Justice pour Pavlos et les autres

L’ex­trême droite n’est pas inno­cente, sa voca­tion est cri­mi­nelle. L’as­sas­si­nat du rap­peur grec Pav­los Fys­sas en est un exemple emblé­ma­tique de ces der­nières années mais la liste des vic­times est mal­heu­reu­se­ment encore longue. Le che­min vers une jus­tice aussi.

Après plus de cinq années et demie de pro­cès, la Cour a accor­dé le jeu­di 22 octobre 2020 des peines sus­pen­sives à 12 des 57 per­sonnes condam­nées ; les 45 autres devraient pas­ser par la case pri­son. Par­mi eux, le fon­da­teur et lea­der du par­ti néo­na­zi Aube Dorée, Nikos Micha­lo­lia­kos, ou encore Ioan­nis Lagos, dont l’ar­res­ta­tion est ordon­née mais dont l’im­mu­ni­té par­le­men­taire doit être levée par le Par­le­ment euro­péen où il siège. Depuis celui des colo­nels, aucun pro­cès, en Grèce, n’a eu un tel lien avec la vie poli­tique natio­nale et euro­péenne, ni n’a fait autant replon­gé le pays dans sa propre et dou­lou­reuse his­toire. A tel point que le lea­der d’Aube Dorée a cher­ché à dis­cré­di­ter le ver­dict en vou­lant en faire un pro­cès idéo­lo­gique : « Je suis fier d’être envoyé en pri­son pour mes idées » a‑t-il ain­si décla­ré à la télé­vi­sion grecque.

Depuis avril 2015, ce ne sont pour­tant pas des idées que le tri­bu­nal a exa­mi­nées, mais bien des faits : l’as­sas­si­nat du rap­peur et mili­tant de gauche Pav­los Fys­sas (Aka Killah P), celui d’un immi­gré pakis­ta­nais, Sah­zat Luck­man, les agres­sions de pêcheurs égyp­tiens en 2012 et de syn­di­ca­listes com­mu­nistes en 2013… pour n’en citer que quelques-uns. Le 7 octobre 2020, le pre­mier ver­dict tombe : Aube Dorée est jugée « orga­ni­sa­tion cri­mi­nelle » ; puis la Cour juge cou­pable ou com­plice des dépu­tés, des cadres et membres du par­ti. « Le pre­mier objec­tif de ce pro­cès était de qua­li­fier Aube Dorée d’or­ga­ni­sa­tion cri­mi­nelle : il est atteint », explique Elef­the­ria Tom­pat­zo­glou, l’a­vo­cate de la famille Fys­sas. Mais elle pré­vient : « les membres d’Aube Dorée peuvent être à nou­veau élus en se pré­sen­tant avec d’autres par­tis ou en en créant un nou­veau. Deux de ses cadres ont d’ailleurs déjà fon­dé leur propre for­ma­tion… » L’un d’entre eux n’est autre que Ioan­nis Lagos. Mag­da Fys­sas, la mère du rap­peur assas­si­né n’est pas dupe : « Nous avons gagné une bataille ! Mais le fas­cisme n’est pas vain­cu comme ça. Il faut se battre… »

Les néo­na­zis grecs ont assas­si­né des réfu­giés, des migrants et des citoyens grecs d’origine étran­gère. Leurs com­man­dos de choc s’en sont aus­si pris à des membres du par­ti com­mu­niste et du front syn­di­cal PAME, qui défen­daient les salaires et droits sociaux des tra­vailleurs grecs du port du Pirée. Cer­tains patrons ont pro­mis aux néo­na­zis un sou­tien finan­cier s’ils arri­vaient à chas­ser les syn­di­cats et la gauche du port, leur per­met­tant ensuite de créer leur propre syn­di­cat pro-patrons, bien moins dif­fi­cile en matière de condi­tions de salaire et de travail.

Même s’il y a une dif­fé­rence entre des pas­sages à l’acte cri­mi­nel et des pro­pos qui peuvent être consi­dé­rés comme racistes, des inci­ta­tions à la haine et la vio­lence, rap­pe­lons qu’en 2004, le Vlaams Belang qui s’ap­pe­lait Vlaams Blok a été condam­né pour racisme, le Front Natio­nal belge en 2006 a lui aus­si été condam­né pour racisme.

Les diri­geants du Vlaams Belang, Filip Dewin­ter, Jan Pen­ris, Anke Van der­meersch et Frank Creyel­man ont ren­du visite au par­ti néo­na­zi grec Aube dorée en novembre 2016. En Grèce, ils ont pris la parole lors des mee­tings qu’Aube dorée a tenus dans les îles grecques et devant le groupe du par­ti au Par­le­ment grec. Ils ont aus­si visi­té le siège du par­ti. Là, Dewin­ter a pro­non­cé un dis­cours visible sur le canal You­tube d’Aube dorée, où il vante avec nos­tal­gie les prouesses de l’organisation poli­ti­co-mili­taire du VMO, le Vlaamse Mili­tan­ten Orde. Ce com­man­do fla­mand fas­ciste de type para­mi­li­taire, connu pour ses actions vio­lentes a été inter­dit en 1981.

 

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