Les clefs de la mort d’un jeune député bolivarien

L’assassinat "sélectif" du jeune député et de sa compagne est caractéristique du paramilitarisme et, en général, de toutes les politiques de terreur visant à intimider les jeunes qui voudrait s’engager dans un changement révolutionnaire.

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Robert Ser­ra, 27 ans, était le plus jeune dépu­té de l’Assemblée Natio­nale et membre du Par­ti Socia­liste Uni du Vene­zue­la (PSUV). Lui et sa com­pagne Maria Her­re­ra viennent d’être assas­si­nés chez eux, dans le quar­tier popu­laire de La Pas­to­ra, à Cara­cas, par six indi­vi­dus lors d’une opé­ra­tion minu­tieu­se­ment pla­ni­fiée. Pourquoi ?

En février 2014, la plu­part des jour­na­listes occi­den­taux (le Monde, Libé­ra­tion, El País, etc..) avaient trans­for­mé une mobi­li­sa­tion de droite, notam­ment étu­diante, par­tie des quar­tiers riches de Cara­cas… en “révolte popu­laire contre la vie chère”. Ils avaient occul­té le refus des sec­teurs popu­laires de par­ti­ci­per à ces vio­lences qui avaient débu­té à la fron­tière colom­bienne grâce à l’appui des para­mi­li­taires liés à l’ex-président Alva­ro Uribe. Il ne res­tait qu’à faire croire que le gou­ver­ne­ment boli­va­rien, qui répon­dait à une enième ten­ta­tive de désta­bi­li­sa­tion, “répri­mait la popu­la­tion”… [“[Bré­vis­sime leçon de jour­na­lisme pour ceux qui croient encore à l’information”]]

Ces médias nous pré­sen­tèrent alors le jeune Lorent Saleh comme un “lea­der étu­diant de la lutte pour la démo­cra­tie”. Or, celui-ci a été expul­sé de Colom­bie le 4 sep­tembre 2014 par le gou­ver­ne­ment San­tos, alors qu’il y per­fec­tion­nait sa for­ma­tion para­mi­li­taire. Plu­sieurs vidéos le montrent durant ces cours se réjouir de l’appui des médias inter­na­tio­naux à “l’Opération Liber­té” et de ren­trer bien­tôt au Vene­zue­la muni d’un arse­nal ren­for­cé et appuyé par un per­son­nel plus nom­breux et mieux for­mé : “nous allons com­men­cer par des­cendre vingt mac­cha­bées en 48 heures à Cara­cas, pour neu­tra­li­ser les col­lec­tifs”. [[https://www.youtube.com/watch?v=mssSTguxtm4]]

L’assassinat “sélec­tif” du jeune dépu­té Ser­ra et de sa com­pagne est carac­té­ris­tique du para­mi­li­ta­risme et, en géné­ral, de toutes les poli­tiques de ter­reur (Hon­du­ras, etc..) visant à inti­mi­der les jeunes qui vou­drait s’engager dans un chan­ge­ment révolutionnaire.

Une poli­tique annon­cée de longue date, comme l’attestent des enre­gis­tre­ments réa­li­sés en 2013 où la diri­geante d’extrême-droite Maria Cori­na Macha­do exi­geait de mener contre le gou­ver­ne­ment boli­va­rien des “confron­ta­tions non-dia­lo­gantes” avec l’appui des États-Unis. Macha­do (elle aus­si trans­for­mée en égé­rie de la liber­té par les médias occi­den­taux) avait orga­ni­sé un mee­ting sous l’effigie d’un mili­tant boli­va­rien pen­du par les pieds. [“[C’est l’heure d’anéantir Madu­ro, le reste tom­be­ra de son propre poids”]]

L’ex-président colom­bien Ernes­to Sam­per, actuel Secré­taire Géné­ral de l’UNASUR (orga­nisme regrou­pant les douze nations sud-amé­ri­caines) a décla­ré que “l’assassinat de Ser­ra est un signal pré­oc­cu­pant de l’infiltration du para­mi­li­ta­risme au Vene­zue­la”. Le maire de Bogo­ta Gus­ta­vo Petro a rap­pe­lé que le jeune dépu­té véné­zué­lien enquê­tait sur les liens entre Lorent Saleh et l’ex-président Alva­ro Uribe.

La popu­la­tion véné­zué­lienne rend mas­si­ve­ment hom­mage à Robert Ser­ra et à María Her­re­ra en défi­lant depuis deux jours à l’Assemblée Natio­nale. Pour dire l’émotion et l’indignation popu­laires, l’ex-sénatrice colom­bienne et mili­tante des droits humains Pie­dad Cor­do­ba a cité Neru­da : “Ils peuvent cou­per toutes les fleurs, ils ne pour­ront arrê­ter le printemps”.

Les médias occi­den­taux se font par­ti­cu­liè­re­ment dis­crets sur ces faits.

Thier­ry Deronne, Cara­cas, 3 octobre 2014.

Source de l’ar­ticle : vene­zue­lain­fos