La télévision d’auteur : une utopie ?

En pro­lon­ge­ment du cycle, la Ciné­ma­thèque accueillit le 28 février les cher­cheurs ita­liens Adria­no Aprà (Fon­da­zione Ros­sel­li­ni et Uni­ver­si­tà di Roma 2), Ele­na Dagra­da (Uni­ver­si­tà di Mila­no) et Ste­fa­no Ron­co­ro­ni (réa­li­sa­teur et cher­cheur indé­pen­dant), dans le cadre de la table ronde Ros­sel­li­ni et la télé­vi­sion, orga­ni­sée et ani­mée par Viva Paci (Uni­ver­si­té de Montréal).

Viva Paci, Pro­gram­ma­trice invi­tée et pro­fes­seure de cinéma

Karine Bou­lan­ger, Pro­gram­ma­trice, télé­vi­sion et vidéo

Source : la revue de la cinematheque

Mots-clés

Com­mu­ni­quer des savoirs, ensei­gner l’histoire, la géo­gra­phie, les archi­tec­tures de la pensée…

Télé-utopie : ROSSELLINI, RUIZ, GODARD, ROHMER ET LA “TÉLÉVISION D’AUTEUR”

Quand le regard du Néo­réa­lisme se por­ta sur la « boîte à images » domes­tique, une idée étrange s’empara, pen­dant presque 20 ans (entre les années 1960 et les années 1980), d’une poi­gnée de réa­li­sa­teurs de ciné­ma : cet objet du quo­ti­dien, la télé­vi­sion, pou­vait réel­le­ment ser­vir à com­mu­ni­quer. On retrouve à la télé­vi­sion, au long de cette période, sur des tra­jec­toires paral­lèles, Mar­ker, Roh­mer, Godard, Per­rault, Fass­bin­der, Reitz, Loach, Ruiz.

Com­mu­ni­quer des savoirs, ensei­gner l’histoire, la géo­gra­phie, les archi­tec­tures de la pen­sée, mon­trer les époques révo­lues pour apprendre quelque chose sur l’actualité, réflé­chir sur la lit­té­ra­ture, la dra­ma­tur­gie, l’art… telle était l’utopie. Et le ciné­ma, on l’espérait, contri­bue­rait au pro­jet, de même que l’État : le ciné­ma devait four­nir son œil et son cœur, les camé­ras, les micros, et le mon­tage, l’État devait régler la fac­ture. Et les télé­spec­ta­teurs (pas encore une masse homo­gé­néi­sée par des décen­nies de domi­na­tion catho­dique) pour­raient en sor­tir gran­dis. C’est Rober­to Ros­sel­li­ni qui, à par­tir de 1963, pro­fes­sa cette idée de la télé­vi­sion comme ency­clo­pé­die démo­cra­tique. Ses réa­li­sa­tions sur l’histoire (L’Âge du fer, La Lutte de l’homme pour sa sur­vie, L’Âge de Cosme de Médi­cis), la phi­lo­so­phie (Socrate, Agustín, Des­cartes, Pas­cal), et la reli­gion (Les Actes des Apôtres) consti­tuent des cen­taines d’heures de palimp­sestes télé­vi­suels qui réin­ventent chaque fois la mise en scène, le mon­tage, le trai­te­ment des archives.

L’exemple de Ros­sel­li­ni devait mar­quer plu­sieurs cinéastes. Godard, Roh­mer et Ruiz, entre autres, vou­lurent faire, comme lui, une télé­vi­sion didac­tique et péda­go­gique qui puisse chan­ger le monde et remo­de­ler la télé­vi­sion elle-même. Roh­mer est peut être celui qui par­tage le plus direc­te­ment, avec Ros­sel­li­ni, une volon­té didac­tique. Entre 1963 et 1970, il pro­dui­ra pour la télé­vi­sion péda­go­gique fran­çaise une ving­taine de pro­grammes des­ti­nés à être uti­li­sés en classe, por­tant pour la plu­part sur des figures lit­té­raires mar­quantes (Hugo, Mal­lar­mé, Poe). Il réa­lise aus­si quelques émis­sions régu­lières sur le ciné­ma et la poli­tique et la série Ville nou­velle — sur l’architecture et l’urbanisme en France — pour l’INA. Ruiz, dans les années 1970, s’intéressera de près aux pos­si­bi­li­tés de la télé­vi­sion. Il réa­li­se­ra huit émis­sions et séries, fic­tions et docu­men­taires, por­tant essen­tiel­le­ment sur l’histoire et la poli­tique, et trans­gres­sant radi­ca­le­ment les for­mats et pra­tiques de la télé­vi­sion, au point que plu­sieurs de ses pro­jets ne furent jamais dif­fu­sés. Jean-Luc Godard et Anne-Marie Mié­ville réa­li­se­ront pour l’INA Six fois deux puis France Tour Détour Deux Enfants, séries qui laissent entre­voir ce que pour­rait être une télé­vi­sion mili­tante. France… brasse l’idée même de l’apprentissage du monde et de ses codes, en sui­vant deux jeunes enfants.

