Un rapport révèle l’emploi systématique du meurtre, de la torture… contre de présumés loyalistes de Kadhafi par les forces « rebelles » du CNT
Un rapport publié la semaine dernière par des groupes de défense des droits de l’homme au Moyen-Orient montre en détail les crimes de guerre commis par les États-Unis, l’OTAN, et leurs forces interposées « rebelles », lors de la guerre en Libye l’an dernier qui a renversé le régime du colonel Mouammar Kadhafi. Le rapport, intitulé « Report of the Independent Civil Society Fact-Finding Mission to Libya », dévoile les résultats d’une enquête menée en novembre dernier par l’Organisation arabe des droits de l’homme, le Centre palestinien pour les droits de l’homme ainsi que l’ International Legal Assistance Consortium.
Basé sur des interviews avec des victimes de crimes de guerre, des témoins et des représentants de la Libye situés à Tripoli, Zawiya, Sibrata, Khoms, Zliten, Misrata, Tawergha et Syrte, le rapport appelle à une enquête sur les attaques de zones civiles par l’OTAN, lors desquelles de nombreuses personnes auraient été tuées ou blessées. Les bombes et les missiles de l’OTAN ont entre autres été dirigés contre des écoles, des bâtiments gouvernementaux, au moins un entrepôt alimentaire et des maisons privées.
Le rapport révèle aussi l’emploi systématique du meurtre, de la torture, de l’expulsion et de l’abus contre de présumés loyalistes de Kadhafi par les forces « rebelles » du Conseil national de transition (CNT), allié de l’OTAN. Il décrit l’expulsion par la force des habitants, majoritairement noirs, de Tawergha et la persécution, qui continue à ce jour, des travailleurs migrants subsahariens par les forces alliées au CNT et à son gouvernement de transition.
Les enquêteurs font état que des prisonniers, détenus sans avoir été accusés ou subi un procès, ont été sauvagement battus à maintes reprises et que des combattants pro-Kadhafi ont été sommairement exécutés. Des témoins ont rapporté que « des meurtres inconsidérés et de vengeance, y compris le “massacre” d’anciens combattants (on leur aurait tranché la gorge) ».
Le rapport révèle ainsi le caractère frauduleux des prétextes de droits humains et de démocratie utilisés par les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne et leurs complices de l’OTAN pour mener une guerre de conquête de type colonial. Il montre clairement que la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies de mars dernier, qui a imposé à la Libye une zone d’exclusion aérienne et un embargo sur les armes pour supposément protéger les civils d’actes répressifs de Mouammar Kadhafi, a été utilisée en fait pour mener une guerre aérienne impitoyable, coordonnée avec les forces « rebelles » au sol.
Le rapport indique que peu de temps après l’éclatement de manifestations anti-Kadhafi à Benghazi et dans d’autres villes, les forces d’opposition ont pu profiter d’un entraînement donné par les forces armées occidentales et d’armes fournies par les puissances de l’OTAN et ses alliés parmi les États arabes. L’opposition populaire qui a fait éruption en février dernier, à la suite de la chute de Moubarak en Égypte, a rapidement été récupérée par les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne et leurs agents en Libye afin de déclencher une guerre civile pro-impérialiste.
Comme le mentionne le rapport, « Selon des informations de première main recueillies par la Mission, et des sources secondaires, il semble que l’OTAN aurait participé à ce que l’on pourrait qualifier d’actions offensives entreprises par les forces d’opposition, y compris, par exemple, des attaques sur des villes et villages contrôlés par les forces de Kadhafi. De même, le choix de certaines cibles, comme un entrepôt alimentaire régional, soulève de prime abord des doutes sur le rôle de telles attaques quant à la protection des civils. »
Le rapport ne rend qu’une version diffuse d’une violente attaque dont le but principal était de ramener le pays 43 ans en arrière, aux conditions qui prévalaient sous le régime du roi Idris, laquais des États-Unis et de la Grande-Bretagne, qui a donné le contrôle des ressources pétrolières du pays aux conglomérats américains et britanniques et permis aux deux puissances de maintenir d’importantes bases militaires en territoire libyen. La destruction et la tuerie de masse, qui ont abouti à la démolition de Syrte et au lynchage de Kadhafi, ont rendu l’idée, défendue par l’ONU, d’une guerre pour « les droits de l’homme » et la « protection des civils » non seulement absurde, mais surtout obscène.
Le viol de la Libye a été la réaction de l’impérialisme américain et européen aux soulèvements révolutionnaires qui ont renversé de vieux régimes pro-Occident en Tunisie et en Égypte, deux pays à la frontière de la Libye. Le but de cette guerre impérialiste était d’avoir le contrôle total des ressources en pétrole du pays, de détourner et de réprimer la croissance des luttes de la classe ouvrière à travers l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, et de porter un coup à la Chine et à la Russie, qui avaient établi d’étroites relations économiques avec le régime de Kadhafi.
La guerre a dévasté le pays. Le CNT, une coalition de dirigeants de l’ancien régime de Kadhafi, d’islamistes, dont certains qui entretiennent des liens avec Al-Qaïda, et de gens à la solde des agences de renseignement occidentales, estime lui-même que la guerre aurait fait 50 000 morts et blessé 50 000 personnes. La montée de conflits entre différentes factions au sein du CNT pourrait bien mener à l’éruption d’une guerre civile entre milices rivales.
Le week-end dernier, tandis que le président du CNT Moustafa Abdel Jalil mettait en garde contre la possibilité d’une guerre civile, un groupe exigeant la démission du gouvernement de transition a d’assaut les quartiers généraux du CNT à Benghazi. Abdel Hafiz Ghoga, vice-président du CNT, a rapidement quitté son poste.
Le rapport sur les crimes de guerre des États-Unis et de l’OTAN révèle encore une fois le rôle joué par les partis « de gauche », les intellectuels et les universitaires qui ont répété les prétextes de Washington et de l’OTAN, donnant ainsi un appui explicite ou implicite à la guerre en Libye. Il souligne que ces forces, que ce soit les sociaux-démocrates, les Verts et des ex-staliniens comme le parti La Gauche en Allemagne ou de faux radicaux comme le Nouveau Parti anticapitaliste en France et l’International Socialist Organization aux États-Unis, se sont rangées dans le camp de l’impérialisme.