Congo : Brisons le silence !

Des acteurs du monde cultu­rel et syn­di­cal fran­çais appellent Fran­çois Hol­lande à sor­tir du silence assour­dis­sant sur la situa­tion actuelle au Congo : attaques cri­mi­nelles contre les popu­la­tions civiles en Répu­blique du Congo. Les Fran­çais doivent savoir. Le gou­ver­ne­ment doit sor­tir du silence.

Des acteurs du monde cultu­rel et syn­di­cal fran­çais appellent Fran­çois Hol­lande à sor­tir du silence assour­dis­sant sur la situa­tion actuelle au Congo : attaques cri­mi­nelles contre les popu­la­tions civiles en Répu­blique du Congo. Les Fran­çais doivent savoir. Le gou­ver­ne­ment doit sor­tir du silence.

Mon­sieur le Pré­sident de la République,

Le 4 avril 2016, fal­si­fiant comme d’habitude le résul­tat des urnes, la Cour consti­tu­tion­nelle de la Répu­blique du Congo, aux ordres, valide la réélec­tion à la Pré­si­dence de la Répu­blique du can­di­dat Denis Sas­sou Ngues­so, au pou­voir depuis 32 ans. Pré­pa­ré à ce coup d’État élec­to­ral, cette fois, le peuple congo­lais est prêt à ampli­fier sa résis­tance paci­fique et à pour­suivre sa déso­béis­sance civile. La réponse du sys­tème mili­ta­ro-poli­tique congo­lais est éga­le­ment prête depuis des mois. Elle consiste à dési­gner le sud de la ville et du PAYS comme foyers d’invisibles et insai­sis­sables enne­mis intérieurs.

Dans la nuit du 4 avril 2016, les tirs à l’arme lourde ciblant les popu­la­tions civiles ont déjà com­men­cé sur les quar­tiers sud de Braz­za­ville. Quelques heures plus tard, les habi­tants sont chas­sés de leur mai­son et dépla­cés au nord de la ville. Le len­de­main débutent les bom­bar­de­ments des vil­lages du Pool (sud du Congo). Les pre­mières images de cadavres com­mencent à cir­cu­ler sur les réseaux sociaux.

Aupa­ra­vant, le Pré­sident Denis Sas­sou Ngues­so est ren­tré d’une tour­née à l’étranger où, sans doute, il est allé véri­fier si ses vieilles alliances en Europe et en Afrique vont une nou­velle fois le « cou­vrir » en échange, pour les uns, d’une soli­da­ri­té entre tyrans et, pour les autres, d’un accès faci­li­té aux immenses richesses locales (pétrole, ura­nium, etc.) dont bien peu de Congo­lais pro­fitent. Sans doute est-il allé véri­fier une nou­velle fois, à l’extérieur, sur qui comp­ter pour accom­pa­gner sa sur­vie poli­tique à l’intérieur, et conser­ver le pou­voir par tous les moyens. En arrê­tant les oppo­sants, en tor­tu­rant, en exé­cu­tant ; en oppo­sant les régions congo­laises entre elles ; en agi­tant le spectre du retour des guerres civiles de 1993/97/98, qu’il avait lui-même pla­ni­fiées, et pour la res­pon­sa­bi­li­té des­quelles il a pour l’instant échap­pé aux condam­na­tions de crimes contre l’humanité ; en encou­ra­geant le dys­fonc­tion­ne­ment et la cor­rup­tion de l’État ; en mani­pu­lant l’information ou en ache­tant le silence au Congo et sur la scène inter­na­tio­nale ; en armant ses propres milices, soi-disant aux ordres de nébu­leux enne­mis de la « Patrie » pour ter­ro­ri­ser les corps, les esprits, le pays entier, mettre ain­si en scène son retour pro­vi­den­tiel et appa­raître, encore une fois, comme l’homme du recours, le père de la Nation.

Pour­tant quelque chose a chan­gé à Braz­za­ville. Du nord au sud du pays, le peuple congo­lais n’est plus mani­pu­lable. La jeu­nesse congo­laise est des­cen­due dans la rue à l’automne der­nier. Mas­si­ve­ment, au nord comme au sud, les Congo­lais ont boy­cot­té le réfé­ren­dum d’octobre 2015 qui VISAIT à modi­fier la consti­tu­tion pour pro­lon­ger encore les 32 années de pou­voir du Pré­sident Denis Sas­sou Ngues­so et lui garan­tir l’impunité inter­na­tio­nale au cas où les choses tour­ne­raient mal pour lui.

Mas­si­ve­ment, les élec­teurs ont ensuite voté pour l’opposition aux élec­tions pré­si­den­tielles le 20 mars 2016. Celles-ci se sont dérou­lées à huis CLOS, les auto­ri­tés ayant cou­pé toutes les com­mu­ni­ca­tions à l’intérieur du Congo et vers le reste du monde durant quatre jours ; d’où cette invrai­sem­blable annonce des résul­tats au milieu de la nuit du 24 mars — le Pré­sident ne s’accordant cette fois ci « que » 60% des suffrages !

