Washington et ses alliés cherchent à évincer le gouvernement de Kadhafi et à installer une administration satellite.
L’OTAN a annoncé hier qu’elle continuera son intervention militaire en Libye pour un autre 90 jours, prolongeant la période initiale de 90 jours qui aurait expiré le 27 juin. Le bombardement criminel du pays nord-africain riche en pétrole a maintenant été formellement autorisé jusqu’à la fin de septembre. Washington et ses alliés européens préparent clairement une campagne intensifiée visant à évincer le gouvernement dirigé par Mouammar Kadhafi et à installer une administration satellite à Tripoli.
La prolongation de 90 jours a été acceptée à l’unanimité dans une réunion tenue à Bruxelles, qui impliquait des ambassadeurs des 28 États membres, ainsi que des diplomates de la Jordanie, du Qatar, des Émirats arabes unis, du Maroc et de la Suède. Les États-Unis et ses alliés ont ensuite souligné que l’autorisation prolongée ne représentait pas une date limite. Le porte-parole du Pentagone, le colonel Dave Lapan a déclaré que mettre fin à cette campagne « dépend des conditions sur le terrain », et que Washington fera partie de la mission « jusqu’à ce que les objectifs soient remplis ».
Le secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a publié une déclaration sur la prolongation des 90 jours : « Cette décision envoie un message clair au régime Kadhafi — nous sommes déterminés à continuer notre opération pour protéger la population libyenne. Nous maintiendrons nos efforts afin de remplir le mandat des Nations unies. »
Ces prétextes pour la guerre de l’OTAN ont été complètement discrédités. Les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France ont mené la campagne pour un changement de régime en Libye dans le but de réaffirmer leurs intérêts régionaux géostratégiques après les soulèvements en Tunisie et en Égypte, puis afin d’installer un régime plus soumis aux demandes des sociétés pétrolières transnationales cherchant à exploiter les réserves lucratives de pétrole du pays.
Les dirigeants de l’OTAN font maintenant peu d’effort pour dissimuler que les opérations militaires visent à évincer Kadhafi du pouvoir, un but qui n’est pas autorisé par le « mandat » supposément fourni par l’ONU. Des tentatives répétées d’assassinats contre Kadhafi et sa famille ont eu lieu durant la campagne militaire. Pour l’administration Obama et ses partenaires, la Résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies n’a jamais servi à autre chose que fournir une couverture diplomatique et pseudo-légale à l’intervention impérialiste.
Les dirigeants américains, britanniques et français ont délibérément saboté toute possibilité de fin de la guerre en Libye négociée entre le régime de Khadafi et les forces de l’opposition situées dans la ville de Benghazi à l’est. Les efforts du gouvernement italien pour résoudre la situation en laissant à Khadafi une « porte de sortie politique » ont été contrés par la demande que le dirigeant libyen soit accusé de crimes de guerre. Cette demande a été émise le mois dernier par la Cour pénale internationale.
Il semble maintenant que le moment choisi pour l’autorisation de 90 jours de l’OTAN pour bombarder soit, au moins partiellement, destiné à saborder les demandes de l’Union africaine pour une « feuille de route », qui implique un cessez-le-feu immédiat, incluant la fin des bombardements de l’OTAN. Le président sud-africain, Jacob Zuma, a visité Tripoli lundi pour rencontrer Kadhafi. Il a dit que le dirigeant libyen était prêt à mettre en oeuvre la feuille de route de l’Union africaine. L’OTAN a répliqué en déployant une nouvelle ronde de frappes aériennes immédiatement après que Zuma a quitté la capitale libyenne.
Selon les statistiques de l’OTAN, les forces aériennes américaines et européennes ont mené 9183 sorties depuis le 31 mars. Le gouvernement libyen, cette semaine, a rapporté que son ministère de la Santé a rapporté, entre le 19 mars et le 26 mai, 718 civils morts et 4067 blessés, dont 433 blessés graves. Le bilan des victimes pour l’armée libyenne est probablement encore plus élevé, mais ces chiffres ne sont pas divulgués.
