Cet album, co-produit par le CADTM et YOUKOUNGKOUNG Productions, réunit 19 groupes de rap sénégalais qui proposent des chansons visant à sensibiliser les populations sur les grandes thématiques portées par le mouvement altermondialiste. La problématique de la dette du tiers-monde constitue le fil rouge. Interprété par le groupe Keurgui, le premier titre « Quelle dette ? » est on ne peut plus clair : si une dette existe effectivement, les créanciers ne sont pas ceux que l’on croit. L’esclavage, le colonialisme et le néocolonialisme constituent une « dette de sang » que les puissances du Nord ne pourront jamais rembourser. Tandis qu’avec un « Refuse to pay », le dernier titre montre l’alternative, la voie à suivre.
Tout au long de l’album, les rappeurs s’expriment en tant que porte-parole, témoins, voix des sans voix, afin de sensibiliser le monde sur les dures réalités vécues par les populations africaines. Avec le titre « Jigeen », le groupe de femmes « Gotal » parle de la question centrale de la lutte des femmes africaines contre l’oppression patriarcale. Notons que cet album donne une place importante aux artistes « underground ». Ces artistes, pour qui la précarité et les difficultés à se déplacer, se loger, communiquer — sans parler d’enregistrer une composition — font partie du quotidien, sont sans aucun doute les mieux placés pour exprimer ce que vit la grande majorité des populations.
Cet album est également un album anti-systémique qui dénonce l’impérialisme et le système capitaliste (titre n°8 : DRK : « Fuck da system »). Si cet album ne manque évidemment pas de dénoncer puissamment les injustices sociales, il ne se situe pas uniquement dans le registre de la résistance ou la dénonciation. Il veut à la fois porter un message d’espoir (écoutez l’excellente chanson « Keep you head up » de Bat’haillon Blin D) tout en proposant des alternatives concrètes, comme par exemple avec le titre n°6 « Konsommé sénégalais », interprété par le rappeur Gnagass.
L’album « Prise de conscience collective » affirme également, comme le CADTM le fait depuis 20 ans, que la construction d’un monde socialement juste est possible mais que pour ce faire, il est nécessaire de faire converger les luttes. Le sous-titre de l’album est là pour le rappeler : « Pour un monde sans dette et sans oppression : globaliser les luttes contre le capitalisme. »