Ce tableau peut lais­ser nos­tal­gique d’un âge d’or de la « télé­vi­sion d’auteur », comme le disait joli­ment Ruiz. Il importe pour­tant de sou­li­gner que ces pro­duc­tions étaient à l’époque l’exception plu­tôt que la règle. Elles res­tent tou­te­fois comme les images d’un temps où les grandes ins­ti­tu­tions et chaînes osaient par­fois se lais­ser sur­prendre. Vou­loir chan­ger la télé­vi­sion n’était peut-être pas la moindre des utopies…


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Entretien avec Karine Boulanger et Viva Paci

par Cyril Tho­mas, 30 mars 2008

Nous publions ici la ver­sion inté­grale d’un entre­tien avec Karine Bou­lan­ger et Viva Paci, com­mis­saires du cycle de films « télé-uto­pie : Ros­sel­li­ni, Roh­mer, Godard, Ruiz » pré­sen­té à la Ciné­ma­thèque qué­bé­coise du 9 jan­vier au 8 mars 2008. L’entretien, réa­li­sé (via cour­riel) avec Cyril Tho­mas, est paru, en ver­sion écour­tée, dans l’excellente revue élec­tro­nique fran­çaise Pop­tro­nics.

Cyril Tho­mas : Pour­riez vous me dire, com­ment est née l’idée d’un tel sujet de pro­gram­ma­tion sur ces films, « peu dif­fu­sés » ailleurs qu’à la Ciné­ma­thèque québécoise ?

Viva Paci : Du côté auto­bio­gra­phique, le fait est que je devais mon­ter mon nou­veau cours, à l’Université de Mont­réal, « Ciné­ma et télé­vi­sion ». Il y avait un ensemble de voies qui étaient simples à par­cou­rir et dont les films auraient été faciles à obte­nir. J’aurais pu pas­ser par la voie, consen­suelle, qui veut qu’une cer­taine télé­vi­sion aujourd’hui tra­vaille sur la forme de manière encore plus radi­cale que le ciné­ma. Au delà du fait que ce consen­sus me semble bien sou­vent exces­sif, il est vrai que la pro­duc­tion télé­vi­suelle de séries de fic­tion offre aujourd’hui une qua­li­té éton­nante — du point de vue de l’invention nar­ra­tive. Il suf­fit de pen­ser aux séries de HBO, des clas­siques Sopra­nos à The Wire

Une autre voie, qui au bout du compte aurait rele­vé plus de l’histoire du ciné­ma, aurait pu être celle des grandes séries télé­vi­suelles que des cinéastes inté­res­sants ont crée, de Twin Peaks à The King­dom ; ou encore Hei­mat qui dans ses trois séries a tra­ver­sé 20 ans de télé­vi­sion et presque 100 ans d’histoire.

Alors voi­là, la troi­sième facette du binôme ciné­ma-télé­vi­sion était la moins fré­quen­tée à l’université, et sur­tout de loin la moins connue par les étu­diants, car les maté­riaux sont — entre autre — dif­fi­ciles à trou­ver… C’était la voie qui réunis­sait des cinéastes qui, par des voies diverses, avaient appro­ché la télé­vi­sion pour essayer de la domp­ter (est-ce que vous saviez que l’un des noms qui cir­cu­laient à la fin du XIXe siècle pour nom­mer le dis­po­si­tif des frères Lumière était domi­tor, le domp­teur) : cet appa­reil qui entrait dans les mai­sons pou­vait en ver­tu de la proxi­mi­té, de l’intimité, de la rela­tion conti­nue avec ses spec­ta­teurs, offrir autre chose que les « trois mondes » que la télé­vi­sion a vou­lu offrir, dans les dis­cours et par­fois dans les faits, depuis ses pre­miers temps, et que les études en com­mu­ni­ca­tion iden­ti­fient comme le « monde réel », le « monde fic­tif », le « monde ludique ».

