Tariq Alí : L’Amérique Latine est le seul endroit où la démocratie fonctionne

07/31/2012, Tariq Alí, cinéaste pakistanais/ Eduardo Flores-Andes Quito.

Tariq Alí, cinéaste pakistanais/ Eduar­do Flores-Andes
Qui­to, 31 juil (Andes).- Tariq Alí croit que le capi­ta­lisme a mené l’existence de dif­fé­rents groupes sociaux aux extrêmes, et qu’une mon­dia­li­sa­tion de la démo­cra­tie s’impose. Pour démon­trer cela, il a ana­ly­sé en détail les expres­sions des pro­tes­ta­tions contre le néo­li­bé­ra­lisme à niveau mondial.

L’enseignant et cinéaste pakis­ta­nais fait une ana­lyse sur l’Amérique Latine, où il dit que « l’Amérique Latine est le seul endroit sur Terre où la démo­cra­tie fonc­tionne, vu que les gou­ver­ne­ments pro­gres­sistes vont plus loin dans les droits et les liber­tés pour la popu­la­tion, ce sont des faits et non pas des déri­va­tions d’un dis­cours sémantique ».

Tel est le cas du concept de Bon Vivre (Sumak Kau­say, en Qui­chua, langue indi­gène d’Équateur) issu de l’Équateur, face auquel il pré­cise qu’il ne faut pas se faire trop d’illusions, car « le Bon Vivre n’est pas du goût [de l’empire] ; cela ne fonc­tionne pas avec le modèle des oli­gar­chies ». Ces pro­pos sont rap­por­tés d’un entre­tien qu’il a accor­dé à l’Agence d’Information Andes.

« Il faut leur ôter [aux médias com­mer­ciaux à la droite poli­tique] la pro­prié­té du concept de la liber­té, et les Boli­va­riens doivent pou­voir dire ouver­te­ment que notre peuple a plus de liber­té que les autres », a com­men­té le Pakis­ta­nais, his­to­rien, réa­li­sa­teur de ciné­ma et écri­vain, dont la pen­sée de gauche rafraî­chit les notions tra­di­tion­nelles, en enquê­tant sur le rôle du capi­ta­lisme dans le contexte actuel.

« Les droits de l’Homme ne les inté­resse pas, ils ordonnent au monde de regar­der la télé­vi­sion », dit-il en réflé­chis­sant sur la démo­cra­tie : « le capi­ta­lisme et la démo­cra­tie sont en train de deve­nir incom­pa­tibles », et de consi­dé­rer qu’aucun gou­ver­ne­ment d’Europe ou des Etats-Unis ait fait quelque chose pour son peuple.

« La men­ta­li­té néo­li­bé­rale dit : don­nons la déci­sion au mar­ché, mais ils se servent de l’État pour aider les riches ».

Pour cet intel­lec­tuel de gauche, auteur de Bush à Baby­lone : la reco­lo­ni­sa­tion de l’Irak (2004), les Etats-Unis ont des gou­ver­ne­ments très sem­blables entre démo­crates et répu­bli­cains, ce qui est selon lui une situa­tion poli­tique de « Centre extrémiste ».

« Dans les faits, Oba­ma a la même poli­tique que Bush » com­mente-t-il, en ajou­tant que les indi­gnés en Espagne et aux Etats-Unis « haïssent les politiques ».

Il note tou­te­fois qu’en Amé­rique Latine, la démo­cra­tie fonc­tionne réel­le­ment : « en géné­ral, la région est en plein chan­ge­ment ; l’Amérique du Sud a reje­té la pre­mière le néo­li­bé­ra­lisme, qui n’est pas reje­té aux Etats-Unis ni en Europe ».

Par ailleurs, pour celui qui était autre­fois le col­la­bo­ra­teur de The Inter­na­tio­nal Mar­xist des Etats-Unis, « au Mexique, on ne laisse pas la démo­cra­tie s’implanter, pareil en Colom­bie, et tout par­ti­cu­liè­re­ment avec Uribe ».

Par la suite, il a résu­mé la crise vécue par le sys­tème éco­no­mique et social euro­péen, et se montre très inquiet car « cette crise a révé­lé que l’Allemagne est le pays le plus fort et dicte sa loi aux autres pays ».

En ce qui concerne la gauche du vieux conti­nent, il se montre en revanche quelque peu désen­chan­té : « En Grèce, il y avait plus de résis­tance quand les mou­ve­ments sociaux ont créé un mou­ve­ment poli­tique (Zyri­sa, du can­di­dat Alexis Tsi­pras) basé sur le modèle lati­no-amé­ri­cain, mais les médias ont ter­ro­ri­sé les gens. Ils leur ont dit que s’ils suivent ce jeune par­ti, ils ne rece­vront pas d’aide du reste de l’Europe, et dans ce pays, la gauche sta­li­nienne s’est employée à atta­quer Zyri­sa au lieu d’attaquer la droite ».