Le nombre de morts grandissant expose la fausseté des prétentions de l’OTAN à « protéger le peuple libyen ». Une autre escalade est en train d’être préparée, alors qu’au moins quatre hélicoptères Apache britanniques qui s’approchent maintenant des eaux libyennes près de la ville contestée de Misrata. Il a été rapporté que douze hélicoptères Tiger français se trouvent en mer Méditerranée, en route vers la Libye.
Il y a aussi des preuves que, en violation directe de la résolution d’interdiction des Nations unies contre toute force d’occupation entrant en Libye, davantage d’équipes spéciales américaines et européennes sont actives sur le terrain, cherchant à rallier les hommes de main anti-gouvernement, qui sont inefficaces, en une force cohérente. Al-Jazira, plus tôt cette semaine, a filmé six Occidentaux, dont cinq étaient armés, en train de discuter avec des commandants « rebelles » près de Misrata. Les hommes ont rapidement fui lorsqu’ils ont réalisé qu’ils étaient filmés.
Le Guardian, citant des sources anonymes « très bien informées », a rapporté que ces personnes étaient d’anciens membres des forces d’élite britanniques, les SAS. L’article a indiqué que l’OTAN avait recours à des mercenaires pour l’assister dans sa campagne de bombardements. « D’anciens soldats des SAS et d’autres employés de compagnies de sécurité privées occidentales aident l’OTAN à identifier des cibles dans la ville portuaire libyenne de Misrata, le théâtre d’intenses combats entre les forces de Mouammar Kadhafi et les rebelles », explique le quotidien. « Les anciens soldats sur place ont la bénédiction de la Grande-Bretagne, de la France et d’autres pays de l’OTAN, qui leur ont fourni de l’équipement de communication. Ils vont probablement fournir des informations aux pilotes des hélicoptères d’attaque britanniques et français, qui devraient attaquer certaines cibles dans les environs de Misrata cette semaine. »
Un article semblable paru dans l’édition d’hier du Daily Mirror soutenait que les forces de mercenaires étaient payées par le ministère de la Défense. Une source anonyme haut placée de l’armée a dit : « Ils représentent la Grande-Bretagne — que cela ait été nié ou non — et le gouvernement britannique a donné son feu vert, par des voies indirectes … le gouvernement est malhonnête en niant qu’il y a des soldats sur place, c’est le moins qu’on puisse dire. »
Londres a admis qu’un petit nombre (« environ dix ») de « conseillers » des forces spéciales britanniques se trouve à Benghazi, mais nie que d’autres sont actifs à Misrata ou dans d’autres zones de combat.
Le soi-disant Conseil national de transition à Benghazi — qui est formé de membres de l’ancien régime de Kadhafi, d’organisations islamistes, d’exilés de retour au pays et d’éléments à la solde de la CIA — a été louangé par les États-Unis et les puissances européennes comme étant la force légitime pour la « démocratie » en Libye. Cette assertion a été une fois de plus démentie hier lorsque le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a publié un rapport condamnant les « rebelles » pour la perpétration de crimes de guerre.
Comme on pouvait s’y attendre, le rapport s’est surtout concentré sur les forces de Kadhafi, concluant que « des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre avaient été commis » par le régime, mais il a ajouté qu’il « avait établi que certains actes de torture, des traitements cruels et certains outrages à la dignité humaine commis lors d’actes visant à humilier et dégrader ont été commis par les forces armées de l’opposition, surtout contre des personnes en détention, des travailleurs migrants et ceux soupçonnés d’être des mercenaires. »
Ces conclusions viennent s’ajouter à plusieurs autres rapports détaillant les activités des escadrons de la mort à Benghazi qui attaquent des gens associés au gouvernement Kadhafi. Les opérations de ces escadrons de la mort vont sans aucun doute être intensifiées au lendemain d’un attentat à la voiture piégée commis hier, à l’extérieur d’un hôtel de Benghazi utilisé par des diplomates étrangers venus rencontrer le Conseil de transition national. La direction « rebelle » a aussitôt accusé les agents de la « cellule dormante » de Kadhafi présents dans la ville.