La télé pou­vait entrer dans les mai­sons et édu­quer, ensei­gner à pen­ser… Ain­si nous avons pro­gram­mé des séries de Ros­sel­li­ni, Ruiz, Roh­mer, Godard-Mié­ville qui, entre les années soixante et quatre-vingts ont inves­ti des efforts en ce sens : l’histoire a vou­lu ensuite « étran­ge­ment » (connais­sant le séries en ques­tion et l’âme de la télé, dans les faits, cela n’est pas si étrange…), que ces (é)missions trouvent avec les années une place plu­tôt dans les ciné­ma­thèques et dans les fes­ti­vals, les pro­grammes, dédiés aux cinéastes, que sur les postes de télé.

Karine Bou­lan­ger : Pour faire jus­tice à nos col­lègues, il faut dire qu’une par­tie de ces films a cir­cu­lé dans le cir­cuit des musées et des ciné­ma­thèques, dont récem­ment au MOMA, à la Ciné­ma­thèque onta­rienne, à la Ciné­ma­thèque fran­çaise, au Centre George Pom­pi­dou, etc.

Je crois que l’intérêt de notre pro­gram­ma­tion est sur­tout son carac­tère un peu « trans­ver­sal », puisqu’elle met côte à côte dif­fé­rents cinéastes, alors que ces pro­duc­tions sont le plus sou­vent mon­trées dans des inté­grales ou des rétros­pec­tives indi­vi­duelles, où l’on choi­si par sou­ci d’exhaustivité d’inclure les pro­duc­tions télé.

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France tour deux enfants (Godard-Mié­ville)

CT : Est ce lié à la sor­tie en dvd de la série Ber­lin Alexan­der­platz de Rai­ner Fass­bin­der ? Cette pro­gram­ma­tion ne répond-elle pas d’une cer­taine manière par les films, aux textes de Serge Daney et à ceux de Pierre Bour­dieu sur la télévision ?

KB : Non, nous n’y avions pas pen­sé. Ceci dit le sujet est visi­ble­ment un peu dans l’air du temps, comme en témoignent notam­ment le pro­gramme sur Ros­sel­li­ni et la télé­vi­sion aux États géné­raux du docu­men­taire en 2006, et celui sur Godard à la télé­vi­sion au Centre George Pom­pi­dou en juillet 2006. En plus des réédi­tions qui rendent cette pro­duc­tion plus accessible…

VP : Pas de lien direct avec la sor­tie en DVD de Ber­lin…, par contre Fass­bin­der fai­sait par­tie des auteurs dont nous aurions aimé pré­sen­ter des pro­duc­tions. Sa pro­duc­tion télé aurait pu offrir une véri­table ency­clo­pé­die sur le théâtre et la dra­ma­tur­gie contem­po­raine. Mais comme on ne pou­vait pas tout pro­gram­mer ensemble, des mor­ceaux choi­sis de l’œuvre monu­men­tale de Fass­bin­der pour­raient faire par­tie du sequel… Nous mili­tons en effet pour notre nou­velle série « Télé-Uto­pie 2 » ! Avec Fass­bin­der, nous aime­rions tra­vailler sur un autre cor­pus très hété­ro­gène, avec Ken Loach, Ken Rus­sel, Pierre Per­rault, et Chris Mar­ker. En majus­cules car — pour res­ter dans l’autobiographie — mon inté­rêt pour tout ça est né de L’héritage de la chouette, une série en 13 épi­sodes que Mar­ker a réa­li­sée en 1986.

Disons que notre pro­gramme est plus en dia­logue avec les très beaux textes de Serge Daney qu’avec Sur la télé­vi­sion de Bour­dieu qui est plus inté­res­sé au rôle de l’information télé­vi­sée, et tra­çant une conti­nui­té avec les médias écrits.

CT : Pou­vez-vous nous expli­quer les prin­ci­pales dif­fé­rences de contextes, de dif­fu­sions et de récep­tions des films de Ros­sel­li­ni, Godard, Ruiz, Roh­mer ? Peut-on qua­li­fier ces films « d’hybrides » ?

