Souvenez-vous : le 17 mai 2018, une petite fille de 2 ans était tuée par la police lors d’une course poursuite sur l’autoroute. Depuis, son nom résonne dans toutes les mémoires : Mawda.
Si le policier qui avait tiré, le convoyeur et le conducteur ont été condamnés en 2020 et 2021, un coupable reste à juger : l’État belge. L’association Défense des Enfants International (DEI) Belgique, dont la mission est de défendre les droits des enfants, a assigné l’État belge en justice pour faire éclater la vérité sur sa responsabilité dans cette affaire et pour qu’un tel drame ne se reproduise plus jamais. 12 dysfonctionnements graves sont pointés. Le procès à lieu en audience publique les matinées les 1er et 2 décembre, et une mobilisation avec prise de parole est prévue à 8h15, avant les premières plaidoiries, le jeudi 1er décembre 2022.
Pour Mawda, et pour tous les enfants migrants
Cela a été établi par la justice : la petite Mawda a été tuée par une balle de la police. Cette police dépend de l’État belge qui pratique une politique migratoire qui, chaque jour, traite les enfants migrants comme des criminels, plutôt que comme des enfants à protéger. Ce procès met l’État belge face à ses responsabilités et pointe les conséquences dramatiques et inacceptables sa politique de « chasse aux migrants ».
L’État belge sur le banc des accusés
Dans le cadre de ce qui est devenu « l’affaire Mawda », 2 procès ont déjà eu lieu. L’un a condamné le convoyeur et le conducteur de la camionnette, en tant que passeurs, à des peines allant de 3 à 5 ans de prison (2020, Tribunal correctionnel de Liège). Lors du second, le policier qui avait tiré a écopé de 10 mois de prison avec sursis (2021, Cour d’appel de Mons). Aujourd’hui, lors d’un troisième procès, c’est l’État belge qui est sur le banc des accusés.
12 dysfonctionnements pointés du doigt
12 graves défaillances dans la gestion de cette affaire seront pointées lors du procès. Parmi celles-ci :
- Cela a été peu dit dans les médias : ce jour-là, dans la camionnette, il y avait aussi 5 autres enfants migrants qui ont été traités de manière indigne et illégale : arrêtés et maintenus en détention pendant plusieurs heures, ils ont été relâchés dans la nature sans le moindre accompagnement,
- Les nombreuses zones d’ombre lors de cette « opération Médusa », opération policière de contrôle de migrants en transit*,
- Les traitements inhumains et dégradants imposés au frère de Mawda qui avait 4 ans à l’époque, et à leurs parents, alors que Mawda était mourante (interpellation par la police, empêchement d’accompagner leur enfant dans l’ambulance, maintien en cachot pendant plusieurs heures…),
- L’absence de formation des policiers, les problèmes de communications entre patrouilles, …
- Les mensonges des policiers et du médecin légiste et du Parquet, qui ont d’emblée écarté la mort par balle et tenté de maquiller le crime en accident.
Les objectifs du procès
En plus d’être hautement symbolique, le procès vise à faire enfin éclater la vérité sur tous les manquements graves et les responsabilités de l’État dans « l’affaire Mawda » pour qu’un tel drame n’ait plus jamais lieu. DEI réclame des dommages et intérêts à l’État, en demandant avant tout que le jugement soit publié dans les médias, et que la formation des policiers aux droits des enfants devienne obligatoire, ce qui n’est pas le cas actuellement.
*Une enquête à ce sujet : ici
Image de Mawda réalisée dans le cadre de la campagne « Justice4Mawda » en 2020. L’image est utilisée avec l’accord du collectif mais l’action est organisée par Défense des Enfants international (DEI) Belgique.
En complément, cette vidéo d’explications de Benoit Van Keirsbilck et Jacques Fierens : un procès contre l’Etat belge ? (2021, 9min30)