’impunité, la passivité et l’indifférence du gouvernement qui ne génère aucun plan d’urgence pour sauver cette destination indécente, infligé à des centaines de milliers de personnes qui vivent et passent par le district, est la meilleure démonstration de ce que dans la réalité, au-delà des discours d’occasion, vaut le peuple péruvien pour cette classe politique qui dirige le pays. Cela se reflète parfaitement dans les déclarations publiques sur les plaques de bronze comme “mettez vous la mairie au cul”, celle d’un représentant notable de la droite péruvienne, ou bien « l’argent tombe du ciel » de l’ineffable président de la république.
Le fait est que ce sont les cas les plus graves et notoires, mais pas les seules, des maires qui ne sont pas réélus, ou de démissionner pour se porter candidat du Congrès qui ont laissé à la dérive leurs municipalités respectives. Cela montre la mesure dans laquelle les pratiques institutionnelles et politiques du Pérou touchent un fonds littéralement irrespirable et demandent, presque comme un reflet de survie, d’une refonte radicale de l’éthique et de la politique.
Bien sûr, tous n’ont pas le même sentiment d’urgence de re-fondation. Les tonnes de déchets sont aussi la métaphore d’une citoyenneté réellement existante aujourd’hui au Pérou. Une situation similaire est inconcevable dans les domaines des riches et des nantis de Lima comme Monterrico, La Molina et Miraflores. Et c’est que les abysses du Pérou peuvent être obstinément niés dans le monologue du pouvoir auprès des médias de masse, mais dans la réalité, ils opèrent de manière impitoyable. L’élimination des déchets, celle des psycho-sociaux et de la banalité médiatique, la contamination des sociétés transnationales, la violation de la souveraineté, des droits du travail inexistants, est souffert part beaucoup, mais de tout cela, d’autres en profitent également.
Reste à voir dans les prochaines élections parlementaires et présidentielles en avril, dont les campagnes sont en cours, qui, exactement, ressent l’urgence de cette refonte urgente, et qui en ont peur et la discréditent, et ceux qui de manière « responsable » l’estiment nécessaire, mais ont toujours de bonnes raisons pour attendre…