Une fresque XXL rue Neuve rappelle quelques impératifs aux marques de mode
Face au Covid-19, la fresque éphémère XXL « PAY YOUR WORKERS » réalisée mercredi 18 novembre rue Neuve à Bruxelles, à l’initiative d’achACT et de la Schone Kleren Campagne, par le collectif de street artistes pARTerre, interpelle les marques et enseignes de mode. L’objectif : en pleine crise sanitaire mondiale, les exhorter à garantir le paiement de leurs salaires aux travailleuses et travailleurs des filières de production de vêtements.
Au début de la pandémie, le premier réflexe des entreprises de l’habillement a été d’annuler leurs commandes. Mêmes celles déjà produites par les usines sous-traitantes. Ces pratiques ont eu des effets désastreux sur les travailleuses et travailleurs de la confection de vêtements : vol de salaires, licenciements massifs, répression syndicale, non-respect des mesures sanitaires dans les usines, etc.
« On a estimé entre 2,7 milliards et 4,9 milliards d’euros de salaires impayés entre mars et mai 2020. Déjà touchés par des conditions de travail déplorables hors Covid-19, la catastrophe s’abat de plein fouet et plonge des millions de personnes dans l’extrême pauvreté. Les bonnes années, les bénéfices de ces entreprises ne sont pas partagés, aujourd’hui, le poids de la crise lui est bien partagé avec les travailleur·euses. Ce n’est pas juste ! », explique Sara Ceustermans de la Schone Kleren Campagne (SKC).
À travers cette fresque géante, achACT et la SKC, à l’initiative de l’action, entendent relayer le message des travailleur·euses concerné·es, mobilisé·es pour le respect de leurs droits dans plusieurs pays de production. Dans le cadre de l’appel à action #PayYourWorkers du réseau international de la Clean Clothes Campaign, les marques et enseignes de l’habillement sont exhortées à s’engager publiquement pour garantir le versement des salaires complets aux travailleur·euses de leurs filières. Plus d’une douzaine de petites marques ont déjà répondu positivement, il est maintenant temps que d’autres suivent le mouvement, en particulier les grandes entreprises qui ont le plus d’impact, telles que H&M, Nike et Primark.
« Si cet appel est destiné à toutes les marques du secteur, aujourd’hui, on participe à la dynamique internationale d’interpellation des enseignes H&M, Primark et Nike. Notre réseau international, la Clean Clothes Campaign, a relevé de nombreuses violations des droits dans leurs filières d’approvisionnement. Ces entreprises doivent s’engager dès maintenant vis-à-vis des travailleuses et travailleurs qui produisent leurs marchandises, si elles le font, d’autres en feront sûrement autant.Des mesures plus structurelles sont également nécessaires, comme une répartition plus équitable des bénéfices dans le secteur, une plus grande transparence des filières, une meilleure protection sociale dans les pays producteurs, etc. », précise Sanna Abdessalem d’achACT
Bien que certaines entreprises du secteur soient touchées par les effets de la pandémie, Primark, H&M et Nike ne le sont pas. Le groupe détenteur de Primark, Associated British Foods, a annoncé début novembre un bénéfice avant impôts de 914 millions de GBP (1 milliard d’euros) pour 2020, le groupe H&M a annoncé un bénéfice de 24 851 millions de SEK (2 435 millions d’euros) au cours du dernier trimestre, et Nike a annoncé un revenu net de 1,5 milliard d’USD (1,3 milliard d’euros) et a versé 384 millions d’USD (325 millions d’euros) de dividendes aux actionnaires, soit une hausse de 11 % par rapport à l’année précédente.
« Cette crise sanitaire est mondiale. Si on négocie ici la mise en place de mesures de sécurité optimales pour nos travailleurs en magasin et un soutien financier pour les employé·es de la distribution sévèrement affecté·es par les fermetures de magasins, on se montre solidaires des travailleuses et travailleurs du bout de la chaîne, qui se mobilisent aujourd’hui pour recevoir les salaires dus et pour plus de protection sociale », témoigne Delphine Latawiec, responsable du secteur commerce de la CNE.
« On sait combien il est fondamental de pouvoir s’organiser collectivement face aux conséquences de cette crise sanitaire, c’est notre quotidien depuis plusieurs mois. Malheureusement les travailleuses et travailleurs des filières de production qui revendiquent leurs droits s’exposent à des risques de répression, de licenciement ou de harcèlement. On ne peut que leur témoigner notre soutien ! », conclut Valérie Vanwalleghem, secrétaire Fédérale du SETCa/BBTK.