Ce rapport indépendant dénonce les « illusions » de l’engagement franco-britannique en Libye et « l’aventurisme coupable » des puissances occidentales qui soutiennent une insurrection aux faux airs de « révolution ».
Libye : un avenir incertain
Voici le compte-rendu de mission d’évaluation auprès des belligérants libyens (mai 2011), organisée à l’initiative du Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) et du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R), et avec le soutien du Forum pour la paix en Méditerranée, une délégation internationale d’experts s’est rendue tour à tour à Tripoli et en Tripolitaine (du 31 mars au 6 avril), puis à Benghazi et en Cyrénaïque (du 19 au 25 avril), afin d’évaluer la situation libyenne en toute indépendance et neutralité et de rencontrer les représentants des deux parties.
Le compte rendu informe que l’opposition est composé majoritairement de “djihadistes” et d’une minorité de “vrais démocrates”, le Conseil National de Transition reconnue par les puissances occidentales contient quatre tendances politiques dont certaines veulent réinstaurer la monarchie, un État islamique composé par des ex-figures du régime.
Ce rapport indépendant dénonce les « illusions » de l’engagement franco-britannique en Libye et « l’aventurisme coupable, voire le machiavélisme cynique » des puissances occidentales qui soutiennent une insurrection aux faux airs de « révolution ».
Fruit de ces entretiens et observations sur le terrain, le rapport de mission, sans formuler de recommandations, livre des conclusions très critiques à l’égard de la résolution 1973 des Nations unies et la « très excessive interprétation » de cette résolution faite par la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, qui ouvre implicitement la voie à une intervention terrestre, voire à l’assassinat politique.
La présence de services de renseignements aux côtés des insurgés et le recours aux unités de forces spéciales seraient un contournement manifeste des dispositions de cette résolution et relèveraient de l’ingérence. Les auteurs de ce rapport s’interrogent, par ailleurs, sur les motivations de cette intervention militaire. Selon eux, le contrôle des ressources énergétiques est au cœur des straté¬gies à l’œuvre. Les Etats-Unis voudraient ainsi renverser Kadhafi pour bouter la Chine hors du pays. L’Egypte ne verrait que des avantages à une partition du pays, qui n’a jamais accepté le rattachement de la Cyrénaïque et des réserves pétrolières à Tripoli. La France a, quant à elle, vu dans la crise libyenne l’occasion de reprendre l’initiative diplomatique.
Toujours selon TTU, « c’est le départ de l’Elysée de deux des proches conseillers de Nicolas Sarkozy et fins connaisseurs du dossier libyen – Claude Guéant au ministère de l’Intérieur et Bernard Bajolet, le coordonnateur national du renseignement, comme ambas¬sadeur en Afghanistan » qui « a ouvert une brèche à l’influence de Bernard-Henri Lévy et de l’émir du Qatar pour obtenir la reconnaissance et le soutien du Conseil national de transition (CNT). » Le rapport s’alarme de cet engagement « irréfléchi » de Paris, qui « fait le jeu de l’administration américaine, laquelle s’est bien gardée d’afficher ses objectifs et a laissé la France prendre tous les risques. »
Vous pouvez télécharger le rapport :
rapport-libye.pdf