Ana Belén Montés est sensée recouvrer la liberté en 2026, dans 10 ans. Elle a déjà accompli 15 ans de réclusion.
Vous connaissez maintenant à peu près tous l’histoire d’Ana Belén Montés emprisonnée depuis maintenant 15 ans dans des conditions d’isolement inhumaines dans la prison texane de Carswell.
Rappelons qu’Obama a jugé utile en janvier 2016 de demander un audit des conditions d’incarcération aux Etats-unis, estimant que l’usage de l’isolement y était « excessif » et constituait un « affront à notre humanité commune ». Suite à ce rapport, certes quelques dispositions ont été prises, mais aucune relativement à tous ces prisonniers dont ana Belén Montés fait partie.
Nous participons de ceux qui estiment qu’il convient de tout faire pour sortir Ana du bannissement par sa mise aux oubliettes, et de l’enfer bien réel dans lequel elle se trouve. Des petites améliorations ont été obtenues par rapport à ses conditions initiales de détention, mais celles-ci restent d’une dureté extrême. Elle bénéficie maintenant à peu près des mêmes droits que les prisonniers des prisons de haute sécurité, abstraction faite de son isolement qui reste absolu. Les autres détenues de ce Centre Hospitalier Carcéral souffrent essentiellement de troubles mentaux, pourtant Ana n’en présente aucun, sauf à considérer que son positionnement et ses agissements qui ont motivés sa condamnation, en constituent un.
Elle a écrit le 5 mai dernier ce mot dont voici la traduction : « Je suis convaincue que le gouvernement nord américain veut annihiler tous mes sens : que je cesse d’écouter, de sentir, de parler, d’entendre de voir et de penser. Il n’y parviendra pas. Comme tout être humain au cours de ma vie j’ai eu mes moments de rupture, mais j’ai assez d’intelligence pour me ressaisir et assumer l’autocontrôle de mes actes. Survivre est un défi. D’autres y sont parvenus. J’y arriverai aussi. »
Il s’agit d’aider Ana à tenir le coup dans le cadre d’un mouvement mondial en faveur de la paix, plus que jamais à construire, reconstruire et renforcer Charte de 1945 de l’ONU, à commencer par [son préambule et ses articles 1 et 2]. C’est à notre avis, dans les conditions présentes, tout bonnement vital pour la survie de l’humanité.
Les précédentes actions que nous avons menées en liaison avec d’autres amis d’Ana dans le monde lui ont donné un regain de courage. Nous ne l’abandonnerons pas. Comme pour le premier anniversaire du rétablissement des relations diplomatiques entre les Etats-Unis et Cuba, nous vous demandons d’envoyer le premier juin un petit mot au président Obama pour lui demander la libération d’Ana.
Deux lignes suffisent, vous l’envoyez à l’adresse : info@mail.whitehouse.gov
Pour que nous puissions mesurer l’impact de cette action, ce serait bien de mettre en CCI kakine.roussie@orange.fr
De notre côté, nous allons envoyer la lettre (en PDF) par mail et aussi par courrier postal.
Œuvrons à aider Ana à survivre et travaillons à sa libération en perspective du Pays Monde.
D’autre part, le 16 mai comme probablement plusieurs d’entre vous, nous recevions un courriel de la Maison Blanche nous demandant de proposer une femme d’exception des Etats-Unis pour le sommet des femmes qui aura lieu le 14 juin. Nous avons de suite pensé à Ana Belén Montés, et ne disposions que de quelques heures pour envoyer la proposition. Nous nous sommes inspirés d’une idée de José Gayoso qui avait comparé Ana à Antigone, et chacun de notre côté avons proposé la candidature d’Ana en envoyant des textes très proches.
Nous vous mettons en PDF ci-dessous celui de Maurice le plus complet de nos deux textes. Qui mieux que cette étasunienne de nationalité portoricaine née en Allemagne, pour représenter bien au-delà des Etats-Unis,
- tant les Amériques, soit l’intégralité de ses peuples, au travers de sa sympathie à l’égard de celui de la Cuba, [ce qui a motivé sa précipitation aux oubliettes],
- que le « Pays Monde » auquel, tel qu’elle-même l’a proclamé à ses juges, elle aspire ?
Jacqueline Roussie et Maurice Lecomte.
