CAROLA CHÁVEZ, carolachavez.blogspot.com
Venezuela, 14.05.2011. Le mauvais côté de Chávez
samedi 14 mai 2011
Le mauvais côté de la révolution bolivarienne selon certains militants de gauche, est qu’elle n’est ni socialiste, ni révolution, et peut-être est-ce vrai. C’est pourquoi, à mesure que nous avançons, certains nous tournent le dos, non qu’ils passent à droite mais en marquant leur distance à coups de bruyants communiqués publics, avec l’air de ceux qui ne veulent pas déranger mais qui finissent par déranger. Ils exaltent les défauts. Ignorent les vertus. Pire, ils veulent nous libérer (nous les chavistes) de notre “faiblesse idéologique”. Car ce qui ne va pas c’est que Chavez est aussi chaviste. Eux, au nom de leurs idées et à la différence du peuple, tombent dans les bras de l’antichavisme furieux et occupent souvent les mêmes positions que la droite. Mais ils savent bien ce qui se passe : après tout, ils sont “les gens qui pensent” de ce pays. Vous me suivez ?
D’ailleurs que peut bien savoir sur les révolutions une maman qui passe la journée à élever des enfants, ou un concierge, ou quelqu’un qui vient d’apprendre à lire grâce à une révolution qui ne l’est pas ?
Ainsi, pendant que les théoriciens discutent des principes philosophiques que nous devons entériner pour atteindre la justice sociale, nous l’atteignons, peu à peu et à notre manière si particulière, comme il se doit. Parce que la faim et la misère n’allaient pas cesser pendant que nous nous mettions d’accord. Ou si ?
De sorte que notre “non-révolution” rend sa dignité au peuple et une fois que nous nous savons dignes nous ne voulons plus vivre sans la dignité. Personne, jamais ne pourra plus nous l’arracher.
Le paradigme “Gauche Vs. Droite” ne s’adapte pas toujours à notre réalité, ce qui se traduit par une erreur de calibre à l’heure d’affronter l’ennemi. J’imagine déjà ceux qui vont s’écrier : « avec la droite on ne négocie pas ! ». Mais ce qui est sûr c’est que nous sommes face à un paradigme majeur : Patrie Vs. colonie : au-delà de gauches et de droites, existe notre nécessité de libération et d’atteindre le plein exercice de notre souveraineté.
Vu de cette manière il y a tant de vénézuéliens, que certain considèreraient de droite, qui par patriotisme livreraient avec fierté la bataille à nos côtés. Beaucoup cesseraient d’être considérés comme des petit-bourgeois suspects à cause du fait que nous sommes nés dans certaines maisons, et nous éviterions ainsi des discussions creuses.
L’idée de Patrie Vs. Colonie est plus claire que l’abstraction droite contre gauche, et plus encore quand les défenseurs extrêmes de ces dernières finissent souvent par coïncider. Patrie Vs. Colonie a le mérite de la clarté mais surtout de rassembler plus de volontés.
Mon Président appelle tous les secteurs nationaux à construire la Patrie et aussitôt les puristes bondissent pour dénoncer la « droitisation » de Chavez et ils se retirent parce que ce n’est pas ainsi qu’on construit la Patrie, bien que nous n’ayons jamais eu autant de patrie qu’aujourd’hui. Ils se retirent, fermes sur leurs principes qui auront toujours plus de poids que le bien général du peuple.
Heureusement que comme nous, Chavez soit chaviste.
C. C.
(NDLR 🙂
Les dernières semaines ont vu une accélération sans précédent de la démocratie et de la révolution au Venezuela. Augmentation du salaire minimum de 25%, augmentation des salaires des universitaires et travailleurs du secteur public de 40 à 45%. Financement par l’État d’un “new deal” en matière de logement qui va permettre la construction d’un logement décent pour chaque famille pauvre — le recensement a déjà permis d’inscrire 300000 familles. Plan national de création d’emploi pour 3,5 millions de chômeurs sur les 8 prochaines années. Le parlement a approuvé ou discute actuellement de nombreuses lois structurantes : contre le racisme ou contre l’impunité pour les massacres politiques commis sous les “démocraties” d’avant la révolution, sur les droits du travail, sur la protection du pouvoir d’achat, contre la spéculation et les hausses de prix illégales, ou sur la démocratisation — à la suite de l’Argentine — du spectre radio et TV jusqu’ici monopolisé comme ailleurs par de grands groupes économiques. Cette loi démocratisera l’accès citoyen au patrimoine public des ondes — 33% pour le public, 33% pour le privé et 33% pour le secteur associatif, participatif.
Le président Chavez a décrété de son côté une loi qui protège les locataires des expulsions arbitraires et oblige l’État à mettre fin à l’exploitation des concierges, rebaptisés “travailleurs résidentiels” et considérés comme “groupe vulnérable”.
Dotés de plusieurs milliards de dollars ces trois dernières années, 42000 conseils communaux appliquent le budget participatif que la gauche altermondialiste avait découvert avec enthousiasme à Porto Alegre (Brésil) et qui mobilisent les citoyens dans la reconstruction de leurs services publics et d’un nouveau type d’état. La Mision Agrovenezuela vient de financer 34.000 producteurs agricoles à hauteur de 1,4 milliards de bolivars, pour ancrer définitivement le pays dans une souveraineté alimentaire qui refuse les biocarburants ou les OGM.
Des rapports de la CEPAL à l’UNESCO, des enquêtes d’opinion de l’ONG indépendante chilienne Latinobarometro à ceux de la firme privée Gallup, les observateurs internationaux s’accordent sur le fait que le Venezuela est devenu non seulement le pays le plus égalitaire de la région mais aussi celui où les citoyen(ne)s croient le plus dans la démocratie.
Ces transformations en profondeur passionnent, mobilisent les vénézuéliens mais sont invisibles à l’extérieur. La gauche occidentale, qui vit un fort désamour des secteurs populaires, impuissante face à la montée de l’extrême-droite, semble ignorer, voire mépriser, ces douze années d’une vaste construction du socialisme bolivarien et sa forte dose de démocratie participative. Une partie croissante d’entre elle préfère mettre son énergie dans des prises de distance médiatiques vis-à-vis de Chavez.