Les militants pour un autre monde se sont donné rendez-vous, hier, au Brésil pour débattre de la crise capitaliste, la justice sociale et environnementale en vue du forum des peuples qui se tiendra en juin en parallèle du sommet de Rio + 20.
Il y a Davos, en Suisse, et son Forum économique qui réunit tout le gratin politico-financier de la planète. Et puis, il y a Porto Alegre, au Brésil, qui, hier, a assisté à l’arrivée des altermondialistes, lors d’une manifestation dans les rues de la ville, berceau de la démocratie participative, contre la crise capitaliste et en faveur de la justice sociale et environnementale. Douze ans après le premier forum social mondial (FSM), les organisateurs attendaient 60 000 participants pour cette édition thématique conçue comme une étape préparatoire au sommet des peuples, qui se déroulera du 15 au 23 juin, parallèlement au sommet de Rio+20. Outre la présence annoncée de figures fondatrices des FSM – les économistes portugais et brésilien Boaventura de Sousa Santos et Emir Sader, le journaliste Ignacio Ramonet, le dirigeant de l’emblématique Mouvement des sans-terre (MST) du Brésil, Joao Pedro Stédile, ou encore les chanteurs Manu Chao et Gilberto Gil –, le rendez-vous compte sur celle des acteurs des révoltes aux Maghreb et Machrek, ainsi que des mouvements de résistance au néolibéralisme qui ont éclaté l’an passé : les Occupy Wall Street, les « Indignados »…
La crise du néolibéralisme
Dans un continent travaillé par des avancées sociales notables depuis l’arrivée au pouvoir de la gauche et du centre gauche, il y a plus d’une décennie, le FSM compte également sur la venue de la présidente de la puissance brésilienne, Dilma Rousseff. La rencontre devrait s’articuler autour des trois grandes crises transversales, estime Gustave Massiah, représentant du Centre de recherche et d’information pour le développement (Crid) au sein du conseil international du FSM. « La crise du néolibéralisme, attestée par la crise financière et la défaite idéologique et politique du néolibéralisme, explique-t-il. Le capitalisme lui-même est contesté, même si ce sont les oligarchies de ce système qui continuent de contrôler la situation. Mais plus personne n’ose dire qu’il faut laisser faire les marchés. Cette crise du capitalisme est aussi attestée par la crise écologique, qui interdit d’imaginer une sortie de crise du productivisme, qui interdit une redistribution fondée sur un mode de production et de consommation en faveur de l’humanité. Enfin, ajoute le responsable, nous sommes confrontés à une crise de civilisation. »
l’économie verte
L’ensemble des ateliers, qui s’achèvera le 29 janvier, devrait également s’atteler à désarticuler le concept « d’économie verte », au centre des prochaines discussions sur le climat et le développement durable promues par l’Organisation des Nations unies dans le cadre du sommet de Rio en juin.
« Le Forum social mondial est né pour contester l’arrogance des néolibéraux du Forum économique mondial de Davos. Nous avions dit clairement que nous voulions un autre monde. Maintenant, ce dont nous avons besoin, c’est de construire les solutions, les chemins, les alternatives », a expliqué à l’AFP Candido Grzybowski, l’un des coordinateurs du FSM. La remarque n’est en effet pas innocente. Paradoxalement, le mouvement altermondialiste a perdu en vitesse alors que ce qu’il dénonçait – le système – est dans la ligne de mire de contestations mondiales et d’organisations sociales et citoyennes locales. Ses faiblesses – la concrétisation de ses contestations en termes de changement politique – restent au cœur des débats, même si certains de ses organisateurs s’en défendent. Entre le sommet des peuples et les forums régionaux, Porto Alegre est toujours à la croisée des chemins.
De nouveaux acteurs accueillis
Candido Grzybowski, sociologue brésilien, un des fondateurs et coordinateurs du Forum social mondial, a affirmé que le « FSM est né pour contester l’arrogance des néolibéraux du Forum économique mondial de Davos », réunissant les dirigeants des pays riches. Le FSM accueille les mouvements surgis dans le monde cette année : le printemps arabe, Occupy Wall Street, les Indignés et les étudiants du Chili. Pour Grzybowski, « ce sont des mouvements qui ne sont pas marqués par la tradition de la gauche classique. Ils sont surprenants parce qu’ils ont eu le courage de sortir dans la rue pour faire face » au système qu’ils critiquent.
Cathy Ceïbe
Source de l’article : l’Humanité
Le FSM 2012