Ana Belén Montés, née en 1957, est fille d’un couple de portoricains. C’est l’aînée d’une famille de quatre enfants. Son père était médecin militaire et travaillait au sein de l’armée US. Cet homme violent et autoritaire battait sa famille. Sa mère avait obtenu le divorce au bout de 16 ans de mariage. Ana avait alors 15 ans.
Après avoir obtenu une licence, puis une maîtrise en relations internationales à l’Université de Virginie, Ana est entrée à 28 ans à l’Agence de Renseignement pour la Défense du Pentagone (DIA), où elle devenait, 7 ans plus tard, analyste. Elle a eu quelques temps un emploi fictif à la représentation diplomatique à La Havane, soit disant pour « étudier » les militaires cubains. En 1998, retour dans l’Ile pour cette fois, « observer » le déroulement de la visite du Pape Jean-Paul II.
Cette femme discrète, devenue analyste de première catégorie au à la DIA, spécialiste de Cuba, avait accès à presque toute l’information sur l’Ile dont disposait la communauté du renseignement, en particulier sur les activités militaires cubaines. De par son rang, elle était membre du très secret « groupe de travail inter agences sur Cuba », qui rassemble les principaux analystes des plus hautes agences de renseignements des Etats-Unis, comme la CIA par exemple.
Elle a été arrêtée en 2001, jugée et condamnée à 25 ans de prison en 2002 pour espionnage : elle avait remis à Cuba, sans contre partie financière, l’information concernant les plans d’agression des Etats-Unis contre l’île. Elle a risqué sa vie pour défendre la petite île de Cuba de l’agression des Etats-Unis, superpuissance mondiale. Elle n’a par contre jamais nui aux Etats-Unis ni à son peuple, ni même eu une telle intention, bien au contraire. Pourtant on lui a imputé d’avoir indirectement causé la mort d’un Béret Vert en soi-disant dévoilant un secret de polichinelle : l’existence d’une base secrète yankee au Salvador. Scott W. Carmichael un des acteurs de son arrestation, a écrit qu’il n’était pas sûr de sa culpabilité à ce sujet dans son livre True Believer, publié en 2007.
Voici ce qu’a déclaré Ana Belén Montés dans son plaidoyer lors de son procès, avant l’annonce de sa sentence :
« Il existe un proverbe italien qui peut-être, décrit le mieux ce que je crois :
Le monde entier n’est qu’un seul pays. Dans ce pays mondial, le principe d’aimer son prochain comme soi même, est le guide essentiel pour des relations harmonieuses entre tous les pays.
Ce principe implique tolérance et compréhension pour la façon de se comporter envers les autres. Il implique que nous traitions les autres nations comme on aimerait être traité : avec respect et considération. C’est un principe que, malheureusement nous n’avons jamais appliqué à cuba.
Votre honneur, je suis devant vous aujourd’hui pour une activité à laquelle je me suis livrée parce que j’ai obéi à ma conscience plutôt qu’à la loi. Je crois que la politique de notre gouvernement vis-à-vis de Cuba est cruelle et injuste, profondément agressive, et je me suis sentie moralement dans l’obligation d’aider l’île à se défendre contre nos efforts de lui imposer nos valeurs et notre système politique. Nous avons fait preuve d’intolérance et de mépris à l’égard de Cuba depuis plus de 40 ans. Nous n’avons jamais respecté le droit pour Cuba de choisir sa propre voie vers ses propres idéaux d’égalité et de justice.
Je ne comprends pas pourquoi nous devons continuer à dicter aux Cubains comment ils doivent choisir leurs dirigeants, lesquels peuvent ou non être leurs dirigeants, et quelles sont les lois appropriées pour ce pays. Pourquoi ne pouvons-nous pas laisser Cuba poursuivre son propre chemin, comme le font les Etats-Unis depuis plus de deux cents ans
Ma manière de réagir à notre politique Cubaine a peut-être été moralement condamnable. Peut-être que le droit pour Cuba d’exister libre de toute pression politique ou économique ne justifie pas les informations secrètes que j’ai transmises pour l’aider à se défendre. Je peux seulement dire que j’ai fait ce qui me paraissait être juste pour réparer une grave injustice.