KB : Je ne crois pas qu’on puisse qua­li­fier ces pro­duc­tions d’hybrides, sauf peut être celles de Ros­sel­li­ni. Je crois que, cha­cun à leur manière, Roh­mer, Ruiz et Godard ont fait un réel effort pour tra­vailler sur les pos­si­bi­li­tés, les limites, et les sté­réo­types de la télé­vi­sion, pour pro­po­ser un (nou­veau) for­mat télé, et non pas pro­po­ser des pro­duc­tions qui puissent tout aus­si bien être du cinéma.

Bien sûr ils « importent » du ciné­ma cer­taines pré­oc­cu­pa­tions, et leur esthé­tique, mais ce qui frappe sur­tout c’est de les retrou­ver dans un contexte tota­le­ment dif­fé­rent. De voir, par exemple, com­ment Roh­mer se sert de façon très ciné­phile d’extraits de films d’Astruc ou de Godard pour livrer un docu­ment par­fai­te­ment didac­tique sur Poe. De le voir s’improviser pré­sen­ta­teur télé et inter­vie­weur dans Ville nou­velle, etc.

Il ne faut pas non plus exa­gé­rer le carac­tère dif­fé­rent ou pro­vo­ca­teur de ces pro­duc­tions. S’il est très clair que Godard et Ruiz essayaient de bri­ser les attentes et cli­chés de la télé­vi­sion, toutes en les ren­dant visibles, Roh­mer reste dans les para­mètres du docu­men­taire péda­go­gique, et de l’émission d’interview. Ce qui sur­prend chez Roh­mer, c’est d’avantage le conte­nu, très poin­tu et docu­men­té, que la forme.

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Ros­sel­li­ni sur le tour­nage de La prise du pou­voir par Louis XIV

Pour Ros­sel­li­ni, qui disait qu’il ne devrait y avoir aucune dif­fé­rence entre télé­vi­sion et ciné­ma, qu’ils devaient se fondre par­fai­te­ment, la ques­tion me semble un peu dif­fé­rente. Cer­tains de ses films pour la télé­vi­sion ont été dis­tri­bués en salles, comme La Prise de pou­voir par Louis XIV, et Agos­ti­no d’Hippone. Ce sont de mer­veilleux films his­to­riques, ou l’apothéose du télé­film… selon le point de vue qu’on adopte !

VP : Un détail à rajou­ter peut-être : nous mon­trons quand même ce qui consti­tue une frac­tion minime d’une pro­duc­tion télé­vi­suelle annuelle — quand par ailleurs cer­tains d’entre les films qui nous inté­ressent n’ont même pas eu à la fin un pas­sage télé­vi­suel. La rela­tion entre ciné­ma et télé était en effet radi­ca­le­ment uto­pique : des Auteurs de ciné­ma met­taient à pro­fit leur pen­sé et leur habi­li­té, et les télés d’État payaient la fac­ture. Et ce, pour le seul béné­fice intel­lec­tuel — et par là social — des télé­spec­ta­teurs… rien à vendre, rien à ache­ter : en effet cela ne pou­vait pas durer…

CT : La télé­vi­sion était-elle selon ces cinéastes un outil uto­pique ? Ou n’est ce pas plu­tôt la télé­vi­sion en tant que struc­ture admi­nis­tra­tif obéis­sant à d’autres contin­gences, qui a ren­du les pro­duc­tions de ces cinéastes utopiques ?

KB/VP : L’aspect uto­pique est très clair chez Ros­sel­li­ni. Il était conscient de deman­der beau­coup des télé­spec­ta­teurs et de se battre contre une logique de masse impla­cable, qui n’était/est pas seule­ment celle de la télé­vi­sion, mais aus­si de la presse, de la radio, et… du ciné­ma. C’est un idéal qu’il se fixe, et dont il essaie de convaincre les autres.

Nous avons pen­sé que la même démarche mène d’une cer­taine façon Ruiz, Roh­mer et Godard : édu­quer, faire réflé­chir, pro­po­ser d’autres voies. Il y a des échos très forts entre leurs pro­duc­tions, par exemple autour d’une réflexion sur l’histoire (l’Histoire comme dirait l’autre), sa repré­sen­ta­tion, son sens, etc.

