Atelier “Utopie merdique” (narration spéculative)

ZIN TV - Mars 2025

L’a­te­lier est libre­ment ins­pi­ré par les ate­liers « labo-fic­tion » don­nés par les Ate­liers de l’Antémonde, un col­lec­tif fémi­niste d’imagination enthou­siastes, cri­tiques, révo­lu­tion­naires et anti-auto­ri­taires, ayant notam­ment écrit col­lec­ti­ve­ment le livre Bâtir aus­si.

« L’art [le ciné­ma] c’est la force de faire dire à la réa­li­té ce qu’elle n’aurait pu dire par ses propres moyens, en tout cas, ce qu’elle ris­quait de pas­ser volon­tai­re­ment sous silence ». Aver­tis­se­ment, Les Sept Soli­tudes de Lor­sa Lopez, Sony Labou tansi

D’a­bord, quelques constats : nous sommes abreuvé·e·s de scé­na­rios dys­to­piques qui, le plus sou­vent, nous main­tiennent — il fau­drait ici défi­nir ce “nous” — en posi­tion de défaite. Com­bien de films récents sur une pos­sible fin du monde, une guerre « civi­li­sa­tion­nelle » pré­sen­tée comme iné­luc­table ? Nos ima­gi­naires du futur semblent ver­rouillés par l’avalanche de nou­velles dys­to­piques. Ces récits — qui engendrent de la sidé­ra­tion, de l’anxiété, voire poussent à la rési­gna­tion (désa­mor­çant tout désir com­mun qui contes­te­rait l’ordre en place) — ter­ri­fient autant qu’ils indi­vi­dua­lisent : les dominant·e·s nous veulent tristes, résigné·e·s, seul·e·s… Aus­si, l’angoisse sus­ci­tée, le déses­poir occa­sion­né sont un ter­reau fer­tile pour les récits d’extrême droite aux réponses sim­plistes, mono­li­thiques, binaires (quand ces mêmes récits ne se basent pas sur une néga­tion pure et simple du réel, par l’in­ven­tion de faits — les « faits alter­na­tifs » et/ou par un appel à la « nature » : le « There is no alter­na­tive » de Mar­ga­ret That­cher dans les années 80 ou de l’Afd en Alle­magne aujourd’hui).

Dès lors, que faire contre les dis­cours aquoi­bo­nistes, les ima­gi­naires sur­vi­va­listes ou de loi du plus fort, le nihi­lisme ? Com­ment dépas­ser la sidé­ra­tion, le sen­ti­ment d’impuissance ? Com­ment prendre le contre-pied ? Com­ment construire des his­toires dis­si­dentes, « empuis­san­santes » ? Com­ment ravi­ver nos joies, nos rages, nos dési­rs ? Autre­ment dit, com­ment envi­sa­ger « le verre à moi­tié plein » ? Si — semble-t-il — oppo­ser des faits ne suf­fit plus aujourd’­hui, alors peut-être faut-il ima­gi­ner autre chose, afin de répa­rer et d’« orga­ni­ser le pes­si­misme » (comme le sou­hai­tait Wal­ter Ben­ja­min). Dans un monde qui va mal, s’efforcer à aller bien est une forme de résistance…

Construire des his­toires « dési­rables » néces­si­te­rait alors de dépas­ser les recettes toutes faites (les récits for­ma­tés des films hol­ly­woo­diens), de sor­tir de l’imaginaire du chaos poli­tique, de la pénu­rie et de la guerre, etc., de dépas­ser l’idée d’une « vic­toire pour après-demain », qu’on ne ver­ra pas de notre vivant… Et sur­tout, pen­ser le monde, le réel dans sa com­plexi­té, dans ses contra­dic­tions : parce qu’une uto­pie hors-sol, sans pro­blème, lisse, sans grin­ce­ment ni désac­cord, serait pro­ba­ble­ment auto­ri­taire… Autre­ment dit, du « dési­rable » doit inclure la pos­si­bi­li­té d’une coha­bi­ta­tion, d’un voi­si­nage avec des per­sonnes dont les choix nous hérissent (voire nos opposant·e·s poli­tiques). Pour qu’un « monde dési­rable » advienne et dure dans le temps, il nous faut donc pen­ser des formes de négo­cia­tion, d’ajustement, voire d’alliances par proxi­mi­té… Enfin, pen­ser des his­toires « dési­rables » invite à s’en­vi­sa­ger en « historien·ne·s du futur », à être prospectif.ve. En somme, c’est pen­ser une « uto­pie bour­rée d’ambiguïtés » (Ursu­la Le Guin), soit une « uto­pie mer­dique » (Ate­liers de l’Antémonde).

Objec­tif de l’atelier : construire des court-métrages, sans moyen ou presque, à par­tir d’i­mages impri­mées et d’une voix-off écrite col­lec­ti­ve­ment, qui ima­ginent un futur proche ins­pi­rant. Ce serait quoi un monde désirable ?

Point de départ des petits films ima­gi­nés : la jour­née du 15 mars 2025, jour­née contre les vio­lences poli­cières et de sou­tien aux familles des vic­times. La situa­tion ini­tiale et la pre­mière image des films sont impo­sées : “À la fin de manif contre les vio­lences poli­cières du 15 mars 2025, 1 000 manifestant·e·s entrent dans un lieu de pou­voir et l’occupent…”. Le reste est ima­gi­né collectivement.

Durée : 4h

Nbr de per­sonnes : 10 – 15 participant·e·s

Pro­chaines dates d’a­te­lier : à venir

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