Depuis deux mois en Équateur, la population se révolte contre le gouvernement de Daniel Noboa et déclare une grève nationale illimitée (le « Paro Nacional »). A Bruxelles, la communauté indigène équatorienne se rassemble pour alerter sur la situation de leur pays d’origine.
Le lundi 22 septembre 2025, le « Paro Nacional », une grève nationale et illimitée, a débuté. Elle est menée par la plus grande organisation indigène du pays, soutenue par d’autres associations issues de diverses provinces. Cette mobilisation fait suite à l’annonce du gouvernement de Daniel Noboa d’éliminer la subvention du diesel, une mesure dictée par le FMI qui affecte l’ensemble de l’économie, en particulier les populations les plus précarisées. Cette décision intervient dans un contexte de forte hausse de la pauvreté et de la criminalité, après huit années de gouvernements néolibéraux.
La grève s’oppose également au projet de modification de la Constitution actuelle du pays. La Constitution équatorienne, pionnière dans le monde, est en effet la première à reconnaître les droits de la nature en tant que sujet de droit. Elle garantit aussi des droits fondamentaux tels que l’autodétermination des peuples indigènes, ainsi que l’accès à l’éducation et à la santé.En réponse au mouvement, le gouvernement a décrété l’état d’urgence dans dix provinces, instauré des couvre-feux et déployé massivement l’armée, entraînant une répression d’une violence inédite, notamment dans la province d’Imbabura. Le pouvoir en place n’a pas hésité à qualifier les manifestants de « terroristes », tout en menant un profilage racial explicite visant les populations indigènes et racisées, souvent les premières touchées par les politiques et la violence systémique.
Pendant ce temps, face à l’explosion de l’insécurité et de la criminalité liées au narcotrafic (l’Équateur étant devenu en quelques années le pays le plus violent de la région, avec un homicide par heure), l’État reste absent et concentre sa répression sur sa propre population. Les médias locaux rapportent des cas de soldats tirant de manière indiscriminée, avec des balles réelles et du gaz lacrymogène, sur des citoyens, y compris des enfants et des personnes âgées. Un climat de terreur s’est installé, aggravé par la militarisation des territoires kichwas, les coupures d’électricité, l’interruption des réseaux téléphoniques et des signaux de médias communautaires. Des témoignages font également état de soldats pénétrant dans les maisons et les hôpitaux pour arrêter ou faire disparaître des blessés.
Après plus d’un mois de grève générale, la répression a fait trois morts parmi les manifestants indigènes, des centaines d’arrestations et près de 500 blessés.
Face à cette situation, la communauté kichwa et migrante équatorienne en Belgique, ainsi que des communautés kichwas venues de toute l’Europe, se sont mobilisées le 22 octobre devant le Parlement européen à Bruxelles. Il s’agissait de leur quatrième manifestation dans la capitale belge, organisée pour dénoncer la criminalisation du droit à la protestation et des peuples autochtones, réclamer justice pour les victimes de la répression du gouvernement de Noboa, et rejeter sa nouvelle Constitution néolibérale qui s’attaque à la nature et aux droits sociaux.
Le 16 novembre 2025, les Équatoriens seront à nouveau appelés aux urnes pour décider de leur avenir. Parmi les questions soumises au vote figure l’installation de bases étrangères dans le pays, la procédure d’une nouvelle Constitution, la réduction du nombre députés de l’Assemblée Nationale et la fin du financement publique des partis politiques en période d’élections.
