La Chambre constitutionnelle du Tribunal Suprême de Justice, représentant de la magistrature de la République Bolivarienne du Venezuela, a publié mercredi dernier, le 29 Mars, l’arrêté de loi n° 156 indiquant que, vue l’omission législative honnie par l’Assemblée Nationale, une partie des pouvoirs de la législature sera désormais assumée par l’instance judiciaire, jusqu’à nouvel ordre.
Cette décision a provoqué un certain émoi auprès de la droite nationale et internationale, assurant que le président Maduro s’est crée un auto-coup d’État, aggravé d’une rupture de l’ordre constitutionnel et autres théories.
Sachez que la Constitution est intacte, le Parlement n’a pas été dissous, le plein respect des droits de l’homme est bien là, une totale liberté d’expression dans le pays règne, la participation politique est plurielle, les partis existent et il y a un libre accès à la justice. Les députés continuent à se rendre à leurs bureaux et au Palais législatif fédéral, siège du Parlement vénézuélien. Ils continuent à y effectuer leurs séances — gouvernement et opposition sont en désaccord — et jusqu’à présent aucun parlementaire n’a été arrêté. Un état de droit, la démocratie et l’ordre constitutionnel règnent. Le calme règne également dans les rues de Caracas… Si ces faits montrent qu’il n’y a ni de chaos, ni de coup au Venezuela contrairement à ce que chantonnent à l’unisson les médias traditionnels, alors que diable se passe-t-il cette fois-ci ?
Le Venezuela n’a pas le même système parlementaire qu’en Europe, il y a cinq pouvoirs au lieu de trois (l’exécutif, le législatif, le judiciaire, le citoyen et l’électoral). Contrairement aux régimes parlementaires européens, le parlement n’a pas la même signification. Il obéit à une Constitution qui établit les fonctions ainsi qu’à d’autres pouvoirs publiques. L’organe de contrôle et ultime interprète de la Constitution est la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême (Sala Constitucional del Tribunal Supremo), c’est de là qu’ont émané les arrêts controversées.
Lors des élections législatives du 6 décembre 2015, des fraudes ont été signalés dans l’État d’Amazonas, prouvé par des enregistrements audio où l’on entend la secrétaire du gouverneur, Victoria Franchi, proposer des sommes d’argent à des gens afin de voter pour des candidats de l’opposition. Par conséquent, la Cour suprême a suspendu les proclamations des députés de Amazonas. Cependant, l’Assemblée nationale acquise à l’opposition ont persisté à faire prêter serment aux trois candidats incriminés. Cela était important pour l’opposition car cela lui permettait d’avoir la majorité absolue à l’Assemblée Nationale (deux tiers des députés), ce qui leur donnerait de nouveaux pouvoirs et responsabilités, y compris d’abroger ou modifier les lois organiques, la loi du travail ou la loi sur l’éducation.
Face a cette prestation de serment illégale, la Cour suprême a déclaré nulles la décision de l’Assemblée nationale, tant que perdure cette situation. L’Assemblée Nationale a refusé d’annuler la prestation de serment des trois individus.
Par la suite, le 5 janvier 2017, le parlement s’est déclaré en rébellion absolue, une nouvelle directive et un Julio Borges ayant prêté serment en tant que président auto-proclamé de l’Assemblée Nationale. Le 9 janvier, l’Assemblée Nationale a accusé une prétendue « manquement au devoir » du président Nicolás Maduro, motifs pour lesquels la Constitution peut convoquer à des nouvelles élections présidentielles.
Bien que cette décision n’a aucune validité juridique et qu’il est évident que le président Maduro n’a jamais quitté son poste, l’opposition cherche à supprimer le pouvoir exécutif via le législatif. Ceci-dit, si cela se aurait eu lieu, cela aurait constitué un coup d’Etat. Pour cette raison, le Bloc de la Patrie (groupe de députés qui soutiennent Maduro) a introduit un recours devant la Cour suprême afin d’annuler le décret.
Ainsi, le Parlement a outrepassé ses fonctions, il a contourné le pouvoir et dans certains cas, a usurpé les fonctions du pouvoir exécutif en bafouant la compétence judiciaire constitutionnelle de la Cour suprême.
La Cour suprême quant à elle, cherche à mettre de l’ordre juridique et institutionnelle face à un pouvoir qui lui désobéit et qui crée des conflits avec d’autres. La Cour constitutionnelle a donc établi que temporairement jusqu’au retour à la normale de la législature quelques-unes des fonctions nécessaires au bon fonctionnement de l’Etat seront prise en charge par la Cour suprême. Cela est constitutionnel.
L’arrêt a l’intention d’assumer les fonctions qui empêchent le fonctionnement de l’État par défaut (par exemple : approuver des investissements pétroliers avec des entreprises privées cela nécessite d’un protocole devant être approuvé conjointement par l’exécutif et le législatif).
Fait important, lors de sa réunion du 9 Janvier, le nouveau conseil d’administration de l’Assemblée nationale, dirigée par Julio Borges, a annulé la prestation de serment des 3 députés des Amazonas. Cela, juste avant de déclarer l’abandon présumé du président Maduro, dans le but de tenter d’éliminer leur condition d’outrage. Toutefois, la décision de la Cour suprême du 31 janvier stipule que tous les actes du nouveau conseil sont nuls : c’est l’ancien conseil d’administration, présidé par Henry Ramos Allup (opposition), qui aurait du annuler les serments des députés. Par conséquent, l’annulation des 3 membres de Amazonas faites le 9 Janvier n’a pas été considérée comme valide.
L’Assemblée Nationale rejette systématiquement les arrêts de la Cour suprême, elle se rend inapte à exercer ses fonctions car ses infractions constitutionnelles ne permettent pas au pays de disposer d’un parlement qui légifère. Le fonctionnement de l’État est paralysé parce que l’opposition en a décidé ainsi. Par conséquent, la Cour suprême, par son rôle de protection de l’ordre constitutionnel, a établi des lignes de correction.
Au vu que l’Assemblée Nationale a cessé de rédiger des lois… en vertu de l’article 336 de la Constitution, chiffre 7, qui atteste qu’en cas d’absence d’un parlement en fonction et agissant contre l’ordre constitutionnel, la paix et la stabilité du pays, dans un climat de menaces internes et externes graves qui exigent des mesures juridiques d’urgence, la Cour suprême a décidé de protéger le pays qui ne dispose plus d’un vrai parlement.
Si l’Assemblée Nationale le voulait, elle pourrait faire marche arrière, elle pourrait faire les démarches pour éliminer sa condition d’outrage, y compris l’annulation de la prestation de serment des députés de Amazonas, le décret stipule que dans ce cas, les pouvoirs parlementaires reviendront à l’Assemblée nationale.
Un espace de dialogue entre le gouvernement et l’opposition a été crée. Mais il semble que la plupart des groupes d’opposition d’extrême droite réclament une intervention internationale de l’OEA, marginalisant les secteurs de l’opposition rationnelle.
Lorsque les décisions de la Cour Suprême sont bafouées, qu’on promeut l’intervention étrangère, et que l’on cherche à renverser un gouvernement légitime et démocratiquement élu… Lorsqu’on cherche à destituer l’autorité des autres pouvoirs sans fondement juridique, qu’on planifie et exécute des actes terroristes, cela s’appelle un projet de coup d’État. Tel est le projet de la droite nationale et internationale.
Le Venezuela connaît une démocratie forte, solide et qui se défend.
Rédigé par ZIN TV avec les contributions du Dr. Isaias Rodriguez, Héctor Rodríguez Castro et Alba Ciudad (LBR)