Mon plus grand désir est de voir des relations amicales s’établir entre les Etats-Unis et Cuba. J’espère que mon cas contribuera d’une certaine manière à encourager notre gouvernement à abandonner sa politique hostile envers Cuba et à collaborer avec la Havane dans un esprit de tolérance, de respect mutuel, de compréhension... »
Ana Belén Montés a été en quelque sorte précurseur des nouvelles relations entre Cuba et les Etats-Unis et a agi en harmonie avec les principes fondateurs de la Chartre des Nations Unies..
Elle est la prisonnière 25037 – 016 de la prison de Carswell, une annexe du FBI de la Station Aérienne de la Marine des Etats-Unis située au Texas. Elle y est internée dans la section de psychiatrie, bien que ne présentant pas de troubles de ce type. C’est un lieu dangereux pour elle, qui pourrait avoir de graves répercussions sur son état mental.
Ana Belén Montés est sensée recouvrer la liberté en 2026, dans 10 ans. Elle a déjà accompli 15 ans de réclusion. Elle est soumise à un régime d’isolement extrême, même s’il s’est un peu assoupli. Elle ne peut pas recevoir la visite d’amis, uniquement celles de ses proches parents. Son père est décédé et sa mère est impotente. Sa sœur Lucy et son frère Alberto ont tous deux des postes à responsabilité au sein du FBI, elle à Miami, et lui à Atlanta. Lucy a d’ailleurs été décorée pour sa contribution à l’arrestation des membres du réseau « Avispa » auquel appartenaient les Cinq. Ce ne sont donc pas eux qui vont lui apporter un grand réconfort ! Il lui reste son jeune frère Juan Carlos dont nous savons seulement qu’il tient une crèmerie à Miami, et sa cousine Miriam Montés avec qui elle a de bonnes relations, qui vit à Porto Rico, et avec laquelle nous avons quelques contacts. C’est par elle que nous savons qu’Ana téléphone à sa mère tous les dimanches, regarde certains documentaires à la télévision, lit beaucoup, et peut correspondre avec 20 personnes enregistrées et qu’elle fréquentait déjà avant son arrestation. Elle n’a aucun contact avec les autres personnes détenues.
Les autorités pénitentiaires ne donnent aucune information sur sa santé, les traitements médicaux qu’elle reçoit, ni ne justifient le fait qu’elle soit dans un centre destiné aux personnes souffrant de troubles psychiatriques.
Le régime carcéral qu’elle subit n’est pas conforme aux Droits de l’Homme.
En avril 2013, pour la première fois sa sœur Lucy a accepté de répondre aux questions d’un journaliste, en l’occurrence, Jim Popkin. Ses frères se sont opposés à tout interview.
C’est ainsi que nous avons appris qu’Ana avait voisiné successivement avec une femme ayant étranglé une femme enceinte, une ancienne infirmière ayant tué par injections quatre patientes, et une admiratrice de Charles Manson ayant tenté de tuer le Président Ford.
Le travail d’enquête de plus d’une décennie de la journaliste Betty Brink du Weekly, un journal local de Fort Word où est situé Carswell, nous apprend que cet hôpital-prison fédéral a succédé à un précédant fermé entre autres raisons, pour négligence médicale généralisée. C’est très exactement l’identique qui s’y est installé et perdure au vu et su de toutes les autorités en place. Rares sont les critiques, et les dénonciateurs s’exposent à le payer très chèrement. Le terme de « négligence » utilisé est un euphémisme et cette pratique tant sadique qu’assassine englobe des personnels au delà du médical, au regard de chacune des histoires sordides (nombreuses et répétées) ayant pu être connues. Sur une longue période en décennies, et c’est le cas, il est possible de dire qu’elle est structurelle.
Lucy dévoile que dans une lettre de 14 pages, Ana lui avait écrit « il ne me plait pas d’être en prison, mais il y a certaines valeurs pour lesquelles il vaut la peine d’être en prison, ou qui méritent que l’on se suicide pour ne pas passer tout ce temps en prison ».
Nous voyons à travers ces paroles qu’Ana a gardé intactes ses convictions, et lui infliger de vivre dans de telles conditions relève du sadisme et doit avoir des effets dévastateurs.
Nous devons aider cette femme courageuse. Nous devons faire connaître son histoire, et développer des campagnes pour que dans la prison où elle endure sa peine, elle puisse au moins avoir un traitement plus humain.