Journée européenne d’action contre la commercialisation de la santé, Rassemblement devant le lobby pharmaceutique EFPIA.
Le report des soins
Une part croissante de la population européenne est contrainte de reporter des soins, voire même d’y renoncer purement et simplement.
On parle de renoncement-barrière quand la personne doit faire face à un environnement de contraintes qui ne lui permet pas d’accéder au soin nécessaire ou désiré. Et c’est le cas quand le système de protection sociale, et d’organisation de l’offre des soins n’est plus accessible à tous, notamment pour des raisons budgétaires.
Les raisons financières du renoncement aux soins sont constituées d’un faisceau d’éléments qui se combinent souvent entre eux : le prix du soin, son niveau de remboursement et la part personnelle du patient (reste à charge/out of pocket) qui varient en fonction du type de protection sociale et de la qualité de la couverture, le niveau de revenus, la disponibilité financière du moment, en particulier quand l’individu doit avancer les frais. Cette dernière est en lien avec les ressources (revenus, réserves, allocations) et les autres dépenses non médicales, notamment les dépenses incompressibles. Dans le cas de renoncement pour raisons financières, les individus renoncent le plus souvent à des soins précis, avec une fréquence variable selon leur situation sociale.
Pour les populations précaires, les renoncements portent fréquemment sur des soins médicalement nécessaires : diagnostics non faits ou tardivement, maladies chroniques non prises en charge qui peuvent évoluer vers des complications (diabète, hypertension artérielle, malformation cardiaque, etc.)
La complexité des systèmes de soins et des remboursements, la méconnaissance des droits sociaux, la restriction des remboursements des prestations et des médicaments, les suppléments d’honoraires non annoncés… sont autant de facteurs qui amplifient le report des soins.
Les réformes de l’organisation des soins (restructurations hospitalières par exemples) ainsi que la raréfaction de l’offre dans des zones rurales diminuent encore l’accessibilité, principalement pour les populations précarisées qui sont contraintes au report ou renoncement aux soins.
Source : irdes
Les assurances privées
un système de soins de santé accessible à ses citoyens, ce droit est de plus en plus menacé par, d’un côté, les coupes budgétaires imposées par les mesures d’austérité et instaurées par les États, et de l’autre côté, les intérêts du marché des sociétés d’assurances et les services de santé commerciaux.
Les citoyens se trouvent de plus en plus dans une position d’inaccessibilité aux soins de santé due aux barrières financières (par exemple, la part non remboursée qui augmente), due aux sociétés d’assurances privées qui entrent en jeu pour offrir des protections individuelles qui ne sont plus prises en charge par l’État. Ceci peut paraître une solution valable pour garantir l’accès aux soins et protéger les individus et familles des dépenses catastrophique pour leurs soins de santé. Mais nous connaissons tous l’expérience des États-Unis où les assurances privées pratiquent des « plafonds ». Les patients doivent payer avant d’être éligibles pour des remboursements ou même pour des frais qui dépassent le plafond.
Par ailleurs, les assurances privées créent les inégalités, tandis que les systèmes solidaires mettent en place des mécanismes de redistribution (par exemple, pour les systèmes basés sur la taxation dans laquelle les riches payent plus tandis que les services doivent être plus accessible pour les pauvres). Avec les assurances privées c’est celui qui paie le plus qui reçoit de meilleurs services. Ceci est un renversement complet des systèmes basés sur la solidarité, et de l’idée que la santé est un bien commun, vers une vision où la santé est une marchandise négociable entre des individus et les fournisseurs sur un marché commercial.
Les complexes médico-pharmaceutiques
Le lobbying pharmaceutique déclare dépenser annuellement au moins 40 millions € au niveau européen, soit 15 fois plus que le lobbying pour la santé publique de la société civile. Les marges bénéficiaires des groupes pharmaceutiques, près de 20%, comptent parmi les plus élevées de toutes les industries.
C’est le marketing, autant que le lobbying, au niveau européen et des états membres de l’Union qui fait que le citoyen achète ses médicaments à des prix de plus en plus élevés. C’est donc aux patients et aux systèmes de santé nationaux de payer les prix imposés par les multinationales pharmaceutiques, une politique soutenue par nos gouvernement !
Comment ?
Nos gouvernements ont mis en place un modèle de recherche et de développement qui permet à une société pharmaceutique de fixer les prix grâce au système de brevets, sans être dans l’obligation de tenir compte du coût de développement et de production réel d’un médicament sous brevet.
En même temps, les lobby pharmaceutiques cherchent à influencer les réglementations européennes sous couverture d’une représentation de conseillers-experts, avec peu de transparence sur les rencontres et leur impact.
Une initiative publique-privé (IMI) a été initiée entre les institutions européennes et l’industrie pharmaceutique. 2,6 millions € de l’argent des contribuables européens ont été, en grande partie, versés à l’EFPIA (European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations) pour la recherche et le développement des médicaments. L’EFPIA, qui regroupe les plus grandes multinationales pharmaceutiques, est le plus grand groupe de lobby pharmaceutique dans l’Union Européenne.
Pour fixer le prix d’un médicament après son développement, des conventions ultra secrètes sont conclues entre un État et une société pharmaceutique. Ce système opaque permet à l’industrie de ne pas réduire le prix public d’un produit dans le pays où la convention est signée, et donc de ne pas mettre en péril des négociations de prix dans d’autres pays.
Les citoyens n’ont aucun contrôle, ni aucune information, sur la qualité et le coût des médicaments qui leur sont prescrits. En même temps, partout en Europe, on impose des économies qui pèsent sur les professionnels de la santé et sur les patients pour compenser les marges toujours plus élevées laissées aux firmes pharmaceutiques.
Il est nécessaire de mettre en place une meilleure collaboration entre les états membres et les institutions européennes pour évaluer la valeur d’un nouveau médicament, négocier les tarifs et accéder à toutes les informations utiles (coûts qui sous-tendent les prix, informations cliniques). Il s’agit de mieux déterminer le caractère innovant et le besoin sociétal et thérapeutique par rapport aux alternatives déjà disponibles sur le marché des médicaments (médicaments génériques et bio similaires par exemple).
L’externalisation ou la sous-traitance
Dans les hôpitaux, les fonctions logistiques ou de soutien telles que la cuisine, la stérilisation, la blanchisserie, l’entretien, la maintenance technique, l’informatique… sont progressivement sous-traités à des firmes privées.
Les activités techniques comme la biologie clinique ou les services d’imagerie médicale font aussi l’objet d’une externalisation par regroupement d’activités.
La raison couramment évoquée est de permettre des investissements coûteux. Mais on constate un glissement vers le privé commercial, où l’objet social premier de l’activité « santé » n’a plus sa place.
Les logiques marchandes se déploient largement avec un souci de rentabilité immédiate.
On assiste à l’imposition de règles bien déterminées : comprimer les coûts de personnel au maximum en augmentant notamment leur polyvalence, réduire les frais liés aux matières premières même si la qualité n’est plus présente.
Le patient est soi-disant mis au coeur des préoccupations, mais les gestionnaires se préoccupent bien peu de la qualité des prestations, de la nourriture, l’environnement.
Les économies peuvent aussi avoir des répercussions au niveau de la sécurité et de la santé des travailleurs.
Plus d’infos : Réseau européen contre la privatisation et la commercialisation de la santé et de la protection sociale