Monsieur le Président Obama
Le premier septembre 2012
The White House
1600 Pennsylvania Avenue N.W.
Washington DC 20500
Monsieur le Président,
Je venais à peine de vous envoyer la « lettre du mois d’août », que j’apprenais l’inscription de Cuba sur la liste des « Etats Sponsors du Terrorisme International », par votre Département d’Etat.
En France, tous les écoliers apprennent la fable de Jean de La Fontaine « Le loup et l’agneau ». Dans cette fable, le loup accuse l’agneau de tous les maux de la terre avant de dévorer l’innocent animal. Le cynisme de votre gouvernement est comparable à celui du loup. C’est le pays que vous gouvernez, Monsieur le Président, qui détient, depuis des générations, le record absolu du terrorisme dans le monde !
Tous les mois depuis votre élection, je vous écris au nom des amis de Monein des cinq cubains Gerardo Hernández, Antonio Guerrero, Fernando González, Ramón Labañino et René González, pour vous demander leur libération.
Les Cinq ont été lourdement condamnés pour avoir lutté contre le terrorisme des Etats-Unis à l’encontre de leur pays.
Ce terrorisme d’état a tué 3 478 Cubains, et en a laissé 2099 handicapés à vie.
L’embargo maintenu contre Cuba, en dépit de la volonté de la plupart des pays d’y mettre fin, est aussi une forme de terrorisme.
Le 3 Juin 1993, un de vos compatriotes, le docteur Benjamin Spock, célèbre pédiatre concluait à son retour de Cuba, un article du New-York Times en ces termes : « Que doit-on penser d’un embargo qui interdit nourriture et médicaments aux enfants ? J’ai honte. »
Bruno Rodriguez Parrilla, Ministre des Affaires Extérieures de Cuba, a dédié, en 2011, le vote de l’ONU contre l’embargo, à Guillermo Domínguez Díaz (16 ans), Ivis Palacio Terry (18ans), Randy Barroso Torres (17ans) et Adrián Izquierdo Cabrera (12ans), qui après avoir subi des soins en chirurgie conservatrice sont restés, pendant des mois, cloués au lit faute de prothèses extensibles, dont le brevet est étasunien. Ce vote, il l’a également dédié à María Amelia Alonso Valdés (2ans), Damián Hernández Valdés (4 ans) et Dayán Romayena Lorente (12ans) qui souffrent de tumeurs du système nerveux nécessitant des traitements à base de Témodal, lui aussi fabriqué sous brevet des Etats-Unis.
Le 2 août dernier, nous avons appris que les ossements humains retrouvés en juin en Argentine, à San Fernando, dans un baril de ciment, avaient été identifiés. Il s’agit des restes du Cubain Galañena Hernández fonctionnaire de l’ambassade de Cuba. En août 1976, sous la dictature militaire, cet homme et son collègue, le cubain Jesús Cejas Arias, avaient disparu. Peu après leur disparition, l’agence « Associated Press » avait reçu une lettre où les deux jeunes Cubains (26 et 22 ans) expliquaient qu’ils avaient « déserté l’ambassade pour jouir de la liberté du monde occidental ».
La réalité était toute autre. Les deux hommes avaient été séquestrés dans le centre clandestin de l’Opération Condor de Buenos Aires, Automotores Orletti, avant d’être torturés puis sauvagement assassinés. L’agent de la CIA Michael Townley qui travaillait pour la DINA, police politique du général Pinochet, et votre compatriote d’origine cubaine Guillermo Novo Sampol membre de la sinistre organisation CORU créée par Orlando Bosch, étaient venus spécialement, le premier du Chili, le second des Etats-Unis, pour procéder à un interrogatoire musclé de ces Cubains. La suite nous la connaissons, malheureusement. Nous étions alors en 1976, à l’apogée de l’Opération Condor, et ces jeunes gens ont été deux victimes, parmi tant d’autres, de cette invention diabolique de la CIA.
Deux mois après l’assassinat des deux fonctionnaires Cubains, c’est un avion de « Cubana de aviación » qui était la cible d’un attentat conçu par Orlando Bosch et Luis Posada Carriles, et faisant 73 morts.
Bosch est décédé à Miami il y a un an en citoyen libre, et Posada Carriles coule des jours tranquilles en compagnie de ses amis Michael Townley et Novo Sampel, sous le soleil de Floride. Quant aux Cinq, ils ne sont toujours pas libérés. Quatre d’entre eux sont encore emprisonnés, et le cinquième, René González, est en liberté surveillée aux Etats-Unis.
Le but de la liberté surveillée est d’aider les anciens détenus à se réinsérer socialement. René González est en danger aux Etats-Unis, toute vie sociale lui est impossible, pourtant votre administration vient de refuser sa requête d’un retour à Cuba…Et vient aussi de refuser une fois de plus le visa à son épouse qui ne peut donc pas lui rendre visite !
Gerardo Hernández, condamné à perpétuité, vient de déposer une nouvelle demande d’appel collatéral où il dénonce toutes les irrégularités du procès. Son appel sera t‑il entendu par cette même juge qui l’a déjà condamné à une telle peine ?
Le Condor plane toujours !
Nous espérions, Monsieur le Président, après votre élection, vous voir tourner définitivement la page de cette époque indigne, et amorcer de nouvelles relations avec votre proche voisin Cuba. Vous avez une opportunité en or, avec la possibilité d’un acte de réciprocité humanitaire qui permettrait à Alan Gross de rentrer aux Etats-Unis, et aux Cinq de rejoindre Cuba. Il n’est pas trop tard pour une telle action qui honorerait votre prix Nobel.
En attendant un tel geste, recevez, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments humanistes les plus sincères.
Jacqueline Roussie
64360 Monein (France)
Copies envoyées à : Mesdames Michelle Obama, Nancy Pelosi, Hillary Clinton, Kathryn Ruemmler, Janet Napolitano, à Messieurs. Harry Reid, Eric Holder, John F. Kerry, Pete Rouse, Donald, Rick Scott, et Charles Rivkin, ambassadeur des Etats-Unis en France.