Arrestation de Nikos Mihaloliakos, dirigeant d’Aube Dorée. Parmi, les premiers éléments réunis par la police : 10 tentatives de meurtres et meurtres (dont Pavlos Fyssas et un vendeur de poisson égyptien, de nombreuses attaques contre des migrants, des témoignages à charge d’ex-membres d’Aube Dorée placés sous protection, blanchiment d’argent, liens avec des milieux criminels et des policiers ainsi que des officiers de l’armée.
Déclaration de DEA (Gauche ouvrière internationaliste, membre de la plateforme de gauche de SYRIZA)
Le premier ministre Antonis Samaras et le gouvernement de coalition de la Nouvelle Démocratie et du PASOK (Mouvement socialiste panhellénique du vice-président Evangelos Venizelos) ont été forcés de se s’attaquer à l’organisation néonazie Aube dorée, après avoir attendu très longtemps de manière criminelle.
1. Les facteurs qui les ont contraints à opérer un tel « tournant » – parce que nous avons tous en mémoire que jusqu’à hier leur tactique concrète consistait à couvrir les néonazis – sont évidents :
a. Il y a d’abord le sang de Pavlos Fyssas [le musicien assassiné à coups de couteau le 16 septembre par un membre d’Aube dorée, Giorgios Roupakias]. Son meurtre fut un événement majeur très grave. Il toucha et émotionna la majorité des travailleurs et de la jeunesse. C’était un « incident » qu’il était impossible de « cacher sous le tapis », comme cela a été fait avec des centaines d’attaques mortelles contre des immigré·e·s, qui furent dissimulées avec la participation des partis bourgeois, de l’appareil d’Etat et des mass media.
b. Il y a le mouvement antifasciste, antiraciste. Les manifestations antifascistes qui ont éclaté immédiatement après l’assassinat menaçaient – sur un arrière-fond de grèves [des enseignants du secondaire,du primaire, des hospitaliers, des salariés de la sécurité sociale,etc.] et de colère sociale – de créer un nouveau front de la lutte contre le gouvernement d’Antonis Samaras de la Nouvelle Démocratie.
c. Il y a le fait que – au plan politique et social – Samaras se trouvait le dos au mur. Il faisait face à la grève des enseignants et à la perspective d’une relance de la grève des hospitaliers et des travailleurs municipaux. Il se devait de mettre en marche de nouvelles mesures d’austérité et de signer un nouveau mémorandum à ce sujet, suite aux demandes de la troïka (UE, BCE, FMI) et des créanciers [quelque 98% des dits prêts reçus par la Grèce, à condition que des mesures brutales d’austérité soient appliquées, retournent directement dans les poches des créanciers]. La base politique soutenant le gouvernement était en train de se déliter. Aube dorée commençait à mettre en question l’hégémonie de la Nouvelle Démocratie au sein du bloc social de droite et prétendait se l’approprier. La direction de la Nouvelle Démocratie était sous le coup de critiques dans son propre parti et aussi des médias qui lui étaient favorables.
Ce sont ces facteurs qui ont imposé finalement à Antonis Samaras l’option d’attaquer Aube dorée. Il a été forcé d’attaquer le parti néonazi qui jusqu’à hier était traité comme un « parti-frère » par ses principaux conseillers, dans le cadre de leur stratégie visant à réorganiser un bloc social de droite en tant que courant de masse anti-ouvrier, anti-grèves, anti-gauche.
2. Le mouvement de résistance des travailleurs et de la jeunesse, et spécialement du mouvement antifasciste et antiraciste, se doit d’exploiter cette opération du gouvernement, afin de faire pression dans le but d’écraser concrètement et définitivement les néonazis. En vue d’atteindre cet objectif, il est très important de faire en sorte de démanteler les liens établis par les nazis au sein de la police, de l’armée, du système judiciaire, de l’Eglise et du grand business [entre autres les armateurs et des spéculateurs immobiliers] qui finançait Aube dorée.
La revendication de faire la clarté dans tous les domaines est une précondition pour la défense et l’avancée des droits démocratiques et des libertés politiques pour l’ensemble de la classe ouvrière et des masses populaires.
Il y a un là débat public en cours où nous devons mettre l’accent sur un élément : les nazis n’ont pas le droit de se réclamer des droits démocratiques. Cela parce qu’ils les utilisent – et veulent les utiliser – afin de former des forces politico-militaires qui agissent dans l’ombre, de la manière la plus anti-démocratique, contre les immigrants, contre chacun qui est « différent », contre les syndicats et contre la gauche. Cette menace mortelle – dont la preuve a été administrée, entre autres, à l’occasion du meurtre de Pavlos Fyssas – n’a pas le droit de se cacher derrière « la feuille » – comme eux-mêmes l’appellent – des droits démocratiques, droits que nous avons gagnés au travers de nos combats durant des années qui on fait suite à la chute de la junte militaire.
3. Durant cette période, nous ne devons pas oublier – comme les médias tentent de nous y inciter – le tableau d’ensemble : l’arrière-fond de tous les développements politiques réside dans la brutale attaque de la classe dominante et des créanciers. Il s’agit des politiques d’austérité qui ont pour but d’écraser les acquis sociaux des travailleurs, des masses populaires et des jeunes. Samaras [ND] et Venizelos [PSOOK] cherchent à se poser comme des gardiens de la démocratie, afin d’obtenir la force politique dont ils ont besoin pour imposer un nouveau mémorandum [Schäuble, ministre des Finances de Merkel,a indiqué clairement qu’un prêt de 77 milliards d’euros serait conditionné à un ensemble de nouvelles mesures d’austérité].
C’est la raison pour laquelle Samaras et Venizelos continuent de faire usage de la tactique ignoble visant à attaquer les « deux extrêmes », une tactique qui jusqu’à hier donna une légitimité à Aube dorée en le mettant sur le même pied que la gauche et plus spécifiquement SYRIZA. Les menaces pénales du gouvernement contre les résidents de la Chalkidiki ( région où une vaste mobilisation a lieu contre le développement d’un projet de mine d’or qui aboutirait à une destruction de l’environnement ) et contre le staff administratif des universités qui est en grève doivent tous nous alerter. Nous ne devons pas permettre – soi-disant au nom de la démocratie – de réduire les droits démocratiques actuels de la majorité sociale qui est en lutte.
A cause de tout cela, la nouvelle stratégie qui a été promue est très dangereuse. Au nom d’isoler Aube dorée, il y a un effort visant à créer une « unité politique » de tous les partis sans existence concrète et absolument injustifiée afin de mettre en place le célèbre « arc constitutionnel ». Tous les courants de la gauche doivent éviter ce piège. Le combat pour isoler les nazis, la lutte pour effectivement liquider Aube dorée, fait partie intégrale du combat pour annuler le mémorandum, du combat pour défendre les travailleurs et leurs droits sociaux contre les politiques d’austérité très dures.
La grande victoire contre les nazis sera la victoire contre le bloc de droite et contre les forces pro-austérité. Ce sera une victoire politique de la gauche, qui préparera la voie pour une émancipation socialiste de la société.
C’est la direction dans laquelle nous devons nous engager fermement, revendiquant aujourd’hui l’écrasement réel et complet des néonazis.
29 septembre 2013
(Source & traduction : A l’Encontre)