Notre société est rongée par un mal qui la sape : l’obsession de classer les personnes. C’est dans cet esprit que nous avons marché ce soir à Gand, à la mémoire d’Ihsane Jarfi, victime des étiquetages meurtriers.
Ce vendredi, à l’appel de la Fondation Ihsane Jarfi, Arc-en-ciel Wallonie a défilé à Gand lors de la Marche contre l’exclusion et la violence.
Une semaine après la Belgian Pride, qui mettait l’accent sur les droits des personnes trans et la nécessaire abrogation de la loi indigne qui condamne à la psychiatrisation et à la stérilisation celles et ceux qui demandent à être reconnu∙e∙s dans le genre qui leur correspond, nous avons rebattu le pavé pour appeler à plus de ponts et de solidarité entre les êtres humains.
Notre société est rongée par un mal qui la sape : l’obsession de classer les personnes. L’obsession du genre est partout. Quelle est la première question que l’on pose à une femme qui annonce sa grossesse ? Cette obsession tue : elle est la racine du sexisme et de l’homophobie. Il faut absolument développer les actions de déconstruction des stéréotypes de genre, en particulier auprès des jeunes enfants qui sont les cibles privilégiées des matraquages genrés, qu’ils viennent de la publicité ou, pire encore, de notre enseignement. La proposition de décret qui vient d’être déposée au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, visant à expurger le sexisme des manuels scolaires, est une initiative que nous saluons et qui témoigne d’un éveil des consciences qui nous réjouit.
Aujourd’hui, comme samedi dernier, nous célébrons la diversité. Que cette célébration ne masque pas le fait que cette obsession de classification des êtres humains est profondément implantée dans le monde LGBTI. Visitez les « quartiers gays » de nos villes, voyez les différentes chapelles regroupant des adeptes clonés, sélectionnés par des applications qui permettent de trier et d’exclure sur base de l’âge, du tour de taille, de la pilosité ou de la couleur de peau. Assez du racisme, du sexisme et de la transphobie qui rampe dans le milieu gay ! Assez de tous ces parvenus pour lesquels notre mouvement se bat depuis vingt ans et qui, une fois leur petit confort assuré, se renferment sur leurs droits qu’ils croient naïvement acquis.
Nos responsables politiques doivent montrer l’exemple. L’associatif LGBTI ne sert pas à obtenir le renforcement de privilèges d’hommes blancs aisés. Nos associations doivent pourtant régulièrement faire le constat qu’il reste nettement plus difficile de faire financer des projets qui visent spécifiquement à soutenir les publics les plus discriminés, tels que les réfugiés LGBTI.
Il n’y a pas que l’argent. Là où nous attendons aussi que les politiques montrent l’exemple, c’est par la prise de position. À l’heure où des fanatiques religieux s’attaquent directement à nos libertés, les personnes qui exercent des responsabilités ont le devoir de dénoncer les amalgames, de soutenir la cohésion sociale et d’apaiser les peurs. C’est dans cet esprit que nous avons marché ce soir à Gand, à la mémoire d’Ihsane Jarfi, victime des étiquetages meurtriers.
Jean Louis Verbruggen, président d’Arc-en-ciel Wallonie