Mas­si­ve­ment, pour contes­ter cette mas­ca­rade, les Congo­lais ont alors répon­du au mot d’ordre paci­fique de déso­béis­sance civile durant la jour­née ville morte le 29 mars.

La répé­ti­tion aujourd’hui d’un scé­na­rio cau­che­mar­desque ne doit rien à la fata­li­té, mais davan­tage au lais­ser-faire, au lais­ser-dire. Cela ne sert à rien de plaindre les Congo­lais. Nous devons suivre leur exemple de cou­rage et de résis­tance. Dire et redire que c’est au peuple congo­lais, et à lui seul, de bâtir un État de droit. Pas aux affai­ristes de tous bords, pas aux mili­taires, pas aux gou­ver­ne­ments étran­gers com­plices ou concur­rents éco­no­miques et stra­té­giques dans la région. Il en va du droit des peuples à dis­po­ser d’eux-mêmes.

La France est le pre­mier par­te­naire éco­no­mique du Congo. Mon­sieur le Pré­sident, vous devez sor­tir de votre silence. Le PAYS doit ces­ser urgem­ment ses rela­tions mafieuses et mili­taires avec la dic­ta­ture en place.

Au nom de la soli­da­ri­té entre les peuples, nous deman­dons l’arrêt immé­diat des tirs sur les civils, la libé­ra­tion des oppo­sants poli­tiques, la non-recon­nais­sance par la France et la com­mu­nau­té inter­na­tio­nale des résul­tats élec­to­raux, le retour de la presse inter­na­tio­nale sur le ter­rain et la tenue de nou­velles élec­tions pré­si­den­tielles en pré­sence d’observateurs inter­na­tio­naux impartiaux.

Jean-Paul Delore (met­teur en scène), Dieu­don­né Nian­gou­na (auteur), Cathe­rine Laval (cos­tu­mière, syn­di­ca­liste), Laë­ti­tia Aja­no­hun (auteure)

Pre­miers signataires :

Jean-Loup Amselle (direc­teur d’études à l’EHESS)
Benoît Awa­zi Mbam­bi Kun­gua (phi­lo­sophe, pré­sident du Cerclecad)
Valé­rie Baran (direc­trice du Tar­mac — scène inter­na­tio­nale francophone)
Julien Bayou (conseiller régio­nal, porte-parole d’EE-LV)
Dela­val­let Bidie­fo­no (cho­ré­graphe)
Sébas­tien Bois­seau (musi­cien)
Syl­vie Bos­ser (ensei­gnante-cher­cheuse)
Oli­vier Bost (musi­cien)
Patrick Braoue­zec (ancien dépu­té-maire de Saint-Denis, pré­sident de Plaine Commune)
Syl­vie Coma (jour­na­liste)
Phi­lippe Cor­cuff (maître de confé­rences à l’IEP de Lyon)
Léa Cou­que­berg (char­gée de PRODUCTION)
Claire Delore (ortho­pho­niste, syndicaliste)
Zineb El Rha­zoui (jour­na­liste)
Anne Feuillère (jour­na­liste)
Sean Hart (vidéaste)
Tina Hol­lard et Hafid Chouarf (asso­cia­tion Globe Trot’Art)
Laurent Léger (jour­na­liste)
Emi­lie Leloup (admi­nis­tra­trice et productrice)
Valé­rie Man­teau (édi­trice, syndicaliste)
Nico­las Mar­tin-Gra­nel (cher­cheur asso­cié à l’ITEM CNRS-ENS)
Ber­nard Mathon­nat (pré­sident des Fran­cas en Île-de-France, direc­teur du fes­ti­val théâ­tral du Val‑d’Oise)
Alexandre Meyer (musi­cien)
Fré­dé­ric Minière (musi­cien)
Etienne Minoun­gou (comé­dien)
Mathieu Mon­ta­nier (comé­dien)
Alexandre Neu­mann (pro­fes­seur, uni­ver­si­té Paris‑8)
Julie Peghi­ni (anthro­po­logue, uni­ver­si­té Paris‑8)
Oli­vier Pel­le­tier (ingé­nieur du son)
Patrick Pel­loux (méde­cin urgen­tiste, syndicaliste)
Guillaume Pons (éclai­ra­giste)
Jacques Pornon
Agnès Tri­coire (avo­cate à la Cour)
Nadine Wano­no (cher­cheuse)

Pour signer la pétition :
https://www.change.org/p/fran%C3%A7ois-hollande-urgence-congo-le-gouvernement-doit-sortir-du-silence?recruiter=333011299&utm_source=share_petition&utm_medium=copylink