Nous croyons que l’aspect uto­pique de leurs pro­duc­tions nous appa­raît aujourd’hui d’autant plus fort en rai­son de la dis­tance his­to­rique, et du fait que nous savons que la télé­vi­sion semble avoir pour de bon adop­té des for­mats très défi­nis, qui laissent peu de place a prio­ri à la nou­veau­té et à l’expérimentation, quoique cer­tains y arrivent. On ne peut pas s’empêcher de se dire que ce serait impos­sible aujourd’hui.

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France tour deux enfants (Godard-Mié­ville)

À la fois, on pour­rait aus­si ren­ver­ser la ques­tion et se deman­der si ce ne sont pas les struc­tures admi­nis­tra­tives même de la télé­vi­sion qui ont ren­du pos­sible ces pro­jets, comme s’ils étaient sa tâche aveugle. C’est du point de vue de leur dif­fu­sion, plu­tôt que de leur pro­duc­tion, qu’ils ont par­fois posé problème.

CT : À votre avis, en quoi cette pro­gram­ma­tion éclaire t‑elle un pas­sage, sinon même une his­toire de la télé­vi­sion, avant que celle ci ne soit entiè­re­ment inves­tie par « l’entertainement busi­ness » ? C’est éga­le­ment à cette période que cer­tains artistes dont Buren qui ont choi­si les jour­naux télé des vingt heures afin d’expérimenter cer­taines de leur créa­tion, en rem­pla­çant le décor ini­tial par des bandes multicolores ?

KB : C’est peut être sur­tout « la pointe de l’iceberg » d’une his­toire des échanges entre télé­vi­sion et ciné­ma. Nous avons inclus quatre cinéastes, pour des ques­tions de cohé­rence et d’échos entre leurs pro­duc­tions, mais nous aurions pu tout aus­si bien inclure dans cette idée « uto­pique », comme le disait plus tôt Viva, Ken Loach, Chris Mar­ker, Fass­bin­der, Hans-Jür­gen Syber­berg, Pierre Per­rault, etc. De façon plus large, Renoir a aus­si fait de la télé­vi­sion, Welles, Ray, en plus de tous les cinéastes qui aujourd’hui font de la télé­vi­sion, ou en viennent : Lynch, Von Trier, Kita­no, etc.

VP : Pour le lien avec Daniel Buren je ne vois pas trop. Je crois que ses bandes colo­rées qui bouffent le décor des nou­velles télé­vi­sées sont des années 1980, mais mis à part la chro­no­lo­gie (Ros­sel­li­ni com­mence bien aux années 60), là où nos cinéastes créent une uto­pie : venez pen­ser et apprendre tous ensemble… Buren me semble jouer sur la corde de la dis­to­pie : il n’y a rien à voir ici !

CT : Pou­vez nous expli­quer l’expression de « télé­vi­sion d’auteur », ren­voie-t-elle au « ciné­ma d’auteur », ou bien s’inspire t‑elle de la redé­fi­ni­tion du sta­tut d’auteur par les artistes (pho­to­graphes et vidéastes) qui tra­vaillent à la limite du docu­men­taire et de la fiction ?

KB/VP : Nous avons pris un peu de liber­té avec une décla­ra­tion de Ruiz dans les Cahiers du ciné­ma qui disait qu’à l’époque, il était consi­dé­ré comme un auteur à la télé­vi­sion, au sens où il avait une véri­table liber­té de créa­tion. Il fai­sait aus­si réfé­rence à la volon­té de l’INA, entre autre, d’amener des auteurs de ciné­ma à tra­vailler pour la télé, au fait qu’il s’est retrou­vé à la télé parce qu’il était un auteur de ciné­ma. Nous avons adop­té ce titre un peu comme une pro­vo­ca­tion, puisque c’est très rare de pen­ser à la télé­vi­sion de cette façon.

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France tour deux enfants (Godard-Mié­ville)

Le cycle « télé-uto­pie » a été réa­li­sé avec le sou­tien de la Chaire René Malo (École des médias, Uni­ver­si­té du Qué­bec à Mont­réal), de l’institut cultu­rel ita­lien de Mont­réal et l’Institut natio­nal de l’audiovisuel (INA), de Hors champ et du Dépar­te­ment d’Histoire de l’art et d’études ciné­ma­to­gra­phiques de l’Université de Montréal.

Source de l’ar­ticle :hor­schamp